Nice-Matin (Cannes)

« Ils sont passés à côté »

Installé à Nice depuis 2009, l’ancien défenseur du PSG, Patrick Colleter, analyse la récente épopée parisienne en Ligue des champions et confie son envie de retrouver le terrain

- PROPOS RECUEILLIS PAR CORENTIN MIGOULE

Ancien latéral gauche rugueux, Patrick Colleter, qui, à l’exception d’une pige en Angleterre, a établi l’essentiel de sa carrière en France, incarne mieux que personne la rivalité paroxysmiq­ue des années 90 entre l’OM et le PSG. Si elle s’était largement apaisée depuis, le récent parcours européen de Neymar et sa bande en a ravivé les braises. Le Breton, vainqueur de la Coupe des Coupes 1996, est revenu sans détour sur l’épopée de son ancien club et sa volonté de retrouver un banc, en France ou ailleurs.

Le PSG était tout proche d’un sacre européen. Entre satisfacti­on d’être allé si loin et frustratio­n d’être passé si près, que retenez-vous ?

En arrivant en finale, les Parisiens ont franchi un cap. Le format était particulie­r certes, mais ils ont fait ce qu’ils avaient à faire en quart et en demie. Après la qualificat­ion à l’arraché face à l’Atalanta, on s’est dit « C’est leur année ». Ensuite, ils font une grosse demi-finale contre une bonne équipe de Leipzig mais qui n’est pas un grand d’Europe. Malheureus­ement, ils sont passés à côté de leur finale. En face, il y avait une grosse équipe du Bayern. Neymar et Mbappé n’ont pas été à la hauteur de l’événement mais ils n’ont pas été aidés par leur milieu qui s’est fait manger par celui des Allemands.

Qu’a-t-il manqué aux Parisiens ?

C’est un groupe entier qui est allé chercher la qualificat­ion à Bergame. Ce n’est pas un joueur ou deux joueurs. Mais en finale, on attendait trop de Neymar et Mbappé. Contre le Bayern, le talent individuel ne suffit pas. Il faut un groupe très solide.

Qu’avait votre PSG de , vainqueur de la Coupe des Coupes, que n’a pas le PSG actuel ?

Ce n’est pas comparable. Nous, ça faisait cinq ans qu’on était ensemble. On était vraiment une famille, on vivait ensemble tout le temps. On dit souvent ça pour des petits clubs familiaux mais pour le PSG de l’époque, c’était vraiment le cas. Pendant cinq ans on a joué l’Europe et le succès s’est construit sur ces aventures. On avait aussi des grands joueurs, mais les moyens ne sont plus les mêmes. Ce qui fait que le football d’aujourd’hui et celui d’il y a  ans n’ont vraiment rien à voir.

Éric Di Meco, qui a fait l’essentiel de sa carrière à l’OM et qui vit toujours à Marseille, a-t-il bien fait de renoncer à commenter la finale du PSG ?

Est-ce vraiment lui qui a pris cette décision ? Je ne sais pas. Je le connais un petit peu et je me demande si c’est lui qui a décidé. Comme je n’en suis pas sûr, je ne ferai pas de commentair­es.

En ayant porté le maillot des deux clubs, comprenez-vous les célébratio­ns des Marseillai­s après l’échec parisien ?

J’ai du mal à comprendre. Pourtant j’ai joué à Marseille, je sais comment sont les supporters, je les connais. Mais il faut arrêter avec ça. Faire la fête parce que Paris a perdu une finale de Ligue des champions, c’est vraiment petit. Qu’ils ne les supportent pas, à la limite je comprends. On connaît la rivalité entre les deux clubs. Mais de là à célébrer un échec, je ne suis pas d’accord.

C’est peut-être un moyen d’entretenir la rivalité...

Les Marseillai­s ne peuvent plus rivaliser avec Paris. Aujourd’hui, il y a trop d’écart. À notre époque, l’OM était au top et nous étions un petit peu en dessous, mais on arrivait quand même à les titiller. À l’heure actuelle, en France, il y a le PSG et les autres. Les Marseillai­s en sont conscients et c’est pour cela que la rivalité s’est renforcée avec les Lyonnais. Ils se battent pour le podium. On a la sensation qu’ils ont fait une croix sur le titre, et c’est dommage.

N’est-ce pas une forme de lucidité de leur part ?

Si, tout à fait. Mais aujourd’hui ce qui est regrettabl­e, c’est que dès la première journée on sait que le PSG va être champion. Globalemen­t, la Ligue  est d’un bon niveau. Tous les clubs se renforcent de plus en plus, on voit des équipes qui jouent bien au football. Mais il faudrait que les clubs juste en dessous de Paris arrivent à s’accrocher pour amener plus de fun à ce championna­t.

Quelles sont selon vous les équipes les mieux armées pour y parvenir ?

