À Tanneron, la colère face aux vols de feuillage d’eucalyptus
Des bandes organisées font un massacre dans les plantations pour approvisionner le marché noir. Les producteurs sont excédés devant un phénomène qui dure depuis des années
Célèbre pour son mimosa, Tanneron est aussi la terre d’épanouissement de diverses variétés d’eucalyptus, utilisées dans les bouquets. Alors qu’on est en pleine récolte, ce feuillage aiguise les appétits de bandes organisées, qui viennent d’italie faire des razzias dans les plantations du Var et de Pégomas ou de Mandelieu dans les Alpesmaritimes.
Les producteurs, déjà fragilisés par la fermeture des fleuristes, sont excédés. En effet, les voleurs agissent à n’importe quelle heure du jour, ou même de la nuit, munis de lampes frontales. Et pour commettre leur forfait rapidement, ils saccagent les cultures, aggravant le préjudice (lire ci-dessous).
De plus en plus tôt dans la saison
« Ils viennent à deux ou trois, ils se font déposer en voiture. Ils partent dans les plantations, coupent n’importe comment et font des tas de branchages. Le véhicule vient les récupérer, ils chargent rapidement et ils s’en vont », explique un producteur. Parfois, ils coupent et repartent, revenant récupérer le lendemain.
« Ce phénomène dure depuis une dizaine d’années et se manifeste de plus en plus tôt dans la saison », relève Roland Lèze, président du syndicat des exploitants agricoles de Tanneron.
Dans le village, tout le monde se connaît, aussi la solidarité fait son effet. Agriculteurs, chasseurs, mimosistes, habitants… Ils veillent, repèrent les véhicules inconnus, préviennent s’ils voient des allersretours suspects, alors que la police municipale multiplie les rondes.
« Tous les résidents sont sur leurs gardes, un peu comme le principe des voisins vigilants. Un dispositif a été mis en place qui permet d’alerter tout le monde et d’interpeller les voleurs », confirme le lieutenant Bruno Nourrissier, commandant la brigade de gendarmerie de Fayence (lire ci-dessous). Mais elle ne suffit pas. « Aujourd’hui, nous sommes épuisés de cette situation et nous craignons un drame humain, ajoute Roland Lèze . Nos exploitations sont extrêmement affaiblies par la crise sanitaire et on se retrouve en concurrence avec notre propre marchandise volée qui revient dans le circuit commercial. »
La profession demande des enquêtes
Si les vols perdurent d’année en année, il en donne deux raisons : « La première, c’est l’absence d’une réponse pénale suffisamment dissuasive. Nous bloquons régulièrement des voleurs récidivistes. La deuxième, c’est l’absence d’une réelle enquête qui remonterait toute la filière jusqu’en Italie où se trouvent les commanditaires, qui exploitent la misère humaine, source de main-d’oeuvre quasi inépuisable. Nous avons pourtant des gendarmes, dans le Var et les Alpes-maritimes, qui ont très bien saisi la gravité de la situation et qui sont motivés pour résoudre le problème mais à qui on ne donne pas les moyens d’enquêter ».
Les exploitants interrogent les pouvoirs publics : « Faut-il attendre un drame humain pour que cela cesse ? »