Un MOF étoilé cuisine pour les Ehpad
Depuis 2018, le Meilleur Ouvrier de France Jacques Maximin forme les cuisiniers des Ehpad Senectis depuis Antibes. Objectif : proposer une nouvelle façon d’appréhender la restauration collective.
Le fouet résonne contre la casserole. Geste vif. Autour du feu, les vestes noires et blanches se côtoient. Parmi elles, un col bleu-blanc-rouge se détache. « Maintenant on va passer à l’étape suivante », indique Jacques Maximin à sa brigade pas comme les autres. Puisque, ici, le Meilleur Ouvrier de France 1979 n’oeuvre pas dans les cuisines des étoilés qu’il connaît si bien. Mais dans un… établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).
Depuis 2018, l’ancien chef mythique du Chantecler encadre des sessions de formation pour le personnel des établissements du groupe Senectis.
« Le challenge, c’est de leur montrer ce qu’il est possible de faire avec les ingrédients qu’ils utilisent au quotidien. Ici, on fait avec du frais », explique la légende des fourneaux en pleine préparation aux Jardins de Saint-paul, avenue Jean-michardpélissier à Antibes. À ses côtés, son ancien second à Vence : Laurent Poulet. Un tandem bien ficelé.
Un plaisir qui ne doit pas connaître d’obstacle
« Le chef crée. De mon côté, j’établis les fiches techniques sur-mesure pour les équipes. » Un travail rigoureux, mettant en exergue les ingrédients – dans l’ordre d’apparition au générique –, leur quantité et les étapes à réaliser. Pas à pas. Le tout, agrémenté de photographies afin que la méthode pédagogique soit on ne peut plus lisible : « Après l’écriture de la fiche en relecture, on fixe les choses pour livrer une version finale. »
Le goût. Primordial. Parce qu’il fait le lien, comme le souligne Christophe Bro, chef des cuisines antiboises : « Ce que les résidents apprécient particulièrement, ce sont les plats traditionnels. » Des recettes qui font appel aux souvenirs. Des repères gustatifs, des marqueurs sensoriels. Un plaisir qui ne doit connaître aucun obstacle. « Certains de nos résidents ont des problèmes de déglutition, on doit leur proposer des textures mixées ou hachées », indique Johanna Bensadoun, gérante des lieux, ravie de voir le soin apporté au visuel des assiettes : « Chez nous, vous n’avez pas une assiette de purée versée avec une louche. Les plats sont confectionnés avec une véritable présentation. » En témoignent la délicatesse et la précision dont fait preuve Jacques Maximin en dressant l’entrée. Asperges sauce maltaise, jambon cru, copeaux de parmesan, oeuf mollet et salade. Du relief, de la découpe, de la couleur.
repas au quotidien depuis Antibes
Autour des marmites, l’ambiance s’avère studieuse. Depuis 8 heures du matin, les élèves du jour planchent sur un nouveau menu qu’ils déclineront, par la suite, dans leurs établissements respectifs. Riz au lait avec fraises au dessert et suprême de volaille avec risotto de potiron. Bref, personne n’a le temps de croiser les bras, les manches restent remontées.
« Au-delà de leur donner des méthodes, il est aussi question de tour de main », affirme Laurent Poulet dont l’expérience étanche la soif de connaissance de ces passionnés qui doivent marier ces astuces et savoir-faire avec la réalité de la restauration collective.
Un défi de taille. Qui plus est, lorsqu’il s’agit de servir des personnes âgées dépendantes.
« Par cette collaboration, nous luttons également contre la perte d’appétit, l’alimentation étant un enjeu phare », relève la responsable qui voit ses brigades motivées. Et il le faut ! Puisque c’est en binôme que les toqués doivent titiller les papilles des seniors chaque jour.
« Comme nous remplissons le rôle de cuisine centrale pour notre établissement de La Gaude, nous avons 140 repas à préparer au quotidien, ici, à Antibes », précise Christophe Bro qui ne boude pas son plaisir lorsqu’il s’agit de partager un moment de cuisine avec des chefs de cette trempe.
Des hommes qui portent les valeurs de leur profession, perdurant par une tâche des plus vitales : la transmission.