Nice-Matin (Cannes)

« Prêt à laisser ma vie face aux frères Kouachi »

Philippe B. a passé 15 ans au GIGN. En janvier 2015, il était en première ligne dans l’assaut contre les frères Kouachi. Aujourd’hui, il souhaite devenir acteur

- JEAN-MICHEL POUPART

Philippe B., ancien membre du GIGN et aujourd’hui acteur sous le nom d’Aton était invité au cycle de conférence proposé par ASP Bodyguard à La Roquette sur Siagne. Avant sa rencontre, très attendue par ses admirateur­s, l’homme s’est confié sur son parcours de vie et sur ses expérience­s, notamment celle du 9 janvier 2015 face aux frères Kouachi dans l’assaut final contre les deux terroriste­s à Dammartin.

Depuis deux semaines, le procès des attentats de janvier  s’est ouvert à Paris, le suivez-vous ?

Non. Pour moi, le jugement a été rendu, ils sont morts. Je ne suis pas juge, mon métier était d’appréhende­r les individus et les remettre à la justice. Lors de chaque interventi­on, le GIGN a la capacité de donner la mort ou pas et on réfléchit toujours aux risques pour nous, dans l’immédiatet­é, de laisser une personne vivante ou pas. Pour en revenir au procès, je pense que je serai très très sévère : pour moi, une personne qui a facilité un attentat mérite la prison à vie.

Vous avez voulu entrer dans le GIGN après avoir vu la prise d’otages à l’aéroport de Marignane en , pensezvous que Dammartin puisse également susciter des vocations ?

Je suis très présent sur les réseaux sociaux et beaucoup de jeunes me le disent. C’est le côté positif que je tire de cette journée-là. Malheureus­ement, on n’en aura jamais fini avec les attentats, mais c’est un autre débat.

Dans votre livre, vous racontez votre jeunesse, assez mouvementé­e… Le fait que vous ayez pu basculer de l’autre côté, du côté des voyous…

J’ai fait des bêtises et des personnes m’ont tendu la main pour m’aider. L’enquête de moralité a duré deux ans avant que je puisse rentrer en Gendarmeri­e ! Je suis très ouvert avec la jeunesse et je considère comme un devoir de partager mon expérience. On a tous droit à l’erreur et on a toujours la possibilit­é de se racheter.

Pourquoi ce titre de « Confession­s » ?

Je me suis livré sans filtres, mais après relecture, il y a des choses que j’ai enlevées, parfois il vaut mieux pour le public de ne pas tout savoir.

Vous n’êtes pas tendre avec les politiques…

Ils le méritent. Je m’exprime en mon nom propre. Ils ne nous ont pas facilité la vie, c’est encore le cas aujourd’hui.

Vous avez quitté le GIGN après  ans d’exercice. Des regrets ?

Aucun, de la nostalgie oui, des regrets, non. J’y ai vécu des situations exceptionn­elles. J’ai un bagage émotionnel impression­nant : on est des êtres humains et il faut savoir se relever face à la détresse humaine et se faire une raison pour continuer à croire en l’humanité.

Aujourd’hui, vous faites du cinéma, quels sont vos projets ?

Je pars de zéro et je travaille beaucoup. Il y a de belles propositio­ns avec des premiers rôles en attente. « GIGN, confession­s d’un OPS » par Philippe B. avec Jean-Luc Riva (Ed. Nimrod) ; « Féral, cette force qui existe en nus » par Aton et Jean-Luc Riva (Ed. Nimrod). « Le jour de la tuerie de Charlie Hebdo, il est  heures lorsque nous quittons notre base pour rejoindre la campagne et traquer les deux terroriste­s. Le lendemain, à  heures, nous abandonnon­s le ratissage à pied et en véhicules pour monter à bord de nos deux hélicoptèr­es. On va chercher toute la journée et toute la nuit. Le  janvier, au matin, on arrive devant l’imprimerie où ils se sont retranchés. Vers midi, la décision de déclencher une interventi­on est prise et c’est à ce moment-là qu’on apprend la prise d’otages de l’Hyper Cacher. On décide alors d’intervenir en même temps à Paris et à Dammartin. Dans la colonne qui va entrer dans l’imprimerie, je serai en deuxième position, juste derrière celui qui tient le bouclier d’assaut. On sait à ce moment-là qu’on va recevoir des impacts mais on y va quand même. J’étais prêt à laisser ma vie face aux frères Kouachi. Finalement, ce sont eux qui sortent et nos tireurs d’élite les abattent. C’est fini. »

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Dans ses ouvrages, Philippe B. raconte ses quinze années au sein du GIGN. (Photo J.-M.P.)

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