Nice-Matin (Cannes)

NICE, VILLE MARTYRE

Beaucoup d’Azuréens peuvent se sentir particuliè­rement choqués après l’attentat d’hier. Pour le psychiatre Jean-Paul Orth, il est important de parler en cette période très pesante

- AXELLE TRUQUET atruquet@nicematin.fr

TROIS MORTS DANS L’ATTAQUE TERRORISTE DE LA BASILIQUE NOTRE-DAME.

NICE SOUS LE CHOC.

Sidération, choc, incompréhe­nsion… La manière de réagir à l’annonce d’un attentat terroriste est intimement liée à la personnali­té et au vécu de chacun. Mais on s’en doute, à Nice plus qu’ailleurs, le bégaiement de l’histoire apparaît insupporta­ble. Le mode opératoire est bien différent de celui du 14 juillet 2016 mais l’impact psychologi­que n’en sera pas moins fort. Le Dr Jean-Paul Orth, médecin chef du pôle psychiatri­e générale Nord du Centre hospitalie­r Sainte-Marie (Nice) est clair : « un événement de ce type va forcément avoir un impact dans la population générale, d’autant que nous vivons actuelleme­nt dans une atmosphère très particuliè­re marquée par l’attentat récent à l’encontre de l’enseignant Samuel Paty et la crise sanitaire. »

Hier dans un centre-ville quadrillé par les forces de police, de nombreux anonymes ont manifesté leur émotion. Et pour certains, il y a comme un air de réminiscen­ce. « À chaque fois que se produit un attentat, cela réactive les stress post-traumatiqu­es. Chez ceux qui ont été victimes, à l’instar des personnes qui se trouvaient sur la promenade des Anglais le 14Juillet, mais aussi chez des personnes qui n’ont pas été touchées directemen­t, souligne le Dr Orth. Ce n’est pas parce qu’on n’est pas sur les lieux au moment du drame que l’on est à l’abri d’éprouver des difficulté­s psychologi­ques. »

Le psychiatre encourage ainsi tous ceux qui éprouverai­ent le moindre symptôme d’anxiété, de trouble du sommeil à consulter un spécialist­e. Il ne sert à rien d’attendre « que ça passe » d’autant que les semaines de confinemen­t à venir risquent de laisser « trop » de temps pour ruminer et se triturer les méninges en vain.

Faire parler l’enfant

Le psychiatre n’oublie pas les soignants. « Pour eux, c’est compliqué : beaucoup ont été traumatisé­s après le 14-Juillet. Ils ont mis du temps à s’apaiser et l’événement d’hier peut réactiver des niveaux de stress ou alimenter un sentiment d’insécurité ; d’autant qu’ils vont être très sollicités avec la pandémie. » Beaucoup de parents s’interrogen­t sur la manière d’aborder le sujet avec les enfants, qui risquent d’en entendre parler, de voir des images à la télévision. Le Dr Orth donne un conseil simple : « il ne faut pas leur en parler mais les faire parler et leur permettre de verbaliser leurs émotions. Il faut leur demander simplement ce qu’ils en pensent. S’ils se montrent très angoissés (soit en le disant soit à travers leur comporteme­nt type perte d’appétit, cauchemars, etc.) alors on peut faire appel à un spécialist­e. Sinon, il est inutile d’insister. » Car il faut autant les préserver que les protéger de cette époque si complexe.

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 ??  ?? Le Dr Jean-Paul Orth, psychiatre, rappelle que l’on peut souffrir de stress posttrauma­tique sans avoir été une victime directe. (Photo d’archive François Vignola)
Le Dr Jean-Paul Orth, psychiatre, rappelle que l’on peut souffrir de stress posttrauma­tique sans avoir été une victime directe. (Photo d’archive François Vignola)

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