Nice-Matin (Cannes)

Toulon : le sous-marin Suffren, machine de guerre ?

Après la constructi­on à Cherbourg, le premier des six sous-marins d’attaque nucléaire a débarqué fin juillet dans la rade de Toulon, avec trois ans de retard sur le calendrier initial

- P. M. AYI

Mis à l’eau pour la première fois le 28 avril dernier dans la Manche, le Suffren va poursuivre en Méditerran­ée – puis dans l’océan Atlantique – ses essais en mer, notamment autour du système de combat (dont les torpilles et les missiles antinavire SM-39). Des tirs qui auront lieu au large de l’Île du Levant pour les deux premiers armements, et au centre d’essai des Landes à Biscarross­e pour le dernier.

Dernier né de l’industriel français Naval Group, le Suffren, dont l’usage est prévu jusque dans les années 2060, est présenté comme une véritable machine de guerre. Le 7 décembre dernier, Emmanuel Macron avait même célébré un outil de « l’indépendan­ce de la France ». On vous explique pourquoi.

● Il dispose d’un arsenal impression­nant

Premier sous-marin français lancé depuis plus de 10 ans, le Suffren (1), dont l’étrave est recouverte d’une cocarde bleu-blanc-rouge, est la tête de série des sous-marins de classe Barracuda, dont 12 exemplaire­s à propulsion convention­nelle diesel-électrique ont été vendus à l’Australie. Le submersibl­e mesure 99 m de longueur pour 8,8 m de diamètre. Il pèse 5 300 tonnes et sa vitesse de pointe peut atteindre les 27 noeuds (50 km/h). Ses missiles de croisière ont une portée de 1 000 km. Outre les torpilles et les missiles Exocet SM-39 qui équipent les deux types de SNA (sousmarin nucléaire d’attaque), le Suffren pourra en plus tirer des missiles de croisière navals, une arme qui le dote d’une capacité de frappe dans la profondeur inégalée.

Enfin, il peut embarquer une capacité totale de 70 personnes qui peuvent vivre à plus de 350 m de profondeur pendant une durée pouvant atteindre 70 jours.

Il est très silencieux

Dix-septième sous-marin nucléaire français, le Suffren est l’un des sous-marins les plus discrets au monde. Par rapport aux précédents submersibl­es de classe Rubis, il est « 10 fois plus silencieux », explique l’amiral Prazuck, chef d’état-major de la Marine. « Il fera moins de bruit qu’un banc de crevette », précise même un responsabl­e du constructe­ur Naval Group. Il est aussi « plus endurant, peut rester 70 jours à la mer (contre 45 pour les Rubis) et il est plus redoutable », avec missiles de croisière navals, missiles antinavire­s Exocet et torpilles lourdes.

● C’est un « chasseur » des mers taillé pour le combat

Le 7 décembre dernier, à quelques mètres de l’étrave du sousmarin, l’amiral Christophe Prazuck bombe le torse. « (...) C’est un chasseur, pas un bateau qui va se cacher au fond de l’océan, c’est un bateau qui est taillé pour le combat », décrit le chef d’état-major de la Marine. Un « prédateur » fait pour « rencontrer des adversaire­s » ,les « frôler » et « mener des missions de combat ».

Car la mission du SNA consiste à protéger les bâtiments précieux, comme les porte-avions et sousmarins lanceurs d’engins (SNLE) porteurs des missiles nucléaires, à traquer les sous-marins ennemis et à recueillir du renseignem­ent. S’ajoutent deux autres missions : le tir de missiles de croisière d’une portée de 1 000 km contre des cibles à terre, ainsi que le déploiemen­t de forces spéciales. Pour cela, le Suffren dispose d’un hangar de pont amovible, à l’intérieur duquel un propulseur sousmarin pour nageurs de combat est embarqué.

● il est un bijou de technologi­e

Le Suffren est bel et bien un bijou de technologi­e. Sa conduite est désormais centralisé­e et automatisé­e : le centre d’opérations du sous-marin est doté d’un joystick (manette) pour le diriger, ainsi que de nombreux écrans marquant la digitalisa­tion du navire, notamment pour retransmet­tre les images d’une caméra numérique fixée en haut d’un mât qui remplace le périscope.

Il coûte très cher

Les six engins du programme Barracuda, dont le programme (développem­ent et constructi­on) accuse trois ans de retard, ont coûté 9,1 milliards d’euros, soit « à peu près 1 milliard par navire, 30 à 40 % moins cher que ceux de nos partenaire­s européens », assure Hervé Guillou.

Pour le P.-D.G de Naval Group, les Barracuda sont « les meilleurs sous-marins du monde, à des prix extrêmemen­t attractifs et des capacités opérationn­elles tout à fait exceptionn­elles. Ça nous classe en toute première division au niveau mondial », se réjouissai­t-il en décembre dernier.

Les Barracuda visent à remplacer les six sous-marins de classe Rubis entrés en service à partir du début des années 1980. 1. Depuis 12 ans, 800 entreprise­s et plus de 10 000 personnes ont participé à sa constructi­on.

 ?? (DR) ?? Le « Suffren », arrivé à Toulon fin juillet, va poursuivre en Méditerran­ée ses essais en mer, notamment autour du système de combat.
(DR) Le « Suffren », arrivé à Toulon fin juillet, va poursuivre en Méditerran­ée ses essais en mer, notamment autour du système de combat.

Newspapers in French

Newspapers from France