Ennemis de l’intérieur
On le voyait presque jubiler sous son masque, Casta. Lundi soir, au terme d’une réunion houleuse à l’elysée, le président de groupe LREM a annoncé avec une satisfaction à peine contenue que le fameux article de la loi « sécurité globale » encadrant la diffusion d’images de policiers en intervention serait réécrit. Après une accumulation de maladresses, une belle bronca parlementaire et l’énorme tollé soulevé par les images du producteur tabassé par des policiers à Paris, cette reculade constitue un camouflet cinglant pour Gérald Darmanin. Condamné à manger son chapeau, celui qui refusait jusqu’alors de parler de violences policières a reconnu pour la première fois « des problèmes structurels » au sein de l’institution. Installé à Beauvau il y a cinq mois pour incarner une politique plus sécuritaire et rétablir la confiance avec les forces de l’ordre, l’actuel ministre de l’intérieur est l’antithèse parfaite de son prédécesseur. L’ancien porteparole de Sarkozy versus l’excollaborateur de cabinet des gouvernements Jospin. Le gendre idéal de Tourcoing contre le kéké de Forcalquier. Le rallié de mai et le macroniste de la première heure.
Depuis la passation de pouvoir en juillet, Castaner et
« Cette crise autour des violences policières démontre une nouvelle fois les limites du “en même temps”.»
Darmanin se castagnent à distance en mode chien et chat. Lundi, lors de la conférence de presse commune avec les patrons des groupes Modem et Agir à l’assemblée, le premier a clairement fait part de ses « doutes » concernant l’article . Quelques heures plus tard, face aux députés, le second a rhabillé pour l’hiver son prédécesseur coupable d’avoir « envoyé faire du maintien de l’ordre des policiers dont ce n’était pas le métier » lors de la crise des « gilets jaunes ». Un ministre devant lequel les forces de sécurité avaient même fini par « jeter leurs menottes à terre », ainsi que l’a rappelé perfidement Gérald Darmanin.
Au-delà du combat de coqs entre les deux locataires de Beauvau, cette crise autour des violences policières démontre une nouvelle fois les limites du « en même temps ». Trois ans et demi après son élection, cette marque de fabrique est toujours assumée par un Emmanuel Macron qui refuse de choisir entre ordre et liberté. « Je ne veux pas passer d’un côté ou de l’autre », a-t-il d’ailleurs rappelé lundi. Entre Castaner hier et Darmanin aujourd’hui, ses ministres ne l’aident pas vraiment à trouver le point d’équilibre.