Un pédiatre : « Je vois plein de bonnes raisons de retourner à l’école »
Chef du service de pédiatrie à l’hôpital Princesse-Grace de Monaco, le professeur Hervé Haas est catégorique : il fallait bel et bien retourner à l’école, en respectant évidemment les mesures de distanciation et de masque. « On sait que l’enfant est très peu contaminant. Notamment les moins de 11 ans. Audelà, plus on se rapproche de l’adolescence et de l’âge adulte, plus on encourt les mêmes risques. Mais chez les tout-petits, on sait que, s’ils peuvent être porteurs du virus, des circonstances multiples font qu’ils le transmettent moins. Cela ne veut pas dire qu’ils ne le transmettent pas du tout. »
Le professeur Haas comprend que des enseignants puissent craindre de transmettre eux-mêmes le virus aux élèves. Fermer les écoles ? « Je pense que ce serait probablement plus délétère, comme on l’avait déjà dit au mois de mai. Oui, les enfants doivent y retourner, pour plein de bonnes raisons. Même si, effectivement, le risque zéro n’existe pas. »
Le masque, moins opportun chez les plus jeunes ? « Tout le monde n’est pas formel sur l’intérêt, et on sait aussi que ce n’est pas si facile, à six ans, de le porter toute une journée. » Mais des effectifs relativement faibles, ou des petits groupes, sont des aménagements à considérer.
Vigilance
Le problème, rappelle le pédiatre, c’est qu’il faut intégrer ces mesures dans notre mode de vie au quotidien. La réalité de la menace est bien là : « Si l’on observe la situation dans l’ensemble des hôpitaux, actuellement, sur les données concernant les lits en réanimation, je n’ai pas le sentiment que les cas soient peu nombreux. Des établissements ont leur réanimation saturée, c’est une certitude. À tel point que l’on a du mal à prendre en post-opératoire des patients hospitalisés pour des motifs extrêmement importants. Tout simplement parce qu’on n’a plus de lits en réanimation pour les surveiller correctement. Les chiffres sont là. »
Pas question de baisser la garde, insiste le Pr Haas. « C’est vrai que le sujet est stressant. Rogner sur nos libertés individuelles, ouvrir la porte aux théories du complot, dire que l’on cherche à nous empêcher de nous exprimer, de bouger… Je pense qu’il faut poser la question à nos collègues qui travaillent dans les services de réanimation. Ce sont les mieux placés pour répondre. »
« Freiner le virus »
Le professeur Haas rentre tout juste de Suède où il a observé une situation différente : « Moins de population, moins de densité, et des gens qui, s’ils ne le portent pas dans la rue, portent un masque dès qu’ils arrivent à l’aéroport ou entrent dans un magasin. Ils assument un autre risque. Et, quoi qu’on en dise, le taux de mortalité pour 10 000 habitants y est plus élevé qu’en France. » Ce confinement n’a rien à voir avec celui que nous avons connu en févriermars, constate le spécialiste. « Si les gens ne prennent pas en considération qu’il faut freiner la progression du virus en se montrant plus raisonnables dans la vie de tous les jours, nous allons vers de gros, gros soucis. C’est certain. »