Elle décède après opération : la famille accable l’hôpital
Opérée à Cannes, Tita Ficara, 78 ans, a succombé à une septicémie. Y a-t-il eu négligence, erreur médicale voire maltraitance ? Une enquête pour homicide involontaire est en cours.
Elle ne peut fixer le portrait de sa mère, sans déverser un torrent de larmes. Pour Patricia Ficara-hnzido, impossible de soutenir le regard souriant et tourné vers l’avenir de Tita, décédée le 1er septembre dernier à l’hôpital de Cannes.
Bien sûr, il y a la douleur inévitable du deuil. Le chagrin incompressible après la perte d’un être cher. Mais la désolation de Patricia prend sa source au-delà. Dans une sorte de colère, mêlée d’incompréhension.
« Maman n’aurait jamais dû partir comme ça, surtout pas dans ces conditions, estime-t-elle. Ma mère était une battante. Atteinte de polio dès toute petite, elle avait des difficultés pour marcher mais avait surmonté son handicap, jusqu’à devenir le pilier de notre famille. Elle venait encore de vaincre la maladie, après deux ans de traitement pour un cancer de l’utérus. Mais là… »
Des souffrances dans l’indifférence ?
Le 20 juin 2020, lorsque la dame âgée de 78 ans est admise au service chirurgical de l’hôpital de Cannes, il s’agit pourtant de prolonger cette existence exemplaire. « Au départ, elle ne voulait pas se faire opérer, mais le docteur a insisté pour l’opérer. Il lui a dit : enlevez les polypes, et vous vivrez vingt ans de plus ! »
Tout semble bien se dérouler, malgré la délicatesse d’une intervention viscérale sur un tel profil de patiente. « L’opération s’est bien passée, nous a affirmé le docteur ». Tita Ficara est placée huit jours en observation. Au sixième, le praticien estime que l’état de santé de sa patiente ne présente aucune inquiétude. Il s’autorise donc à partir en congé.
C’est en son absence que la situation va dégénérer.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, Tita ressent de très vives douleurs au ventre.
« Ma mère s’est mise à vomir du vert. Elle n’allait pas bien. Mais à chaque fois que j’alertais un infirmier, on nous répondait : C’est normal, et on ne lui administrait que du Spasfon, se souvient Patricia, qui se relayait avec sa soeur pour dormir à l’hôpital, au chevet de leur mère. Dans les couloirs, certains soignants soupiraient, la surnommaient Madame pipi-caca .À force, maman n’osait même plus se plaindre...»
Malgré ses souffrances persistantes, la patiente doit libérer son lit comme prévu, le vendredi.
« On ne lui a pas mesuré la température le matin, ni prise de sang. On lui a juste apposé une ceinture sur le ventre pour sa cicatrice, et elle a hurlé de douleur », affirme Patricia.
Une fissure à la cicatrice qui va s’avérer fatale
Le retour à domicile de Tita s’avère catastrophique. La convalescence supposée vire au cauchemar.
« À minuit à la maison, les douleurs étaient telles, que nous avons dû nous rendre aux urgences ». Un scanner révèle une fissure au niveau de la cicatrice. L’analyse du sang, une septicémie. Retour au bloc opératoire, descente aux enfers.
Tita Ficara est décédée le 1er septembre à 23 h, en salle de réanimation.
Erreur médicale ? Négligence ? Maltraitance ? Ou bien simple difficulté à faire réellement son deuil ?
Ce sera à l’enquête de police de le déterminer. Peut-être au prix d’expertises plus poussées, car une plainte pour homicide involontaire a été enregistrée par la brigade criminelle de Cannes. L’hôpital se défend de toute faute (lire ci-dessous).
Quoi qu’il en soit, la disparition de Tita Ficara laisse une famille dévastée. « Mes deux soeurs sont en dépression et mon père est sous le choc, il est en train de se laisser mourir, je dois désormais m’en occuper, soupire Patricia, entre deux sanglots. Quant à mon fils, il a dû faire comme si pour fêter son onzième anniversaire. Sans sa grandmère adorée… »