14-Juillet : un complice arrêté en Italie
Installés depuis quatre ans à la ferme des Jovents, à St-martin-de-pallières, Camille et Rudy Michel produisent des glaces artisanales d’une qualité rare.
Là-haut. En pleine nature sauvage. Coupée d’une vie surexcitée. À la sortie de Saint-martin-de-pallières. Frontière invisible avec les Alpes-de-haute-provence. Mais encore accrochée à la roche varoise. Se dessine un autre tableau. Qui n’est pas sans rappeler la petite maison dans la prairie. Celle de notre enfance...
Là-haut. S’organise un monde où la nature est une alliée. Une belle à épouser. Malgré ses coups de gueule hivernaux. Ses siestes estivales. Sous la couette caniculaire. Un monde que Rudy et Camille Michel ont choisi, il y a quatre ans, de parcourir. Sans en faire le tour à bord des oiseaux de fer. Après avoir bourlingué ses bottes crottées sur la planète France, le jeune couple a bâti ici son Eden. Non sans en baver. Travaillant, à l’aube de leur rêve, jusqu’à 22 heures par jour. Sans jamais se plaindre. Sans regretter le choix de
cette voie agricole. Si peu reconnue. « On a eu un coup de coeur pour cet endroit. Il appartenait à l’origine à un berger. Quand on l’a découvert, ça a été une évidence » raconte Rudy. Fallait-il encore concrétiser leur projet d’installation. Ne pas se tromper sur sa destination. Et, comme souvent, madame a eu le dernier mot. « Moi, je voulais un élevage de chèvres. J’ai dû batailler car il trouvait ça trop contraignant... »
Sauf qu’au contact de la biquette, le ronchon a craqué. Si bien que l’élevage de leur ferme des Jovents en compte aujourd’hui 69. De toutes les races. L’alpine, la Poitevine, la Chamoisée, les belles barbichettes s’épanouissent en plein air. « Et elles ont toutes un prénom précise Camille. Qu’elles reconnaissent. Car si elles peuvent être garces entre elles et font aussi parfois des bêtises, elles sont attachées à leurs maîtres. » À peine dans le pré, elles ne tardent d’ailleurs pas à réclamer des câlins. À coups de tête. À coups de cornes. Une façon de vous dire
«jesuislà.» Difficile de toute façon de les oublier avec deux traites quotidiennes. De ce lait si particulier, transformé, sur place, en or blanc comestible. En fromages certes, mais aussi et surtout en glaces. Dont le chef, Benoît Witz, fraîchement installé au Domaine Lou Calen à Cotignac, dit le plus grand bien.
« Il est venu avec son pâtissier pour les goûter raconte Rudy. C’était bizarre de voir un tel cuisinier chez nous. Je crois qu’il a aimé. » Il a adoré même ces fruits gelés du paradis. Vanille et noix de macadamia. Menthe chocolat. Café. Rhum et raisins. Noix de coco. Noisette. Mais aussi thym et pastis. Une dizaine de parfums sont proposés. Dans les règles de l’art. De l’artisanat. « En fait, on en avait fait pour une fête de village et on a fait un carton. Du coup, on s’est spécialisé dans
cette gamme. » Avec succès puisqu’ils ont notamment obtenu deux médailles (or et argent) à la Foire de Brignoles. Il suffit de goûter pour comprendre. De laisser fondre une bouchée onctueuse et douce pour basculer du bon côté de la force. Celle de la qualité. « C’est sûr, il n’y a pas de colorants. Pas d’arômes artificiels. C’est la
glace de nos grands-mères. » Au foisonnement réduit. Cet air, vous savez, dont certains industriels abusent. Si bien qu’un kilo de crème glacée équivaudrait en fait à 500 g. Pourtant vous paierez bel et bien un kilo.
Ce n’est évidemment pas le cas chez Rudy et Camille. On ne vous trompe pas sur la marchandise. Qui a donc un coût et un prix : 17 euros le bac. Le prix du travail bien fait (il leur faut trois jours pour faire une glace). Le prix du sain. À apprécier. Comme un bon vin. Une viande tracée. Un fruit mûr. Le prix d’une agriculture pensée et raisonnée. De leur idéal. Embrassé sept jours sur sept. Sans répit.
Avec, encore, des idées plein la tête. Pour régaler leurs clients.
Leurs visiteurs. Car, en cette ferme, tout est ouvert. On ne cache rien. « On a un projet d’agritourisme. On aimerait que les gens découvrent notre univers. Peut-être que ça susciterait aussi des vocations » s’avance Camille.
Goûter paysan à la bonne franquette avec crêpes au lait de chèvre et jus de pommes. Balade en calèche. Rencontre avec les cochons, les ânes, les chevaux, les cabris, les poules. Dégustation des glaces (dont la prochaine au miel), des fromages, des yaourts. Participation à la traite. Les tourtereaux ne s’interdisent rien. «On aime se distinguer. Faire différemment. S’ouvrir aux autres et partager notre terroir. Celui qui nous ressemble. »
Simple et beau à la fois. Authentique et moderne. Fort de valeurs humaines. Pour un avenir gorgé d’optimisme. Où l’agriculteur retrouve enfin la place qu’il mérite. Il y a certes encore du chemin à parcourir. Preuve en est, ils ne se versent pas encore de salaires. Une hérésie à l’heure de la 5G. Bien moins nourricière du corps et de l’esprit...
«Onaimese distinguer. Faire différemment. Partager notre terroir. »