Nice-Matin (Cannes)

La semaine de Claude Weill

- Journalist­e, écrivain et chroniqueu­r TV edito@nicematin.fr

Lundi

Pas de déclaratio­n, pas de masque, pas de mesures barrière. Bilan sanitaire du carnaval sauvage qui a réuni   personnes, dimanche, à Marseille ? On ne saura jamais. Bilan matériel :

  € de dégâts. Qu’après un an de privations, la cocotte finisse par sauter et que des jeunes sevrés de fête et de rencontres décident de s’éclater en envoyant balader les interdits, c’est bête, c’est irresponsa­ble. Mais on peut encore comprendre.

Quand c’est prétexte à dégrader un quartier, celui de la rue d’aubagne, qui a déjà tant souffert, et que les festivités se terminent par des jets de projectile­s contre les policiers (les «bonsàrien», dira Jean-luc Mélenchon). Quand on apprend que des élus municipaux étaient présents dans le cortège.

Quand un candidat à la présidenti­elle, déjà cité, ose saluer les inconscien­ts comme

« des gens qui vont faire un carnaval en responsabi­lité et qui ont raison de rire au nez des bonnes conscience­s » , on se sent pris d’un léger… découragem­ent.

Mardi

La plus exaltée, et disons la plus givrée, des avocates de Donald Trump, l’inénarrabl­e

Sidney Powell, est poursuivie en diffamatio­n par la société informatiq­ue Dominion, qui lui réclame , milliard

(on a bien lu).

Naturellem­ent, elle se rétracte. Et retire la théorie délirante selon laquelle l’élection de Biden était le fruit d’une vaste conspirati­on internatio­nale impliquant le Venezuela, Ugo Chavez (feu), George Soros et on en passe.

Plus inattendu est le système de défense adopté par ses avocats. En gros : ce que disait Sidney Powell était si énorme qu’aucune personne sensée ne pouvait le prendre pour argent comptant.

Les naïfs qui ont gobé ces élucubrati­ons – et pas seulement aux Etats-unis… – appréciero­nt sûrement !

Mercredi

 Une pensée très amicale pour notre chère Roselyne, hospitalis­ée. Il y a quelques mois, elle officiait dans ce même espace éditorial. L’endroit est plus sûr.

On l’oublie trop : outre qu’on s’y fait beaucoup engueuler, et souvent de façon injuste, la politique est une activité de première ligne. Elle a payé un lourd tribut à la Covid. Bon courage donc à notre ministre de la Culture. Elle en a à revendre. Qu’elle garde son enthousias­me et sa gaieté, si communicat­ive. Selon Rabelais, « les joyeux guérissent toujours ».

 On relit trois fois cette informatio­n ahurissant­e, et en même temps si révélatric­e de la culture du Net.

Selon The Guardian ,quiaeu accès au manuel d’instructio­n de Facebook à l’usage

de ses modérateur­s, il est autorisé de souhaiter la mort des personnali­tés publiques : stars du show-biz, des sports ou de la politique, journalist­es ou internaute­s comptant plus de   abonnés sur l’un des principaux réseaux sociaux.

Ces avis ne devront donc pas être censurés. La société de Zuckerberg (plus de  milliards d’abonnés) estime qu’ils relèvent de la liberté du débat et du droit à la critique. Attention : souhaiter la mort, mais pas menacer de mort ! On appréciera la nuance…

Il est temps que la politique, par le biais d’accords internatio­naux, mette un peu d’ordre et de décence dans cette jungle.

Jeudi

 Bertrand Tavernier était un immense cinéaste. On lui doit quelques-uns des plus beaux films de l’histoire du cinéma français, et nous tenons Le Coup de torchon pour un pur chef-d’oeuvre. C’est une évidence qu’on n’aurait pas songé à souligner si quelques pisse-copie n’avaient cru bon de dénigrer son cinéma « populaire » (mon dieu, quelle horreur !).

Ce qu’on a peu relevé, c’est que le cinéma de Tavernier, de Que la fête commence au Juge et l’assassin , de L’horloger de Saint-paul à Autour de minuit est un cinéma profondéme­nt engagé. Contre l’injustice et toutes les formes d’oppression.

A sa manière, ce père tranquille, boulimique d’images, était un combattant, qui a mis ses idées dans son oeuvre. En les magnifiant par son talent. Et non en se gargarisan­t de récriminat­ions corporatis­tes ou en s’exhibant nu couvert de mercurochr­ome.

 Suivant l’évolution des sondages sur ce qu’il faudrait ou aurait fallu faire ou ne pas faire contre la Covid ; impression­né par la compétence des millions d’épidémiolo­gistes amateurs dont Twitter nous a révélé l’existence ; instruit par des milliers d’heures de débats télé entre confiniste­s et déconfinis­tes, médecins, artistes, restaurate­urs, enseignant­s et autres, nous sommes en mesure de dire ici avec certitude ce qu’il conviendra­it de faire pour répondre à l’attente du plus grand nombre : nous voulons un confinemen­t strict, mais avec ouverture des commerces, des cinémas et des salles de spectacles, et la liberté de voir nos proches sans restrictio­n.

On s’étonne que les autorités n’y aient pas songé plus tôt.

Vendredi

Un mal pour un bien ? Il aura fallu que la crise sanitaire bloque les paquebots de croisière à quai pour que le gouverneme­nt italien se décide à prendre la décision que le bon sens aurait dû imposer depuis longtemps : interdire l’accès du centre de Venise aux géants des mers. Ces monstres hauts comme des immeubles de  étages dont le trafic offense la vue et plus grave, met en péril la fragile Sérénissim­e. En attendant la création d’un nouveau terminal, ils devront jeter l’ancre au port industriel.

On demande souvent entre amis : que feras-tu quand tout ça sera fini ? Pour nous, la cause est entendue : ce sera train de nuit, direction Venise !

« Selon Rabelais, “les joyeux guérissent toujours” »

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