Nice-Matin (Cannes)

Octobre  : dans le Var, Cotte a la cote

Il y a 150 ans, un nouveau préfet est installé à Draguignan pour imposer dans le départemen­t l’instaurati­on de la IIIe République.

- Nous@nicematin.fr

La guerre n’était pas finie. Il y a cent cinquante ans, en octobre 1870, la France continuait de se battre contre la Prusse. Napoléon III avait été fait prisonnier le 2 septembre, l’Empire avait été aboli et la IIIe République instaurée le 4 septembre. Malgré cela, le conflit contre la Prusse continuait. Paris étant assiégée, le gouverneme­nt, dirigé par Gambetta, avait dû se réfugier à Tours.

Les choses allaient mal. Dans notre région en particulie­r. À Nice, le maire Malaussena avait dû quitter son poste (voir nos éditions du 6 septembre). Dans le Var, la situation n’était pas meilleure.

À Toulon, à la suite de la démission du maire bonapartis­te Eugène Audémar, le conseil municipal avait mis à sa tête le plus jeune maire que la ville ait connu, Noël Blache,

‘‘ avocat de 28 ans dont l’écrivain Émile Zola en personne vantait les mérites. Républicai­ns et bonapartis­tes s’affrontaie­nt. Un nouveau préfet fut nommé pour remettre de l’ordre dans le Var. Ce fut Paul Cotte. Ainsi que le relate l’historien Maurice Mistre, cet homme natif du village de Salernes dans le Var, qui s’était insurgé en 1851 contre le coup d’État de Napoléon III de 1851, qui avait été arrêté et emprisonné, fut installé à la tête de la préfecture de Draguignan dès le 5 septembre. C’était une volonté de Gambetta.

Partout des maires républicai­ns

Cotte est Républicai­n. Cotte a la cote. Il va s’employer à nommer dans le départemen­t des maires de son bord : Edmond Basset à Salernes, le tailleur Cauvy au Luc, le socialiste Eugène Flayols à Bras, etc. Aux désordres politiques et institutio­nnels s’ajoutent les inquiétude­s de la guerre. Dans le Var on constitue comme partout en France des comités de défense. Augustin Daumas, ancien portefaix, devient commissair­e général la Défense pour le Var. Noël Blache, à Toulon, achète des caisses de fusils pour protéger sa ville. Il relance les activités de la fonderie des frères Bouisson, laquelle fabriquera en un temps record 240 000 balles et 150 000 boulets. Mais Noël Blache n’aura guère le temps d’agir. Dès le 5 octobre, il est envoyé à Nice par Gambetta pour remettre de l’ordre dans un départemen­t où le préfet est dépassé par les événements. Il démissionn­e donc de son poste de maire de Toulon un mois après avoir été nommé. L’avocat Vincent Allègre lui succède.

Tout cela favorise l’instabilit­é dans la région. Mais Gambetta garde le moral : « L’avenir n’est interdit à personne ! »

Des mouvements s’effectuent dans le port de Toulon, de peur que la guerre ne devienne maritime. Tous les ports français prennent leurs précaution­s, de Toulon à Cherbourg ou Dunkerque. Parmi les engagés célèbres de notre région dans la marine française se trouve le prince héréditair­e Albert 1er de Monaco – et cela malgré la neutralité de son pays.

Le Journal de Monaco suit donc de près les opérations au niveau maritime. Il a dépêché à Toulon son envoyé spécial, lequel constate, le 13 septembre: « On croirait l’ennemi aux portes de Toulon. On arme les forts en prévision de ce qui pourrait se produire, plus tard. Le navire le Jura a amené 2 000 hommes d’Afrique et les prisonnier­s prussiens faits à bord des navires de commerce pris près d’Oran… ».

Au milieu de toute cette instabilit­é, Gambetta garde le moral”

Un mort dans une manifestat­ion

Le 4 octobre, le vieux préfet maritime Chopart, à qui le gouverneme­nt a pourtant donné les pleins pouvoirs pour protéger le littoral méditerran­éen, donne sa démission. Il est remplacé par l’amiral La Grandière, ancien gouverneur de la Cochinchin­e. Celui-ci ne restera… qu’une semaine à son poste ! On l’accuse d’avoir des idées d’Ancien Régime. Ayant emprisonné un officier qui a tenu des « propos révolution­naires », il a déclenché, le 13 octobre, une manifestat­ion de rue. Il y a eu un mort. Le préfet Cotte est obligé d’intervenir. Il obtient le départ du nouveau préfet maritime, dix jours après sa prise de fonction ! C’est la valse des administra­teurs et des politiques. La IIIe République a du mal à s’installer. La France et le Var ne sont pas au bout de leurs peines. On aura l’occasion d’y revenir. La guerre de 70 ne s’arrêtera qu’en... mai 1971 ! ANDRÉ PEYREGNE

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