Nice-Matin (Cannes)

Mythe errant

- Journalist­e edito@nicematin.fr

Le PS ne fait plus le poids. Il est maigrelet comme l’ortolan que François Mitterrand adorait dévorer avec les doigts. Il paraît que l’oiseau rare se mange d’un coup de dent, avec une serviette sur la tête. Emmanuel Macron n’a pas eu cette délicatess­e quand il a englouti la tête et le corps du parti socialiste. Il l’a fait aux yeux de tous. Et tant pis si ça éclabousse. On ne prend pas le pouvoir sans tacher sa chemise. Depuis, le PS et l’ortolan sont en voie de disparitio­n. Encore deux rafales de vent et ils seront rayés de la carte et du menu. Les apologiste­s de Jaures et Blum, comme les défenseurs du cousin du moineau par la patte gauche, devraient se soulever avant qu’il ne soit trop tard. Le PS est à la rue. Alors qu’il devrait être dans la rue. Il a vendu son siège rue de Solférino et son âme à la découpe. Son patron passe à la télé, parle à la radio, mais il est invisible, inaudible. Olivier Faure a une bonne bouille, mais il ne prend pas la lumière. Il prend des coups. Il les rend avec un pistolet à eau au lieu d’arroser ses détracteur­s à la kalachniko­v. Mitterrand, lui, avait un silencieux au bout du calibre. Un flingueur tonton. Toujours armé. Même pendant les réunions du parti. Au cas où un traître ne sorte la tête du rang. Rocard a fini plusieurs fois aux urgences. À l’époque, on tirait sur tout. Même sur les ambulances. Avouez qu’une passe d’armes Mitterrand­Rocard avait un peu plus de gueule que le futur duel Faure-Temal (ça ne s’invente pas) à l’affiche du congrès de Villeurban­ne midécembre. L’un est candidat à sa succession, l’autre rêve de renverser la table en formica. Ça promet. Les éléphants du PS sont au cimetière ou à la retraite. Ils ont été remplacés par des musaraigne­s. On a les mammifères qu’on mérite. Il y a quarante ans, quand Mitterrand sortait de l’écran, Mauroy prenait toute la place. C’étaient des hommes massifs qui portaient de gros espoirs et d’énormes pardessus. Tout le contraire de Benoît Hamon poids mouche déconfit à la dernière présidenti­elle ou d’Olivier Faure qui tient la ligne et celle du parti. Jadis, les éléphants se réunissaie­nt midi et soir et, après le couscous, ne rentraient pas tous sur la photo. Aujourd’hui, tout le PS pourrait poser sur un timbre-poste. Ils sont maigrichon­s et inconnus. Les autres évitent les objectifs. Les barons (Aubry, Rebsamen, Le Foll) sont aux abonnés absents, la figure (Jospin) continue l’inventaire, l’ancien président (Hollande) a arrêté son régime pour peser à nouveau, la reine (Royal) est égarée sur l’échiquier, le Manuel (Valls) parle comme un livre, les ex (Montebourg, Filippetti) sont éparpillés, l’éminence grise (Dray) décrypte l’actu sur les chaînes d’infos, l’anti-auto (Hidalgo) avance avec le frein à main, la passionari­a (Christiane Taubira) écrit des romans, le porte-voix (Cambadélis) est intéressé mais n’intéresse pas, enfin l’élégant (Cazeneuve) a fermé la porte. Bref, le PS a volé en éclats.

À gauche, il reste Mélenchon ou les Verts. Autant dire que ça ne sent pas la rose.

« Les éléphants ont été remplacés par des musaraigne­s »

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PHILIPPE CAMPS ??
de PHILIPPE CAMPS

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