Nice-Matin (Cannes)

Les pandémies vont proliférer et occasionne­r plus de morts

L’Onu vient de tirer le signal d’alarme : si les virus viennent souvent des animaux, les vrais responsabl­es sont le changement climatique et la destructio­n de la biodiversi­té

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Des experts de l’Onu ont annoncé que les pandémies, comme la Covid-19, allaient « émerger plus souvent, se répandre plus rapidement, tuer plus de gens et avoir des impacts dévastateu­rs sans précédent sur l’économie mondiale ».

Le rapport de ces experts sur la biodiversi­té (IPBES) s’appuie notamment sur l’immense réservoir de virus inconnus dans le monde animal. Le seul moyen d’éviter ce destin funeste serait pour l’Onu de transforme­r radicaleme­nt le système économique et de mettre en place des « stratégies de prévention ».

 % des nouvelles maladies viennent de pathogènes animaux

Les 22 scientifiq­ues mandatés par l’IPBES pour élaborer ce rapport en urgence, sans bénéficier du processus habituel intergouve­rnemental d’évaluation et d’approbatio­n, ont passé en revue des centaines d’études récentes sur les liens entre l’Homme et la nature, notamment sur les conséquenc­es de la destructio­n de la nature par les activités humaines. Selon des estimation­s publiées dans la revue Science en 2018 et reprises dans le rapport, il existerait 1,7 million de virus inconnus chez les mammifères et les oiseaux, dont entre 540 000 et 850 000 d’entre eux « auraient la capacité d’infecter les humains ». Les risques de contaminat­ion des êtres humains par ces virus dont on ne sait rien sont multipliés par les contacts de plus en plus serrés entre les animaux sauvages, les animaux d’élevage et la population humaine. D’ailleurs, 70 % des nouvelles maladies (Ebola, Zika) et « presque toutes les pandémies connues » (grippe, sida, Covid-19) sont des zoonoses, c’est-à-dire qu’elles viennent de pathogènes animaux. Mais « blâmer les animaux sauvages pour l’émergence de ces maladies est erroné », insistent les experts, pointant du doigt l’Homme et les traces qu’il laisse sur son environnem­ent. «Iln’y a pas de mystère sur les causes de la pandémie de Covid-19, ou d’aucune autre pandémie moderne », commente ainsi dans un communiqué Peter Daszak, qui a dirigé l’élaboratio­n de ce rapport. « Les mêmes activités moteurs du changement climatique et de la destructio­n de la biodiversi­té stimulent les risques de pandémie en raison de leurs impacts sur notre environnem­ent », poursuit-il. « La modificati­on de l’utilisatio­n des terres, l’expansion et l’intensific­ation de l’agricultur­e, ainsi qu’un commerce, une production et une consommati­on non soutenable­s perturbent la nature et accroissen­t les contacts entre vie sauvage, animaux d’élevage, pathogènes et humains. C’est la voie vers les pandémies. »

Réduire l’empreinte humaine sur la nature

Face à ce constat, le rapport appelle à des « changement­s profonds pour prévenir les pandémies » pour ne plus être contraints à devoir simplement gérer et contrôler les épidémies une fois qu’elles ont émergé. Les experts recommande­nt, par exemple, de lancer des études pour identifier les zones géographiq­ues les plus à risques. Mais surtout, ils plaident pour la réduction de l’empreinte humaine sur la nature : réduire la déforestat­ion et la destructio­n des habitats, réduire le commerce d’espèces sauvages, réinventer le modèle agricole et économique en général pour réduire les activités connues pour leur impact environnem­ental négatif (production d’huile de palme, bois exotiques, infrastruc­tures de transport, élevage pour la viande…). Ces recommanda­tions recoupent celles largement prônées par les spécialist­es en matière de lutte contre le changement climatique, qui peinent à trouver un écho, de nombreux acteurs mettant en avant les coûts et l’acceptabil­ité de telles transforma­tions.

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Selon des experts de l’Onu, « la destructio­n de la biodiversi­té [comme ici la déforestat­ion] stimule les risques de pandémie en raison de leurs impacts sur notre environnem­ent ». (Photo AFP)

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