C’est dur à dire. Il faudra voir ça après le mercato qui s’achève en octobre (le ). Sur les premiers matchs, des coachs vont s’apercevoir qu’ils ont des manques et qu’ils auront besoin de renforts dans certains secteurs du jeu. Mais Rennes joue un beau football. Derrière, Lyon et Marseille vont être à la lutte.

Nice, qui a fait un excellent recrutemen­t, pourquoi pas aussi. Il faut que ces clubs-là arrivent à hisser leur niveau pour titiller le PSG, ça donnerait un championna­t plus homogène.

La Ligue  a repris avec des tribunes clairsemée­s, voire fermées. Comment auriez-vous vécu cette période en tant que joueur ?

L’absence de public m’aurait impacté sans aucun doute. On aime l’ambiance du stade, tous les bruits. La chaleur du public, on a besoin de ça. Mais aujourd’hui, il faut s’habituer à ça, je ne sais pas pendant combien de temps, mais il faut faire abstractio­n. Ça peut perturber des équipes plus que d’autres. Par exemple pour Monaco, ça change peu de choses. Il n’y a jamais eu une ambiance exceptionn­elle au Louis-II et le stade est rarement plein, à part contre Nice ou l’OM. En revanche, ça peut être plus difficile pour d’autres. Même financière­ment, pour les clubs, c’est un manque à gagner terrible.

Patrick, en étant installé dans la région, suivez-vous les équipes locales ?

Bien sûr, je regarde les équipes du coin. Je trouve que Patrick Vieira fait un super boulot à Nice, sincèremen­t. Même si l’année dernière a été un peu compliquée dans le jeu, c’est le lot de beaucoup d’équipes. Ce que je vois, c’est que Nice est en train de monter un gros projet avec Ineos. Et Monaco reste Monaco. C’est toujours particulie­r, même s’ils essayent de changer un peu la donne. Ils ont beaucoup de joueurs sous contrat. Ils ont joué avec pas mal de jeunes lors de la re journée (- face à Reims, avec  joueurs de moins de  ans dans le onze de départ). Mais ils vont sans doute recruter d’ici la fin du mercato. Paul Mitchell et Niko Kovac ? Difficile de juger. Ils ont de l’expérience et c’est important. Monaco, ça reste toujours spécial.

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Neymar et Mbappé n’ont pas été à la hauteur ”

À  ans, vous semblez toujours aussi passionné lorsqu’il s’agit de parler de football. Êtes-vous à la recherche d’un banc ?

Au départ, le métier d’entraîneur ne m’attirait pas spécialeme­nt. Et puis un petit peu par hasard, j’ai passé mes diplômes. J’ai entraîné une CFA (National ) près de Bordeaux (FC Saint-Médard-enJalles, de  à ). Ricardo, avec lequel j’étais resté en contact, m’a proposé de devenir son adjoint à Bordeaux, puis à Monaco. On a aussi eu une aventure en Arabie Saoudite, qui ne s’est pas très bien terminée, mais c’est le football. Aujourd’hui, moi je suis ouvert à tout, je suis prêt à bouger, j’ai toujours fait ça. En espérant que l’on puisse trouver un projet intéressan­t.

Votre destin est donc lié à celui de Ricardo ?

Non, pas forcément. Mais j’ai toujours travaillé avec lui. Aujourd’hui, c’est compliqué d’intégrer un staff, ils sont tous déjà formés. Après, moi je suis ouvert à tout, j’aime le football. Mais lié à Ricardo, non pas spécialeme­nt.

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Faire la fête parce que Paris a perdu, c’est vraiment petit ”

Vous ne refuseriez donc pas un poste en France, L comme L ?

Non absolument pas. Vous pouvez même écrire que je suis en RECHERCHE (il appuie sur le mot) d’un projet (rires). Après, si ce n’est pas en France, je suis prêt à bouger. Je ne cible aucun club.

Retrouver un poste de consultant

serait aussi un moyen de rester (*) dans le monde du football...

Entraîner j’adore, commenter j’ai adoré aussi. Ce n’est pas du tout le même exercice, mais on reste connecté, on voit des matchs, des joueurs, des dirigeants. Donc pourquoi pas aussi, si une opportunit­é se présente. (*) Il a été consultant pour la chaîne beIN SPORTS entre 2012 et 2014. Patrick Colleter a commencé sa carrière à Brest. Il a joué au PSG (de 1991 à 96), à l’OM (97-99) et à Cannes (2000-2001)

 ??  ?? Passé par l’OM entre  et , Patrick Colleter a effectué l’essentiel de sa carrière de joueur au PSG où il a glané, entre autres, un titre de champion de France en  et deux fois la coupe de France ( et ). (Photos DR et PQR)
Passé par l’OM entre  et , Patrick Colleter a effectué l’essentiel de sa carrière de joueur au PSG où il a glané, entre autres, un titre de champion de France en  et deux fois la coupe de France ( et ). (Photos DR et PQR)

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