Dick décrypte la course
Ils ne sont qu’une poignée, comme lui, à avoir pu défier 4 fois l’Everest des mers. Le Niçois, fraîchement retiré de la classe Imoca, livre son sentiment sur cette première semaine
Évoquer le Vendée Globe, et tous ceux qui en ont cimenté la légende, avec Jean-Pierre Dick, c’est un peu comme se plonger dans un océan de nostalgie. Comme humer, face aux éléments si souvent déchaînés, les embruns de souvenirs aussi fortement iodés qu’incroyablement puissants. Mais c’est la possibilité, également, de laisser à sa mémoire la place nécessaire pour border ses voiles intérieures, grâce à ce doux vent du frisson marin.
Ce fut notre cas, à son arrivée quasi triomphale aux Sables-d’Olonne, lors de sa 4e et dernière participation, en 2017. Après qu’il eut réalisé cet exploit sans nom de conserver sa 4e place, en ayant établi au préalable un nouveau temps de référence entre le cap Horn et l’équateur. Mais surtout, en ayant su trouver les ressources pour achever sa circumnavigation après avoir parcouru 2643 milles… sans quille !
Impressionné par Le Cam
Le “gentleman sailor”, comme l’avait surnommé Loick Peyron (avec qui, il a du reste remporté la Barcelona World Race) a donc, évidemment, toute légitimité pour porter un regard éclairé sur cette 9e édition hors normes.
Et de dire, d’abord, toute son admiration pour Jean Le Cam, le doyen (61 ans) de la flotte qui, sur un bateau ancienne génération (sans foils, donc) fait le show depuis 8 jours, dans la descente de l’Atlantique. « Quand je vois ce qu’il est en train de réussir, ça me donnerait presque des regrets, même si je ne renie rien de mes choix… Jean, c’est un puits de science et l’un des derniers Mohicans dans ce milieu. Un personnage incroyable, presque un dinosaure, qui a traversé toutes les époques. Alors oui, son bateau, au près, se comporte bien, mais il a aussi fait preuve d’une certaine sagesse et su maîtriser sa trajectoire… »
Le Cam, un voileux attachant, donc, dont on apprécie aussi toute la faconde. Mais pour autant, le Niçois se veut lucide. A ses yeux, c’est la technologie qui, in fine, devrait faire la différence. Et de pointer, du coup, Alex Thomson comme désormais principal favori pour la victoire finale. « Il est à l’attaque et se débrouille plutôt bien, même si le risque était réel dans le gros temps. En général, il est assez “poissard” quand il faut gagner, mais cette fois, il a pris le contrôle de la flotte assez tôt… Oui, il m’a impressionné, s’est imposé comme le patron. Et puis, avec son bateau, dans les mers du sud, s’il saisit le bon booster au niveau dépression - qui en général se forme devant l’Argentine -, il va logiquement prendre ses distances. Pour l’instant, il n’y a pas encore d’écarts rédhibitoires, mais ça devrait décoller… »
Pensées pour Alexia...
Un scénario évidemment plus que plausible. Ce qui n’empêche pas Jean-Pierre Dick d’avoir, également, une petite pensée pour l’Azuréenne Alexia Barrier, dont l’étrave du 4MyPlanet a récupéré ce « 06 » qu’il a lui même fièrement porté aux quatre coins du globe lorsqu’il militait en Imoca. « Qu’il y ait six femmes, c’est déjà une bonne chose. En plus, ce ne sont que de jolis profils… Et j’espère qu’Alexia pourra, jusqu’au bout, défendre les couleurs de notre département… »
Entre les options tactiques qui se sont dessinées, les coups de baston qu’il a déjà fallu affronter (jusqu’à 6 mètres de creux et des rafales à 60 noeuds, pour certains…), et les avaries toujours possibles : une chose est sûre : la course, elle, ne fait que débuter...
Sur son JP54, le skipper niçois, âgé de 55 ans, sera engagé, le 22 novembre, sur la transat ARC, qui devrait regrouper une cinquantaine d’unités, et dont le départ sera donné des Açores. L’arrivée,elle,sera jugée auxAntilles.