Nice-Matin (Cannes)

Le tunnel est-il condamné ?

La tempête Alex a laissé le col de Tende pulvérisé. Le chaotique chantier semble compromis. L’accès au tunnel historique aussi. L’Italie préconise de percer un autre tube plus bas, jusqu’au hameau de Vievola

- Dossier : Christophe CIRONE ccirone@nicematin.fr

C’est une autre victime collatéral­e de la tempête Alex. Une victime âgée de 138 ans. Elle a résisté à l’usure du temps, aux normes drastiques imposées après l’incendie du tunnel du Mont-Blanc, à la concurrenc­e de son voisin en éternel chantier. Mais le tunnel de Tende pourrait ne pas survivre au 2 octobre 2020. Clairement, cette victime-là n’est pas la priorité des Tendasques. Éprouvés, les villageois renouent tout juste avec l’eau potable, dépendent encore de l’aide alimentair­e et comptent les jours avant le retour du train français, prévu le 18 janvier. « Pour le moment, on n’en est pas là », résume le maire Jean-Pierre Vassallo.

Montagne à terre

Pourtant, le front post-tempête qui se joue plus haut, à 1 300 mètres d’altitude, représente un enjeu décisif pour l’avenir de la vallée. Et ce front-là illustre l’idée du « bombardeme­nt météorolog­ique » subi par la Roya.

Au col de Tende, loin des regards et de tout accès routier par la France, la montagne s’est littéralem­ent effondrée. En témoignent les images aériennes saisies par le Cerema peu après la tempête

(1) (ci-contre). Le tableau se serait encore dégradé depuis.

Conséquenc­e ? Le tunnel historique de Tende et sa doublure, qui devait être livrée en 2024, ne seront pas accessible­s avant des années... S’ils le redevienne­nt un jour. À croire que « le chantier est maudit », acquiesce Massimo Riberi, le maire de Limone (cf chronologi­e en page suivante).

Plan B, ou plutôt C

Amorcé en 2014, stoppé par la justice en 2017, repris en 2020, le chantier du « tunnel bis » devait livrer un tube de 3,2 km assurant le désenclave­ment la Roya. À force de péripéties, l’affaire était déjà mal engagée. Elle apparaît carrément compromise. « À ce stade, le tunnel de Tende est condamné », a reconnu dans

nos colonnes Xavier Pelletier, le préfet délégué à la reconstruc­tion des vallées. La France devait financer 41 % de ce chantier XL ; elle n’a pas dit son dernier mot. Mais l’Italie, qui le pilotait, est prête à tirer une croix dessus. Et à repartir sur un projet tout neuf.. Ou presque. Un projet vieux de quinze ans a refait surface depuis la tempête. Ce tunnel long de cinq kilomètres, à double sens, relierait toujours Tende et Limone. Mais plus bas, entre le hameau de Vievola, au-dessus de Tende et Panice Sottana, côté italien.

Le projet est plébiscité par les maires et collectivi­tés italiennes. Il semble avoir aussi les faveurs de la ministre des Transports Paola De Micheli. Saura-t-il convaincre côté français ? À voir.

Réunion au sommet

L’idée d’en reprendre pour dix ou quinze ans d’études, appels d’offres et travaux a de quoi donner le vertige. À moins que l’Italie, galvanisée par la reconstruc­tion du pont de Gênes en un temps record, ne remette ça. Elle va nommer un commissair­e spécial dédié au tunnel de Tende la semaine prochaine.

Une certitude : la tempête Alex oblige à revoir toute la copie. Et à voir plus loin. L’associatio­n Roya Expansion Nature réclame que la DUP (déclaratio­n d’utilité publique) « du doublement du tunnel de Tende soit définitive­ment annulée pour cause de changement­s de fait majeurs. »

La conférence intergouve­rnementale du 30 novembre s’annonce décisive pour le bon vieux tunnel. Son avenir pourrait être réservé aux piétons et cyclistes. (1) Centre d’études sur les risques, l’environnem­ent, la mobilité et l’aménagemen­t.

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La route emportée par l’effondreme­nt monstrueux, vue de l’entrée du tunnel de Tende.(Photo Massimo Riberi)

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