Réactions très contrastées après l’accord Émirats arabes unis-Israël
Les alliés des USA veulent y voir une possible reprise du processus de paix avec les Palestiniens. Ceux-ci, soutenus par l’Iran et Turquie, dénoncent une « trahison »
L’accord de normalisation des relations entre les Émirats arabes unis et Israël suscitait hier des réactions contrastées avec, pour plusieurs dirigeants mondiaux, des espoirs de reprise des pourparlers de paix moribonds au MoyenOrient, tandis que les Palestiniens et certains de leurs alliés dénonçaient une « trahison ».
Les Émirats arabes unis et Israël doivent signer d’ici trois semaines à Washington cet accord annoncé par surprise jeudi par le président américain, Donald Trump (nos éditions d’hier) .Ilaété conclu sous l’égide des ÉtatsUnis et fera d’Abou Dhabi la troisième capitale arabe à suivre ce chemin depuis la création de l’État hébreu en 1948, après l’Égypte et la Jordanie.
« État d’esprit nouveau »
Dans le cadre de cet accord, Israël s’engage à suspendre son projet d’annexion de territoires palestiniens, une concession saluée par les gouvernements européens et certains gouvernements arabes comme un encouragement aux espoirs de paix. Mais le Premier ministre Benjamin Netanyahu Netanyahu a déclaré que l’annexion de pans de la Cisjordanie occupée était seulement « reportée » et qu’Israël n’y avait « pas renoncé ».
Les Palestiniens ont de leur côté fermement rejeté l’accord, le qualifiant de « trahison » de leur cause. Ils ont également annoncé le rappel de leur ambassadeur aux Émirats et exigé une réunion d’urgence de la Ligue arabe. Côté occidental, l’accord fait naître des espoirs de relance des pourparlers israélo-palestiniens, à l’arrêt depuis 2014. L’Allemagne a ainsi estimé hier qu’il s’agissait d’une « contribution importante à la paix dans la région » qui allait « permettre de donner un nouvel élan au processus de paix au ProcheOrient
». De son côté, la France y a vu un « état d’esprit nouveau » qui doit «désormais permettre la reprise des négociations entre Israéliens et Palestiniens en vue de l’établissement de deux États ». Même son de cloche au niveau de l’Union européenne et de l’ONU.
« Stupidité stratégique »
Dans le monde arabe, le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, dont le pays est un allié des Émirats et des États-Unis, a sobrement salué l’accord, estimant que cela empêcherait une annexion de pans de la Cisjordanie. Bahreïn et Oman, également alliés des États-Unis, ont fait part de leur soutien. La Jordanie n’a, elle, ni salué ni rejeté l’accord, jugeant que son avenir dépendrait des prochaines actions d’Israël, qui doit mettre un terme à « son entreprise illégale » d’occupation de territoires. Et l’Arabie saoudite, poids lourd de la région, n’a pas réagi.
Les réactions les plus vives sont venues de l’Iran et de la Turquie, alliés des Palestiniens. Téhéran a condamné cet accord qualifié de « stupidité stratégique d’Abou Dhabi et de Tel-Aviv qui renforcera sans aucun doute l’axe de résistance », en référence aux alliés de Téhéran au MoyenOrient. Le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, s’est d’ailleurs aussitôt entretenu avec le chef du bureau politique du Hamas, Ismaïl Haniyeh, des moyens de « faire échouer » cet accord en établissant une « unité » des « factions palestiniennes » ,a annoncé le mouvement islamiste palestinien. Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, critique de longue date d’Israël et souvent en désaccord avec les puissances occidentales, a, lui, menacé de suspendre les relations diplomatiques avec les Émirats ou de rappeler l’ambassadeur d’Ankara. Ankara a accusé les Émirats de « trahir la cause palestinienne » en acceptant de signer cet accord pour « servir leurs petits intérêts ».