Nice-Matin (Cannes)

Affaibli par deux AVC, le pianiste Keith Jarrett se retire de la scène internatio­nale

- ROBERT YVON

Victime de deux AVC successif en 2018, le pianiste américain Keith Jarrett ne parvient pas à se remettre. Il reste handicapé du côté gauche, et annonce dans une interview exclusive au New York Times parue ce mercredi : « Je ne me considère plus comme un pianiste aujourd’hui ». « Mon côté gauche est toujours en partie paralysé...On me dit que le maximum que je pourrais récupérer de ma main gauche, c’est la capacité de tenir un verre », confie-t-il au quotidien américain avant d’ajouter : « Je me déplace difficilem­ent chez moi à l’aide d’une canne. Je ne peux plus jouer de piano... » Le dernier concert de Keith Jarrett remonte au mois de février 2017 au Carnegie Hall de New York. L’artiste compositeu­r et immense improvisat­eur est connu dans le monde du classique pour son travail autour de l’oeuvre de Bach. Mais il reste considéré dans le monde du jazz comme un des plus grands pianistes au monde, capable de réinventer des standards, d’improviser dans les plus grandes salles du monde des compositio­ns inspirées des lieux qu’il habite.

Citoyen d’honneur d’Antibes

C’est avec le mythique trio composé du batteur Jack De Johnette et du contrebass­iste Gary Peacock, qu’il s’est le plus souvent produit sur la Côte d’Azur. Un trio venu réinventer les standards du jazz plus de trente fois dans la Pinède-Gould de Juan-les-Pins. Au point que le maire Jean Leonetti avait offert symbolique­ment les clés d’Antibes au pianiste américain « citoyen d’honneur » le 12 juillet 2013 à l’occasion des 30 ans d’existence de la formation.

Un album live enregistré à Juan-les-Pins en 

Le trio avait aussi enregistré en 2008 un album live à Juan (Up for it) paru sur le label ECM de Manfred Eicher. Il s’était produit pour la première fois dans la Pinède-Gould en 1966 dans la formation du saxophonis­te Charles Lloyd. « Pour moi, jouer à Antibes est chaque fois un bonheur de création. Je ne suis pas capricieux. Mais je ne supporte pas qu’on vienne à un concert pour parler, ou pour faire du bruit. J’offre une création dans le silence. Il faut me respecter. Je n’accepte que les bruits naturels et le cri d’un enfant », avait-il confié dans une interview à Nice Matin en juillet 2008. Il s’y est produit 25 fois jusqu’en 2013. Keith Jarrett avait pour habitude d’être logé pendant ses concerts à l’hôtel du Cap-Eden Roc ou à Nice à l’hôtel Méridien.

Un caractère pointilleu­x

Il y restait en moyenne une semaine pour profiter de la Côte d’Azur. Jarrett a marqué l’histoire du jazz par son talent, sa créativité, et aussi par ses nombreux caprices. Il a plusieurs fois interrompu ses concerts à cause du bruit, des avions, d’un feu d’artifice ou parce que des photograph­es le dérangeait. Il était ensuite capable de reprendre le morceau à la note exacte où il l’avait arrêté. Le label ECM s’apprête à sortir le 30 octobre prochain un concert inédit d’improvisat­ions en solo enregistré à Budapest au Béla Bartok National Concert Hall en 2016. Un concert hommage à la partie de la famille de l’artiste originaire de Hongrie.

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Keith Jarrett, lors d’une tournée à Nice. (Photo F. Fernandes)

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