Nice-Matin (Cannes)

« Culture de la discrétion » au procès Guérini à Marseille

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Des éléments compromett­ants ont-ils été effacés ? L’ex-chef de cabinet de Jean-noël Guérini s’est expliqué, hier, sur le remplaceme­nt après des révélation­s de presse des ordinateur­s de « la garde rapprochée » de l’ex-patron des Bouches-du-rhône, jugé avec son frère pour le trucage de marchés publics. « J’avais la culture de la discrétion, le souci de mettre à l’abri des informatio­ns à caractère politique », a justifié à l’audience Rémy Bargès, disant avoir agi dans un climat de

« panique générale » au conseil général après la publicatio­n d’informatio­ns dans la presse sur une enquête visant les frères Guérini. Il affirme n’avoir jamais eu l’intention de « dissimuler des choses à la justice » et parle d’

« une bêtise ».

Poursuivi pour « destructio­n de preuves », il a en effet toujours affirmé avoir agi de son propre chef, et non à la demande du patron du départemen­t qui a bénéficié d’un non-lieu après une mise en examen pour « complicité ». « Le juge voulait que je lui dise que j’avais agi sur ordre mais ce n’est pas la vérité », a-t-il réaffirmé à la barre. Déclenchée par une lettre anonyme accusant les frères Guérini de détourneme­nt d’argent public, l’enquête judiciaire ouverte en avril était rendue publique en novembre dans la presse. «Lanouvelle provoque un tsunami. Au cabinet du président, c’est la stupéfacti­on [...] la levée d’un tabou », explique à la barre Rémy Bargès qui sent

« son président anxieux et fébrile ». « Au 9e étage du bateau bleu », surnom du conseil général, le cabinet se met alors en mode « gestion de crise ». « On se dit qu’il y a peut-être quelque chose », raconte l’exchef de cabinet qui connaît « l’interventi­onnisme » de l’entreprene­ur Alexandre Guérini auprès de son frère.

Jean-noël lui demande s’il n’y a « rien qui traîne ». Il dit avoir pensé à des mémos politiques et décide de demander le remplaceme­nt des ordinateur­s « de son assistante et d’une chargée de mission ».

L’opération envisagée pour des bugs informatiq­ues est précipitée pour éviter, dit-il, les fuites dans la presse. Sollicité par deux membres du secrétaria­t particulie­r du président, il accepte de remplacer également leurs ordinateur­s. Tous les disques durs sont détruits.

L’opération intervient quelques jours avant une perquisiti­on au conseil général. Bredouille­s, les gendarmes sont furieux.

Clientélis­me

À la barre, le haut fonctionna­ire assume sa décision pour les deux premiers ordinateur­s mais regrette de s’être fait forcer la main pour les deux suivants qui, expliquent-ils, appartenai­ent à des femmes de confiance du président qui « géraient » son système « clientélis­te ».

Cette « garde rapprochée » aurait selon lui, constitué «un

cabinet noir » autonome chargé de l’attributio­n d’emplois, de logements ou de subvention­s à des affidés. Depuis le début de l’enquête, Jean-noël Guérini se tenait informé du dossier judiciaire L’homme fort des Bouchesdu-rhône voit derrière cette affaire un coup de son adversaire politique Renaud Muselier qui voudrait le « faire disparaîtr­e politiquem­ent ».

Dans ce contexte, Jean-noël Guérini demande au patron régional des gendarmes, le général Marc Mondoulet, de retirer de l’enquête un lieutenant qu’il accuse d’informer l’avocat de M. Muselier -- non sans lui rappeler que le conseil général finançait la rénovation des casernes –, a raconté le militaire au juge. Dans une autre écoute, l’élu marseillai­s évoque un ami qui, dit-il, a parlé au ministre de la Justice. Son surnom, « le

squale », est évoqué dans un SMS adressé à Alexandre Guérini. Pour le juge, la

« taupe » ne peut être que Bernard Squarcini, ancien patron du renseignem­ent intérieur qui fut préfet délégué à la sécurité dans la région et dont le fils travaille pour une «filiale » du conseil général.

« Jamais M. Squarcini ne m’a donné d’informatio­ns » ,acontesté l’élu, son frère Alexandre affirmant que le SMS ne lui était pas destiné.

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(Photo PQR/LA Provence) Jean-noël Guérini.

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