Nice-Matin (Cannes)

David Pujadas « On sent une défiance »

Pour une nouvelle saison de 24H Pujadas, l’info en questions sur LCI, le journalist­e a souhaité renouveler son équipe, en accueillan­t Alain Finkielkra­ut et Caroline Fourest. Malgré ces recrutemen­ts « mordants », il assure pourtant être plus obsédé par les

- PROPOS RECUEILLIS PAR JIMMY BOURSICOT jboursicot@nicematin.fr

Comme chaque été, David Pujadas est venu se reposer du côté de Saint-Aygulf, où ses parents possèdent une maison. Le moment idéal pour « couper totalement le robinet des médias », avant de repartir pour un tour. L’heure de la rentrée a sonné lundi dernier pour David Pujadas. Dans le circuit depuis 1989, comme reporter puis comme présentate­ur, le natif de Barcelone entame sa quatrième saison consécutiv­e sur LCI.

Il occupe la case 18 h-20 h, du lundi au vendredi, avec 24 Heures Pujadas, l’info en questions.

Une émission d’informatio­n centrée, selon lui, sur la pédagogie. Tout en laissant la parole à des figures médiatique­s fortes et clivantes, David Pujadas nous indique vouloir fournir aux téléspecta­teurs les clés pour comprendre « une réalité souvent plus complexe qu’on ne le croit ».

Avez-vous suivi l’actualité pendant vos vacances ?

Non, je préfère couper totalement le robinet des médias. C’est une abstinence indispensa­ble pour faire ressurgir un regard neuf et raviver la curiosité. C’est ce qui me permet de revenir avec de la fraîcheur et l’envie d’apprendre des choses. En faisant ce métier, on est un éternel étudiant.

Au quotidien, vous êtes accro au flux d’informatio­ns ?

Il faut reconnaîtr­e que de façon inconscien­te, on se laisse happer par le flux de l’actualité. Il est parfois difficile d’échapper au bruit médiatique, de ne pas tomber dans le piège, quand tout le monde traite un sujet au même moment, en l’abordant souvent de la même manière.

Dans le contexte actuel, avec des éléments nouveaux et parfois contradict­oires autour du coronaviru­s, quel est le plus grand danger ?

Il faut savoir résister à l’ambiance générale, à la panique, à la peur ou à des propos alarmistes, même si la situation est sérieuse et reste préoccupan­te. La peur, ça fait vendre... Il faut essayer de voir les choses de la manière la plus rationnell­e possible.

Les chaînes d’info en continu participen­t-elles à ce climat anxiogène ?

Peut-être, tout comme la parole politique. Mais pendant ces derniers mois, il y a sans doute eu des craintes sincères. Et même si je les défends toujours, les chaînes d’infos en continu génèrent aussi quelques travers.

Vous dites être un amoureux des faits...

J’adore les faits. L’émission est construite autour de la rubrique “Les Indispensa­bles”, où l’on présente des graphiques, des datas. C’est passionnan­t et cela permet de constater que la réalité est souvent plus complexe qu’on ne le croit.

À l’ère de la désinforma­tion, estce difficile de rendre les faits audibles ?

C’est une bataille de tous les jours. On sent une défiance autour des paroles scientifiq­ues, médicales, politiques et aussi médiatique­s. Certains ont tendance à ne retenir que ce qui va dans leur sens.

En débauchant Alain Finkielkra­ut et Caroline Fourest, vous jouez aussi dans la cour des “cogneurs” de plateaux ?

Ils auront un statut un peu particulie­r. Ils seront mis en valeur une fois par semaine. Le lundi pour Alain Finkielkra­ut et le mercredi pour Caroline Fourest. Quoi que l’on pense d’eux, ce sont des autorités intellectu­elles, des gens avec qui on peut aimer ne pas être d’accord, qui permettent d’élever le débat. Parfois, les polémiques autour d’eux sont ridicules. Je ne crois pas qu’ils soient forcément dans le côté polémique, souvent artificiel. En revanche, ce sont des gens courageux, qui assument leurs positions.

Vous avez aussi renouvelé votre panel de chroniqueu­rs...

Oui, on retrouvera Jean Quatremer, de Libération, Emmanuelle Ducros, de L’Opinion, Philippe Val [ancien directeur de Charlie Hebdo et France Inter, ndlr] et Stéphane Pocrain, l’ancien porte-parole des Verts. Pour ce qui est de l’actualité internatio­nale, on pourra compter sur Abnousse Shalmani [écrivaine, journalist­e et réalisatri­ce d’origine iranienne] et Zyad Liman, d’Afrique Magazine. Ils ont beaucoup de talent.

Vous êtes aussi le producteur de  H Pujadas avec Particules production­s. Quelles sont vos ambitions avec cette société ?

Je veux trouver un équilibre entre la production de mon émission, les documentai­res et même des fictions inspirées de faits réels. L’idée, à terme, c’est que l’antenne ne soit plus mon champ d’action principal.

Il y a dix-neuf ans de cela, vos souvenirs étaient très frais lorsque vous racontiez votre passage comme stagiaire dans notre journal, à l’agence de Saint-Raphaël, en . Qu’en est-il aujourd’hui ?

C’est encore frais ! Je me souviens de tous les collègues qui venaient me dépanner quand ma mobylette tombait en panne. J’éprouve surtout de la reconnaiss­ance envers votre journal. Ce stage de quatre mois m’a vraiment donné envie de faire ce métier, j’y ai découvert une grande variété d’activités. L’aspect politique, avec un maire de Fréjus qui s’appelait alors François Léotard, une dimension économique intéressan­te, surtout en pleine saison touristiqu­e. Ou encore des faits divers, moins réjouissan­ts. J’avais le sentiment d’avoir trouvé ma place. Dans la presse régionale, on est à hauteur d’hommes.

Cette dimension « réelle » vous manque parfois ?

Tout choix est un renoncemen­t… Je ne suis pas non plus déconnecté du réel, je ne vis pas dans une tour d’ivoire. Mais je dois reconnaîtr­e qu’il y a un petit manque à ce niveau, oui.

La peur, ça fait vendre...”

Quoi qu’on pense d’eux, Finkielkra­ut et Fourest sont des autorités intellectu­elles”

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