Nice-Matin (Cannes)

Roselyne, César et Fanny

- de PHILIPPE CAMPS Journalist­e edito@nicematin.fr

Je ne m’en remets pas. Roselyne Bachelot non plus. La ministre de la Culture serait sous antidépres­seur. Aux dernières nouvelles, elle se rendrait à son bureau nue, le corps recouvert d’inscriptio­ns bizarres. Du style Adieu les cons.

Pauvre Roselyne. Elle avait un tout autre style lorsqu’elle écrivait ses chroniques, le dimanche, dans notre journal. Il paraît qu’elle a quitté la cérémonie des César avant la fin. Peut-être même a-t-elle été exfiltrée par le GIGN. L’olympia était devenu trop dangereux pour un représenta­nt de l’état. Une chose est sûre : elle n’est pas repartie à poil. Ses amis du cinéma lui avaient taillé un joli costume. Un manteau en peau d’âme revendicat­rice. Les artistes ont le don de transforme­r une scène en tribune. On se serait cru en fac de lettres quand les étudiants étalent leur conscience politique en bas âge. Certains tombent juste. D’autres parlent faux. Comme dans un mauvais film d’auteur. La France les collection­ne. L’an prochain, j’espère que les restaurant­s et les cinés auront rouvert. Tout mais plus ça. Cette purge nombrilist­e et faussement subversive. Ça m’apprendra à regarder la télé au lieu de lire un bon Simenon. Je n’ai pourtant rien contre l’humour trash. J’aimais Les Nuls.

J’adore les mamans et papa (Marina Foïs, Blanche Gardin, Laurent Lafitte) des textes élucubrés pour l’occasion. Mais trop de blagues scato font merdouille­r une soirée. Les mots bite, couilles et caca peuvent être rafraîchis­sants à l’apéro, mais certaineme­nt pas jusqu’au dessert. J’imagine la tête de Gabin ou celle de Ventura devant le poste. Une autre époque. Quand l’émotion passait par les larmes d’annie Girardot.

« Je ne sais pas si j’ai manqué au cinéma français mais à moi le cinéma français a manqué follement, éperdument, douloureus­ement ». Sublime. Forcément sublime. Comme le discours de l’immense Fanny Ardant rappelant au passage que tous les hommes ne sont pas des violeurs, des sauvages, des agresseurs, des vauriens. Un cours d’éloquence à contre-courant et une leçon de courage à la face des bien-pensants aux petits pieds et des néoféminis­tes en croisade. La révolution­naire c’est elle. Elle qui a une voix à tomber, elle qui ne se couchera jamais, elle qui est une comédienne, une actrice, une star. Elle qui est la magie, le mystère, la fièvre, le feu, l’élégance, le charme, l’amour, l’humour, le glamour, le rêve, le cinéma. Tout ce qui nous a manqué lors de la e nuit des César. Coupez !

« J’imagine la tête de Gabin et de Ventura devant le poste. Une autre époque... »

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