L’expert : « C’est le monde à l’envers »
Matthieu Robin est chargé de mission pour les questions bancaires, chez UFC-QUE Choisir. C’est lui qui a décrypté l’étude rendue publique le 22 octobre dernier, révélant qu’un tiers des banques refusaient de rembourser leurs clients victimes de fraudes. Selon lui, à contre-courant de la loi...
30%, c’est un chiffre énorme...
C’est très conséquent, en effet, et en progression par rapport à l’année précédente. Mais si vous demandez à toutes les associations de consommateurs quel est le premier objet de litige qui ressort sur les fraudes bancaires, c’est bien celui-là.
Quel est le problème ?
La réglementation a changé. Avant, l’envoi d’un code par SMS (D-secure) était suffisant pour considérer la transaction comme sécurisée. Or, du fait des risques de détournement de ce code, ce dispositif n’est plus sûr et doit être remplacé par une nouvelle technologie. Les banques accusent le consommateur de négligence alors que ce sont elles qui n’ont pas fait l’effort de se mettre à jour. C’est pour cela que nous sommes intervenus. Pour dire qu’il y a une nouvelle réglementation et que ce droit au remboursement des consommateurs doit être pleinement appliqué.
Quelles sont les banques qui rechignent à rembourser ?
Toutes en général ont des pratiques problématiques en la matière. Vous avez même constaté qu’elles s’efforçaient de dissuader leurs clients de réclamer ces remboursements...
C’est le monde à l’envers. Dans la logique, la banque doit rembourser dès le constat d’un paiement frauduleux ou démontrer que le consommateur a été négligent.
Or, elles érigent tout un tas de contraintes administratives extrêmement longues. C’est d’autant plus grave, que le montant moyen des fraudes s’élève à euros et que nous sommes en période de crise.
Quels sont les principaux cas de fraude qui vous remontent ?
Principalement des victimes de phishing, ces personnes vulnérables et isolées que l’on appelle et à qui on demande de mettre à jour des coordonnées sur Ameli.fr, par exemple, alors que le code secret sert à réaliser un paiement.
L’arnaque aux faux banquiers ?
Ce sont des escroqueries de ce type qui, s’il y avait une double identification, ne serait plus possible.
Vous évoquez aussi la fraude au paiement sans contact. Pour vous, ce moyen de paiement est dangereux ?
Ce qui est certain, c’est qu’il est plus fraudé que le bon vieux paiement avec code secret. Le risque, c’est que ce type de fraude s’accentue, d’autant que l’augmentation du plafond à euros sera maintenue après la crise. Le problème est que le sans contact, on peut l’utiliser plusieurs fois et que faire opposition à sa carte bancaire ne permet pas d’échapper à la fraude : sans code, nul besoin de se connecter au réseau de la banque émettrice.