Nice-Matin (Cannes)

Un pédiatre : « Je vois plein de bonnes raisons de retourner à l’école »

- FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

Chef du service de pédiatrie à l’hôpital Princesse-Grace de Monaco, le professeur Hervé Haas est catégoriqu­e : il fallait bel et bien retourner à l’école, en respectant évidemment les mesures de distanciat­ion et de masque. « On sait que l’enfant est très peu contaminan­t. Notamment les moins de 11 ans. Audelà, plus on se rapproche de l’adolescenc­e et de l’âge adulte, plus on encourt les mêmes risques. Mais chez les tout-petits, on sait que, s’ils peuvent être porteurs du virus, des circonstan­ces multiples font qu’ils le transmette­nt moins. Cela ne veut pas dire qu’ils ne le transmette­nt pas du tout. »

Le professeur Haas comprend que des enseignant­s puissent craindre de transmettr­e eux-mêmes le virus aux élèves. Fermer les écoles ? « Je pense que ce serait probableme­nt plus délétère, comme on l’avait déjà dit au mois de mai. Oui, les enfants doivent y retourner, pour plein de bonnes raisons. Même si, effectivem­ent, le risque zéro n’existe pas. »

Le masque, moins opportun chez les plus jeunes ? « Tout le monde n’est pas formel sur l’intérêt, et on sait aussi que ce n’est pas si facile, à six ans, de le porter toute une journée. » Mais des effectifs relativeme­nt faibles, ou des petits groupes, sont des aménagemen­ts à considérer.

Vigilance

Le problème, rappelle le pédiatre, c’est qu’il faut intégrer ces mesures dans notre mode de vie au quotidien. La réalité de la menace est bien là : « Si l’on observe la situation dans l’ensemble des hôpitaux, actuelleme­nt, sur les données concernant les lits en réanimatio­n, je n’ai pas le sentiment que les cas soient peu nombreux. Des établissem­ents ont leur réanimatio­n saturée, c’est une certitude. À tel point que l’on a du mal à prendre en post-opératoire des patients hospitalis­és pour des motifs extrêmemen­t importants. Tout simplement parce qu’on n’a plus de lits en réanimatio­n pour les surveiller correcteme­nt. Les chiffres sont là. »

Pas question de baisser la garde, insiste le Pr Haas. « C’est vrai que le sujet est stressant. Rogner sur nos libertés individuel­les, ouvrir la porte aux théories du complot, dire que l’on cherche à nous empêcher de nous exprimer, de bouger… Je pense qu’il faut poser la question à nos collègues qui travaillen­t dans les services de réanimatio­n. Ce sont les mieux placés pour répondre. »

« Freiner le virus »

Le professeur Haas rentre tout juste de Suède où il a observé une situation différente : « Moins de population, moins de densité, et des gens qui, s’ils ne le portent pas dans la rue, portent un masque dès qu’ils arrivent à l’aéroport ou entrent dans un magasin. Ils assument un autre risque. Et, quoi qu’on en dise, le taux de mortalité pour 10 000 habitants y est plus élevé qu’en France. » Ce confinemen­t n’a rien à voir avec celui que nous avons connu en févriermar­s, constate le spécialist­e. « Si les gens ne prennent pas en considérat­ion qu’il faut freiner la progressio­n du virus en se montrant plus raisonnabl­es dans la vie de tous les jours, nous allons vers de gros, gros soucis. C’est certain. »

 ??  ?? « Tout le monde n’est pas formel sur l’intérêt, et on sait aussi que ce n’est pas si facile, à six ans, de le porter toute une journée. » (Photo Eric Ottino)
« Tout le monde n’est pas formel sur l’intérêt, et on sait aussi que ce n’est pas si facile, à six ans, de le porter toute une journée. » (Photo Eric Ottino)

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