Nice-Matin (Cannes)

◗ Trente-deux personnes interpellé­es

◗ Ramificati­ons à Valbonne et Mougins

- JEAN-FRANÇOIS ROUBAUD ET ERIC GALLIANO

Un vaste coup de filet a eu lieu, lundi matin très tôt, sur l’ensemble du départemen­t des Alpes-Maritimes, ainsi qu’en Haute-Corse. Trente-deux personnes issues du grand banditisme azuréen, mais aussi incidemmen­t de cercles politiques qui gravitent autour des communes de Menton, Mougins ou encore Valbonne sont entendus depuis quarante-huit heures par les enquêteurs de la PJ de Nice et du GIR (1). L’affaire portant sur des soupçons d’associatio­n de malfaiteur­s, les gardes à vue ont toutes été prolongées hier soir, et les auditions peuvent se poursuivre jusqu’à vendredi.

L’enquête diligentée par la Juridictio­n interrégio­nale spécialisé­e (JIRS) de Marseille porte, aujourd’hui, sur des faits présumés d’extorsion de fonds, blanchimen­t, prise illicite d’intérêts, menaces, jeux clandestin­s et associatio­n de malfaiteur­s en vue de corruption active.

Une entreprise de racket

Elle débute au printemps 2019 à la suite d’écoutes téléphoniq­ues de plusieurs figures du grand banditisme. L’un d’entre eux, Didier Tripodi est étroitemen­t surveillé. Ses agissement­s laissent alors supposer qu’une vaste opération de racket se prépare dans l’est des Alpes-Maritimes, mais aussi du côté de Valbonne et Mougins. Ses cibles seraient nombreuses : des tenanciers de bars, de restaurate­urs, des garagistes ainsi que des commerces de proximité. Didier Tripodi est sans doute la dernière figure historique du milieu niçois. A 67 ans, il a été impliqué dans de nombreuses affaires de trafic de stupéfiant, plusieurs fois condamné, notamment pour des faits de blanchimen­t de l’argent de la drogue. On le soupçonne d’être le propriétai­re occulte de nombreux établissem­ents – bars et commerces – notamment dans le VieuxNice.

Les écoutes révèlent aussi la gestion de cercles de jeux clandestin­s .... Mais incidemmen­t, elles vont surtout contribuer à l’ouverture d’un volet gigogne dans ce dossier déjà tentaculai­re. En effet, le lien entre les figures du grand banditisme azuréen et un restaurate­ur niçois originaire de Menton, Jean-Laurent Comparetto, intrigue les enquêteurs. La compagne de ce dernier, Carole Bacoué, est, il est vrai, en pleine préparatio­n de la campagne des élections municipale­s à Menton. Elle fait partie de la liste d’opposition, conduite par Olivier Bettati.

Olivier Bettati en garde à vue

Avec le soutien du CNIP et du Rassemblem­ent national, l’ancien conseiller général niçois – qui fut jusqu’au bout un fidèle de Jacques Médecin – entend ravir la mairie à Jean-Claude Guibal (LR) qui la dirige depuis trente-cinq ans. Le « bébé

Médecin » a constitué une équipe de campagne de choc. Il a convaincu ainsi Daniel Véran, son ami, ancien chauffeur de Jacques Médecin puis directeur de la police municipale de Nice, de lui apporter son expérience des combats électoraux.

Sauf que l’ancien patron des « municipaux niçois » amène dans ses bagages Didier Tripodi, son ami d’enfance... Ce dernier va donner des coups de main pendant la campagne. En vain. Au terme d’une élection perturbée par la crise sanitaire, il manquera un millier de voix pour s’emparer du siège de Jean-Claude Guibal. Simple histoire d’amitié ? Ou signe d’une étrange porosité entre le monde du grand banditisme et celui de la politique ? C’est la question manifestem­ent que se posent les enquêteurs. Olivier Bettati, conseiller municipal d’opposition, comme Daniel Véran, font partie des trentedeux personnes interpellé­es lundi qui, hier, ont vu leur garde à vue prolongée possibleme­nt jusqu’à son terme maximum de quatre-vingtseize heures.

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(Photo Jean-François Ottonello) L’affaire a des ramificati­ons à Menton mais aussi à Mougins et Valbonne.

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