Nice-Matin (Cannes)

Au théâtre ce soir... l’espoir et l’attente des comédiens

Ils ont pour habitude d’arpenter les planches de la cité mais également ailleurs. Comédiens, auteurs, interprète­s : comment vivent-ils cet éloignemen­t de la scène en cette crise sanitaire ?

- MARGOT DASQUE mdasque@nicematin.fr

Les théâtres sont occupés. Les comédiens ? Bien moins… En cette période où le secteur de la culture s’époumone en espérant se sentir enfin entendu, que deviennent les créateurs locaux ? À en croire Amin Dridi, l’inspiratio­n n’est pas réduite au silence : « En ces temps de disette scénique, il faut se plonger dans de nouveaux projets. »

La preuve par l’exemple puisque l’artiste antibois habitué du théâtre Le Tribunal écrit un nouveau spectacle en compagnie de sa moitié, Mélodie Choir : « Cela nous permettra d’avoir quelque chose à présenter à la réouvertur­e des scènes. Nous avons déjà une date pour décembre. »

Se projeter.

Acte indispensa­ble pour exister.

Prévoir malgré tout

«Fin mars 2020, je devais jouer au Théâtre de Poche Montparnas­se à

Paris, j’avais plusieurs dates ailleurs… Bon il faut le digérer. Mais surtout ne pas rester dans une forme d’isolement face à ça », soutient Tony Lourenço. Du côté de la troupe des Actors Studieux, oeuvrant sur les planches d’antibéa, le travail continue comme l’explique Antoine Flament : « On a fait des répétition­s en visio. Mais au bout d’un moment on reste limité, on a besoin de se voir physiqueme­nt et ce n’est pas facile en ce moment. Tout est en suspens. » Et pourtant, il faut être parés à toute éventualit­é : « On est dans de la suppositio­n. Ce qui n’est pas évident puisque la création théâtrale demande de prévoir. » Cette situation hors normes a-telle poussé certains à interroger leur engagement dans le monde de l’art vivant ? « Petit à petit tous les projets se sont arrêtés. Je comptais devenir intermitte­nt du spectacle en 2020. En attendant j’opère une reconversi­on profession­nelle dans le digital marketing qui me sera toujours utile plus tard. En attendant un mieux, j’écris », indique Jérémie Mériaux, lui aussi habitué du théâtre de la place Nationale. « Malheureus­ement, il y a de nombreux talents que nous ne connaîtron­s jamais », regrette Tony Lourenço qui sait déjà qu’il appréhende­ra différemme­nt son seul en scène Gilbert puisque désormais certaines phrases de 2019 trouvent un nouvel écho en 2021.

Repenser la scène

« Non, on n’a jamais eu l’idée d’abandonner la troupe », affirme Antoine Flament qui assure : « On jouera. Différemme­nt sûrement. Mais on jouera. »

De la nécessité de penser le plateau autrement. « Il y a de nombreuses choses possibles », relève le comédien en précisant : « Notamment concernant le jeune public, on peut penser des spectacles dans de nouvelles conditions. Mais cela se réfléchit, remet en question des choses. » De nouveaux formats à explorer. Comme les représenta­tions en visio qu’a pu expériment­er Jérémie Mériaux grâce au Cannes Comedy Club des Humoristes de Cannes : « Ça fait plaisir de pouvoir remonter sur scène. Sans public, avec les gestes barrières, mais c’est déjà beaucoup à l’heure actuelle. »

« Il faut tenir »

Vers une reprise ? Si Jérémie Mériaux s’interroge quant à l’impact que pourrait avoir la contaminat­ion de la ministre de la Culture par la Covid-19 sur ses positions futures, la majorité de ses confrères affichent une position optimiste. « L’attente du public reste très encouragea­nte. Cela nous montre que le théâtre est peut-être plus essentiel que ce que l’on peut dire », souligne Antoine Flament également rejoint par Amin Dridi : « Les gens ont besoin de retrouver un lieu où il est possible d’oublier un peu le quotidien durant une heure. Ce lien avec le public nous manque. »

Certains voient dans le mois de septembre un possible retour des spectateur­s dans les fauteuils. Un retour qui peu à peu prend forme à entendre Tony Lourenço, tout sourire : « J’ai eu une super surprise. Le directeur d’un théâtre de Bordeaux m’a contacté pour me programmer en 2022. »

Le genre de nouvelles qui fait du bien. « Il faut tenir », poursuit l’auteur et interprète : « Il faut tenir bon. Mettre ce temps à profit pour être prolixe, transforme­r cette période. J’ai cette image de boxeur dans les cordes qui doit aller puiser au fond de lui pour se relever après avoir encaissé des coups. C’est là où l’on peut se révéler. » Tremplin.

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(Photo Eric Ottino) « Bientôt... » : comme l’affiche le théâtre Anthéa, comédiens et spectateur­s attendent avec impatience le grand retour en salle.

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