« Jusqu’au Conseil d’etat »
« Chers clients, nous avons eu un léger espoir en apprenant que les coiffeurs resteraient ouverts pendant ce confinement. Les représentants de notre corporation d’esthétique ont été reçus par le gouvernement vendredi matin. Mais la sentence est tombée le soir même et sans appel, nous ne ferons malheureusement pas partie des dernières dérogations : en tant qu’activité non essentielle, nous sommes contraints de fermer au moins 4 semaines...»
Une aberration
Tout est dit. « Activité non essentielle...» C’est là que le bât blesse. Et que la pilule ne passe pas chez les professionnels des instituts, cures minceur, spas, soins des ongles, des sourcils... A Saint-laurent-du-var, avenue du Général-de-gaulle, Julie Otto-loyas, la gérante de l’institut L’élégance pour L est scandalisée : « C’est aberrant, hyper dur à digérer. Non essentiel, OK, mais nous, esthéticiennes ne comprenons pas par rapport aux coiffeurs, qui eux peuvent rester ouverts et à qui nous n’en voulons pas. Nous avons le même Code des entrepreneurs qu’eux. Nous aussi, nous recevons sur rendez-vous, nous ne prenons qu’une cliente à la fois, nous avons investi dans les plexiglas, les gels, les masques, les gants, le matériel jetable... et aujourd’hui, on nous dit de fermer. C’est incohérent et on n’y comprend rien. Le click and collect ? Oui, on pourrait l’envisager, mais ce n’est pas un mascara qui va faire mon chiffre d’affaires ! » Où on ouvre ou on ferme, mais tous ensemble.
C’est ce que pensent et veulent les esthéticiennes.
Une profession déjà impactée
Sur quelle base décrète-t-on un confinement à deux vitesses ? « Aucun argument ne plaide en faveur de la fermeture de nos cabinets. » Et la décision vient après des couches de contrariétés : deux confinements, un couvre-feu à 18 heures « catastrophique pour nous », poursuit la Laurentine. Et là, de nouveau rideau baissé, alors que d’autres poursuivent leurs activités : les coiffeurs, certes, mais aussi les cordonniers, les disquaires... Où est l’essentiel, l’indispensable ? D’autant plus que le premier confinement, décidé en mars dernier, avait eu un avantage, dont on aurait pu à nouveau tenir compte : celui de revaloriser la profession. « On s’est rendu compte de notre utilité, commente Julie. En mai 2020, lors de la réouverture, on a eu le sentiment de correspondre à un réel besoin pour nos clients avec en plus, la création d’un lien social et de plaisir. Cela aussi c’est important pour le moral des gens. Au même titre qu’une couleur. »
Deux confinements, un couvre-feu qui a ravi % du chiffre d’affaires, gestes barrières complets dont minutes pour désinfecter après chaque passage. « On était déjà à l’os, mais là, je suis abasourdie », résume vertement Régine Ferrère, présidente de la CNEP, Confédération nationale de l’esthétique et de la parfumerie, représentant la totalité de la filière instituts, spas... Soit entreprises et salariés, dont sur la seule partie instituts, soins des ongles, bronzage, etc.
Jeudi soir, tout le monde devait fermer. Or,
« le vendredi, on annonce l’ouverture des salons de coiffures. Alors nous, on est commerce non essentiel ? Là, c’est juste la goutte qui fait déborder le vase ». Régine Ferrère tient à mettre les choses au point : « Nous sommes avec les coiffeurs. Nous avons la même commission paritaire consultative pour les soins à la personne, pour la création des diplômes... Les deux professions se consacrent à l’embellissement de la personne. D’où notre incompréhension sur ce pseudo-confinement : il n’y a aucun critère, aucune explication. On a investi dans du matériel, on ne travaille que sur rendezvous, on travaille avec des clients corrects. » Une visio conférence a permis à la profession d’exposer ses griefs et doléances à Alain Griset, ministre délégué aux PME. Résultat ?
« On va dire qu’il a entendu nos arguments, que nous avons doublés en copie à Bruno Le Maire, ministre de l’economie. Nous allons poursuivre notre pression médiatique et nous sommes tous mobilisés pour aller jusqu’au Conseil d’etat. Il faut comprendre qu’on va vivre avec ce virus encore très longtemps et qu’il ne faut pas mourir de peur chaque fois qu’il connaît une résurgence. »