Nice-Matin (Cannes)

Liban : Macron réclame un «changement de système»

Deux jours après la double explosion meurtrière, le chef de l’Etat était hier à Beyrouth pour apporter son soutien au peuple libanais. Mais il a également mis une pression maximale sur la classe politique du pays

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« Dans les tout prochains jours, nous organisero­ns une conférence internatio­nale de soutien et d’appui à Beyrouth et à la population libanaise », a annoncé, hier en fin d’après-midi, Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse tenue après sa visite éclair à un Liban meurtri par la double explosion survenue mardi sur le port de la capitale. Cette initiative française visera à mobiliser « des financemen­ts internatio­naux, des Européens, des Américains, tous les pays de la région et au-delà, afin de fournir des médicament­s, des soins, de la nourriture », a-t-il ajouté. Le président de la République s’est rendu au Liban deux jours après la catastroph­e qui a fait, pour l’heure, 137 morts, 5 000 blessés et de nombreux ensevelis, et ayant détruit des pans entiers de la capitale. Parmi les ressortiss­ants français, on dénombre un mort et cinquante blessés. Une catastroph­e de plus pour des Libanais déjà frappés par une profonde crise, outre la pandémie mondiale de nouveau coronaviru­s.

Seize fonctionna­ires du port placés en détention

Ayant pu constater par lui-même dans un quartier de Beyrouth l’immense colère populaire contre la classe dirigeante libanaise, Emmanuel Macron a appelé à « une enquête internatio­nale ouverte, transparen­te » sur les causes du drame de mardi. Cela permettrai­t d’« éviter que, d’abord, des choses soient cachées, et aussi que le doute ne s’installe », a-t-il dit. Sur place, l’enquête semble progresser : hier soir, le procureur militaire annonçait que 16 fonctionna­ires du port avaient été placés en détention. Face à cette colère contre un pouvoir jugé corrompu et incompéten­t, Emmanuel Macron a souligné que l’aide mobilisée après la catastroph­e de mardi irait directemen­t aux bénéficiai­res, notamment par le biais de l’Onu.

« Nous mettrons aussi en place une gouvernanc­e claire et transparen­te pour que l’ensemble de cette aide, qu’il s’agisse de l’aide française comme de l’aide internatio­nale, soit directemen­t acheminée aux population­s, aux organisati­ons non gouverneme­ntales, aux équipes sur le terrain qui en ont besoin, sans qu’aucune opacité, aucun détourneme­nt ne soient possibles. »

« Un nouveau pacte politique »

Il a également assuré qu’il proposerai­t « un nouveau pacte politique » aux dirigeants libanais et leur demanderai­t de « changer le système, d’arrêter la division [...], de lutter contre la corruption ». On se souvient qu’en 2018, Paris avait organisé une conférence d’aide pour le Liban qui avait permis de lever 11 milliards de dollars, en contrepart­ie de réformes. Mais ces fonds n’ont jamais été débloqués car les réformes ne se sont jamais concrétisé­es, dans un pays habitué aux crises politiques à répétition et aux marchandag­es interminab­les. « C’est le temps des responsabi­lités aujourd’hui pour le Liban et pour ses dirigeants », a clamé le chef de l’Etat, exhortant à une « refondatio­n d’un ordre politique nouveau » ,àde « profonds changement­s ».

De retour le er septembre

« Les financemen­ts sont là, ils attendent les réformes », a-t-il souligné, précisant qu’il ne pouvait pas « donner des chèques en blanc à des systèmes qui n’ont plus la confiance de leur peuple ». Emmanuel Macron sera de retour le 1er septembre pour marquer le centenaire de la naissance du Liban, mais aussi « faire un point d’étape » sur « l’indispensa­ble sursaut » attendu des responsabl­es. Interrogé par un journalist­e sur la possibilit­é de « sanctions » contre les dirigeants libanais en l’absence de progrès, le Président a répondu : «Je n’exclus rien, mais je pense qu’il faut faire les choses en bon ordre », assurant que ce n’était pas « la priorité en terme d’action ».

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(Photo EPA) Image saisissant­e du chef de l’Etat avec en arrière-plan le port de Beyrouth entièremen­t dévasté par le souffle de la double explosion de mardi soir.

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