Nice-Matin (Cannes)

Un deux-pièces squatté au Suquet

Un couple de Danois, propriétai­re d’un deux-pièces dans la vieille-ville, a eu la désagréabl­e surprise en juillet dernier d’apprendre qu’une famille de dix personnes occupait son bien

- CHRYSTÈLE BURLOT cburlot@nicematin.fr

L’histoire du couple Kaloustian, dont la villa a été squattée à Théoule pendant trois semaines, n’a pas seulement ému la France entière. Elle a aussi enhardi d’autres propriétai­res squattés à s’exprimer…

Peter Thomsen et son épouse, danois, sont propriétai­res d’un petit appartemen­t au Suquet depuis 2005. Le couple vient profiter des bonheurs de la cité des festivals deux à trois semaines par an. Le reste de l’année, il loue son bien. En juillet dernier, sachant que des amis allaient justement y passer quelques jours, il a demandé à sa femme de ménage d’aller rafraîchir les lieux.

Mais lorsque celle-ci a ouvert la porte du deux-pièces, elle s’est retrouvée nez à nez avec une famille : Franco D., son épouse, ses enfants et petits-enfants. Dix personnes en tout, déclarant qu’elles occupaient les lieux depuis le mois de mai, en toute légalité.

Deux plaintes déposées

Peter Thomsen a immédiatem­ent pris un avion pour la France.

« Il est allé déposer plainte au commissari­at contre la famille qui occupe illégaleme­nt son bien. Et contre un soi-disant agent immobilier qui leur aurait donné les clefs et rédiger un bail », explique Maître Benjamin Roge, avocat du propriétai­re.

Lorsque nous nous sommes rendus sur place, au deuxième étage d’un immeuble situé rue Jean-Hibert, la porte s’est effectivem­ent ouverte sur des occupants prêts à raconter leur version de l’histoire.

« Nous avons vu une annonce sur Facebook : un appartemen­t à louer et nous avons pris contact avec l’agent immobilier en question. Celui-ci avait les clefs et nous a fait visiter trois fois l’appartemen­t avant que nous décidions de le prendre. Il nous a dit qu’il viendrait tous les 5 du mois et qu’il fallait, pour le moment que nous le réglions en cash. Après il nous donnerait un RIB . En août, il a demandé que nous lui réglions deux mois. Depuis plus de nouvelles. Plus moyen de le joindre », a expliqué le père de cette famille originaire de Croatie. Un paiement en cash, une photocopie du passeport du soi-disant agent immobilier, un bail signé de la main de M. Thomsen, que ce dernier conteste, et même une vidéo où l’on voit, de dos, l’agent réceptionn­er l’argent du loyer. Voilà l’histoire qui nous a été racontée ce jour-là. Rien ne prouve qu’elle soit fausse. Rien qu’elle soit vraie.

Nous sommes entrés en contact par téléphone avec l’avocate de la famille. Pour Estelle CassutoLoy­er, il s’agit ici « d’un cas de marchand de sommeil et non pas de squat. Une plainte a été déposée contre l’agent immobilier. ». Dans un premier temps, l’avocate a accepté de nous rencontrer à l’appartemen­t. Le rendez-vous avait été fixé hier à 14 heures. Mais elle n’est pas venue. Rencontré dans la rue, Franco D a expliqué qu’il l’avait appelée pour annuler, qu’il ne souhaitait plus communique­r, car « la police lui avait déconseill­é ».

Au tribunal en octobre

Un référé a été déposé par l’avocat de Peter Thomsen et une audience est prévue le 7 octobre. En attendant, Franco D. assure que dès qu’il aura trouvé un logement, sa famille et lui quitteront les lieux.

De son côté, Peter Thomsen apparaît désappoint­é par la façon dont le dossier est traité en France. Pour lui, au Danemark il en serait allé autrement…

« C’est évidemment une grande préoccupat­ion au sein de ma famille. Et nous devons reconsidér­er notre avenir en France. Quoi qu’il en soit, alors que le changement climatique améliore considérab­lement les étés nordiques, nous pourrions vouloir investir dans la Riviera danoise pour les décennies à venir… » Voilà qui peut s’avérer inquiétant pour la France selon Jesper Bitsh, conseil de Peter Thomsen à Cannes et président de Côte d’Azur real estate services. « Je représente quelques propriétai­res étrangers à Cannes. Beaucoup sont inquiets de ces occupation­s abusives. Je sais que le ministère du Logement prépare une améliorati­on de la loi. Mais cela prend du temps... »

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(Photo Patrice Lapoirie) Jesper Bitsh, conseil du propriétai­re, montre, devant l’entrée de l’immeuble, la plainte déposée .

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