Réanimation : que font les cliniques privées ?
Alors que le pic de la deuxième vague est dépassé, beaucoup s’interrogent sur la mobilisation de l’hospitalisation privée. Elle répond qu’elle fait tout ce qu’elle peut, dans la mesure de ses moyens.
L’urgence sanitaire, économique, sociale et psychologique commande de donner plus de tonicité au système médical, en associant par exemple les cliniques privées à l’accueil de patients en réanimation. Elles pourraient en recevoir au moins 2 000 dans l’hexagone. » Dans une tribune publiée le 19 mars dernier dans nos colonnes, le président du département des Alpes-maritimes, Charles Ange Ginésy appelle le secteur privé à soutenir l’hôpital public en absorbant une partie du flux de patients relevant de la réanimation. Ça semble frappé au coin du bon sens, dans cette période d’extrême tension sur les services de réanimation.
Pas de réanimation dans les cliniques privées
C’est en réalité bien plus complexe qu’il n’y paraît. Il y a d’abord les faits : aucune des cliniques privées du département des Alpesmaritimes ne dispose de service de réanimation.
Une situation unique en France, que certains acteurs du secteur, à l’instar de la clinique Saintgeorge disent regretter : « Antérieurement à la crise, nous avions demandé l’ouverture de 8 lits de réanimation, capables d’accueillir les patients en postopératoires de chirurgies lourdes, carcinologiques en particulier. Sans succès à ce jour. Pourtant, on se rend bien compte, dans le contexte d’urgence sanitaire, que le besoin de plus de lits de réa est réel. Si on regarde la situation dans les Bouches-durhône, où coexistent des réanimations publiques et privées, on s’aperçoit que ça fonctionne très bien », regrette Sylvain Lambert, directeur général adjoint groupe privé Kantys, propriétaire de cette clinique.
Deux établissements privés font figure d’exception dans les A.-M. mais elles ont un statut particulier : celui d’établissement privé à but non lucratif (Établissement de Santé Privé d’intérêt Collectif ou ESPIC).
Il s’agit de l’institut Arnaulttzanck de cardiologie médicochirurgicale à Saint-laurent-duvar et de l’hôpital privé gériatrique Les Sources à Nice, qui disposent respectivement de 19 et 8 lits de réanimation (et aussi de 42 lits d’unité de surveillance continue pour ce qui concerne Tzanck).
L’essentiel des lits de réanimation lourde du département se trouve ainsi dans les hôpitaux publics : le CHU de Nice (61 lits répartis entre Pasteur 2, l’archet 1 et l’archet 2) et les hôpitaux généraux de Cannes (16 lits), Grasse (12 lits) et Antibes (16 lits).
Des lits majoritairement occupés par des malades atteints de formes très sévères de la Covid-19. Aujourd’hui, 29 mars, leur taux d’occupation frôle les 100 %.
Que se passe-t-il dans le même temps dans les cliniques privées du département ? Leur nombre est important et leur place dans l’offre de soins prépondérante, autant à l’est qu’à l’ouest du département : citons les cliniques Saintgeorge et Saint-antoine (groupe Kantys), la clinique du Parc Impérial à Nice, la polyclinique Saintjean à Cagnes-sur-mer, la clinique Oxford à Cannes, l’hôpital privé Arnault-tzanck à Mougins et enfin la clinique du Palais à Cannes.
Forte participation à l’hospitalisation conventionnelle
Ces cliniques privées assistentelles bras ballant à la submersion des hôpitaux publics ? Certainement pas. Toutes, plus ou moins précocement dans la crise, ont dédié nombre de leurs lits de médecine à l’accueil de malades de la Covid-19. Certaines, à l’instar de
Saint-george, qui possède une unité de surveillance continue (lire Savoir +), ont même été sollicitées pour requalifier ces lits en lits de réanimation. Ce qu’ils ont fait. Si la plupart des lits mis à disposition par le privé sont restés vides pendant la première vague (le flux relativement modéré au cours de la première vague a été géré par l’hôpital public), la situation a bien changé depuis.
Le privé participe en grande partie à l’hospitalisation dite conventionnelle (hors soins critiques) des malades de la Covid-19. Certaines cliniques voient même plus de 50 % de leurs lits de médecine occupés par ces patients. Et beaucoup (Tzanck Mougins et Saintlaurent, Saint-george, Saint-jean) ont même ouvert des lits dédiés à l’oxygénation haut débit de patients Covid. S’il est difficile d’obtenir des chiffres précis concernant les déprogrammations d’activités que ces ouvertures de lits ont nécessité, comme l’hôpital public, le privé a dû lui aussi consentir d’importants efforts. Pour ouvrir ces lits, il est nécessaire en effet d’avoir du personnel et en nombre.
Et pour tous les établissements de santé, une seule solution : aller le prendre ailleurs, dans d’autres services. Ce qui mathématiquement contraint à fermer d’autres lits, et à déprogrammer des activités. Parmi le personnel le plus précieux, les infirmières anesthésistes dont les compétences sont très recherchées depuis l’arrivée de l’épidémie en France.
Une unité de surveillance continue est un service destiné à prendre en charge des malades nécessitant une surveillance rapprochée. Ces unités constituent un niveau intermédiaire entre la réanimation et les services de soins classiques.