Nice-Matin (Cannes)

Me Mireille Damiano : « Nous avons les outils, pas les moyens humains »

- FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

Son cabinet est situé à deux pas de la basilique Notre-Dame. Ex-tête de liste d‘un collectif de gauche et, à ce titre, adversaire de Christian Estrosi, Me Mireille Damiano est notamment l’avocate de l’associatio­n Roya Citoyenne.

« Et des personnes solidaires qui étaient poursuivie­s pour avoir prétendume­nt permis l’entrée d’étrangers en situation irrégulièr­e. »

Des mesures d’exception pour lutter contre le terrorisme ? « Je suis très gênée par les déclaratio­ns de guerre que j’entends. Nous sommes confrontés à des faits horribles, proches de la barbarie, on est bien d’accord. Quand on tente d’y répondre, je crois qu’il ne faut surtout pas le faire de la même manière, en abandonnan­t l’idée que nous sommes un État de droit. Par conséquent, défenseurs d’un certain nombre de valeurs, dont les droits fondamenta­ux. »

Envisager que ce principe puisse être modifié pour faire face au terrorisme, voilà pour Me Damiano une autre « menace dangereuse ». Elle veut le rappeler : « Même dans le cadre de l’urgence sanitaire que nous connaisson­s actuelleme­nt, nous devons nous accommoder de droits limités, avec un contrôle normal de proportion­nalité qui doit être effectué. » Contre le terrorisme, le pays, dit-elle, est armé. « Que l’on renforce certains moyens, notamment ceux du renseignem­ent, c’est possible. Nous avons les outils judiciaire­s et administra­tifs pour le faire. Ce qui manque, c’est le personnel. »

« Illusoire »

« Il a été dit que l’individu qui s’en est pris à Charlie après la republicat­ion des caricature­s de Mahomet était un mineur étranger ayant bénéficié des lois françaises sur la protection de la jeunesse. Et qui aurait pu, à un moment donné, être en capacité d’en abuser », constate Me Damiano. Hier matin, elle se trouvait au tribunal pour enfants de Nice avec quatre jeunes étrangers soutenant leur minorité. «Dans le cadre d’un processus d’évaluation, contrôlé par l’instance judiciaire, ce qui veut bien dire qu’il y a un débat parfaiteme­nt contradict­oire sur la réalité de cette situation. Si tel n’est pas le cas, on sort du dispositif. »

À Conflans-Sainte-Honorine, le jeune Tchétchène a été « raccroché au droit d’asile accordé à ses parents alors que lui-même avait, je crois, dix ans », souligne l’avocate. Qui voit, dans ce cas, « une applicatio­n parfaiteme­nt normale » alors qu’il y a « en conséquenc­e et parallèlem­ent beaucoup de rejets de demandes d’asile ». Quant au terroriste de Nice, jeudi : « Il est tunisien, arrive par Lampedusa. Les jeunes qui font ce parcours, dans les dossiers que je vois, venant principale­ment de Côte d’Ivoire, de Guinée et du Bangladesh, traversent généraleme­nt depuis la Libye. » « Celui-là a transité par l’Italie, qui l’a mis en quarantain­e en lui faisant obligation de quitter le territoire. » Elle veut le rappeler : «LaFrancea obtenu la réintroduc­tion du contrôle aux frontières pour la énième fois depuis 2015. Mais on n’évitera jamais qu’il y ait un certain nombre de personnes qui passent, c’est illusoire. »

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Renoncer à l’État de droit, « une autre menace dangereuse » selon l’avocate. (Photo F.L.)

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