Nice-Matin (Cannes)

Les raisons de la violence dans ces quartiers cannois

Ces derniers mois à Ranguin et la Frayère, les forces de l’ordre ont régulièrem­ent été prises pour cible. Habitants et jeunes des quartiers, policiers, directeur de MJC… Ils décryptent le phénomène

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La tension est montée d’un cran ces derniers mois dans les quartiers ouest de la ville. À la Frayère comme à Ranguin, les violences urbaines se multiplien­t à grand renfort de tirs de mortiers, jets de pierres sur les forces de l’ordre et véhicules incendiés… Après plusieurs opérations coup de poing et une quinzaine d’interpella­tions, un constat : la plupart sont des mineurs, âgés de 14 à 17 ans. Violences exacerbées depuis le premier confinemen­t et l’enfermemen­t qui va de pair, sentiment de mal-être amplifié par la crise sanitaire et ses nombreuses restrictio­ns ou phénomène ponctuel lié aux contrôles de plus en plus fréquents pour endiguer le trafic de drogue qui gangrène ces cités ?

Les raisons de la colère qui gronde sont multiples. Au moins autant que les points de vue pour tenter d’expliquer cette situation tendue, et les solutions proposées… « Après le premier confinemen­t, il y a eu une recrudesce­nce de violences. C’est un phénomène qui a été constaté partout en France », expose le chef de la police municipale Yves Daros. « Au niveau local, Ranguin et la Frayère ont toujours été des quartiers difficiles. Il y a eu récemment de plus en plus d’opérations de polices municipale et nationale dans ces deux lieux, ça dérange certains individus car on gêne le trafic de stupéfiant­s », résume le patron de la PM qui précise : « Ces violences sont parfois des réactions après un contrôle ou une interpella­tion un peu plus tôt dans la journée. »

« On a mis une grosse pression sur ces quartiers »

« On a mis une grosse pression sur ces quartiers, ils veulent montrer qu’ils sont chez eux », confirme le commissair­e central Christophe

Briez. Concernant le volet violences urbaines, le profil des interpellé­s est quasiment toujours le même : de tout jeunes ados habitant la cité. « Ces mineurs ont un sentiment d’impunité car ils bénéficien­t d’un régime particulie­r », constate le commissair­e.

Peu sont en effet condamnés pour leurs actes et ressortent de garde à vue ou du bureau du juge pour enfant avec un simple rappel à l’ordre.

« Une surenchère des plus jeunes »

Le commandant Michel Hugard, référent des quartiers, analyse : «On n’est pas sur une guerre de territoire pour du trafic de stup, par exemple, mais plutôt dans une surenchère des plus jeunes. C’est une sorte de baptême du feu pour eux. Après un passage au commissari­at ou devant la justice, ils pensent se forger une réputation dans le quartier… Les plus âgés sont beaucoup plus discrets : ils savent que quand ce genre d’incident se produit, on revient en force sur ce qu’ils considèren­t comme leur territoire. »

« Il y a un phénomène de meute » ,reprend le commissair­e Briez, «etun renouvelle­ment des génération­s. Car lorsqu’ils deviennent majeurs, ils savent qu’ils risquent plus gros. Le problème vient aussi du fait qu’il y a une remise en cause de l’autorité. Même les parents prennent parfois fait et cause pour leurs enfants malgré des preuves incontesta­bles. »

Phénomènes cycliques

Malgré une situation tendue, les deux cités « ne sont pas des zones de non droit. Ces phénomènes de violences urbaines sont assez cycliques. Chaque année, lorsqu’on change d’heure, notamment pendant les vacances

« Les mineurs ont un sentiment d’impunité »

de la Toussaint, les caillassag­es de bus sont plus fréquents. » Un phénomène inexpliqué qui est presque devenu une tradition…

Pour endiguer ces incidents, les policiers multiplien­t les enquêtes judiciaire­s et occupent le terrain.

« Recueillir les preuves de leur implicatio­n nécessite des moyens et du temps… Car la charge de la preuve nous incombe. Et on ne lâchera rien. »

Le projet Nouvelle Frayère (lire en page suivante) devrait également aider les forces de l’ordre dans leurs missions.

« La configurat­ion urbaine va être retravaill­ée, actuelleme­nt, il y a beaucoup d’échappatoi­res, la cité est enclavée. Il est important d’associer les services de police au projet de réaménagem­ent, car nos préconisat­ions ne sont parfois pas les mêmes que celles des architecte­s… »

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