Nice-Matin (Cannes)

LE GÂCHIS ASTRAZENEC­A

Les Azuréens ne veulent plus de ce vaccin Un rejet injustifié aux yeux des médecins

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Par prudence, il s’exprime sous couvert d’anonymat. Mais ce médecin généralist­e de Nice ne laisse aucun espoir au vaccin anglo-suédois. Feu Astrazenec­a, suggère sans ambages ce praticien amer, une centaine d’injections au compteur. « Je vais faire les rappels qui sont prévus, et basta. Ce vaccin est fini. Les gens n’en veulent plus. »

« Il faut les comprendre », poursuit ce médecin en évoquant des patients réticents, voire hostiles. «Si l’on vous donne le choix entre un vaccin qui est bon, mais donne une fois sur 100 000 une cause mortelle de thrombose, et deux autres avec lesquels ce n’est pas le cas, que choisissez­vous ? Ça n’arrive pas, peutêtre, mais si cela se produit sur moi, c’est 100 %. »

« Réactions assez fortes »

Lui-même affirme avoir constaté « deux réactions assez fortes ». Il évoque des poussées de tension intenses qui l’ont conduit à hospitalis­er deux sexagénair­es. Pour autant, il ne remet pas en cause l’intérêt de l’astrazenec­a : « Je suis médecin », résume-t-il. Une manière de rappeler que le bénéfice l’emporte de façon écrasante sur le risque. «Je ne parviens plus à gérer les rendez-vous », conclut-il. « Les gens annulent, ils viennent, ils ne viennent pas, ce n’est plus possible. On sent vraiment qu’ils n’en veulent plus. Il va bien falloir que les autorités en tiennent compte. »

« Beaucoup annulent »

Le docteur Christophe Vauchiez, pharmacien à Nice Nord, reçoit « un à deux flacons de dix doses par semaine ». Il réussit, « sans trop forcer », à faire venir les candidats et n’a donc pas encore été amené à laisser se périmer des flacons bons à jeter. Mais il devient difficile de convaincre. « Quand les gens, en prenant rendezvous, apprennent qu’il s’agit de l’astrazenec­a, beaucoup annulent », reconnaît une préparatri­ce.

« S’il y en a de plus en plus qui paraissent tolérants, certains parlent quand même de la thrombose et renoncent à l’injection. » La pharmacie peine un peu à faire le plein, « il faut multiplier les appels pour atteindre les dix doses ». En revanche, aucun retour négatif : « Pas du tout, zéro. En général, on les garde un quart d’heure pour voir si ça va, puis on leur dit de rappeler en cas de souci. Mais personne n’a eu à le faire. Alors que nous en sommes à 76 injections. »

Johnson & Johnson arrive la semaine prochaine. « Mort-né », prophétise le même médecin généralist­e, après des cas de formation de caillots sanguins aux États-unis.

L’agence européenne des médicament­s a réaffirmé mardi que ce vaccin serait « efficace et sûr », estimant par ailleurs que les facteurs spécifique­s de risque ne seraient pas confirmés.

« Crise de confiance injustifié­e »

À Roquebrune-cap-martin, le docteur Cyril Colombani, qui préside l’union nationale des pharmacien­s d’officine dans les Alpes-maritimes (lire également ci-dessous), prend l’exact contre-pied de ce généralist­e qui, selon lui, enterre un peu vite ces produits. « Je pense qu’il a déclaré la mort du patient un peu tôt. » Il le répète à l’envi : « L’astrazenec­a est un bon vaccin. La crise de confiance est totalement injustifié­e. »

« Tout traitement actif entraîne des effets secondaire­s. Mais la Covid, aujourd’hui, tue plus que le vaccin. » Une tautologie, mais ce chiffre : « En Angleterre, sept décès sur 18 millions de personnes ayant reçu l’astrazenec­a. » « Oui, c’est compliqué de recruter. Cela prend du temps, de convaincre. Des gens hésitent, ils doutent, se posent des questions », admet le Dr Colombani. « À côté de ça, je viens de vacciner un restaurate­ur de Menton qui, à 56 ans, a perdu un ami de la Covid. Un homme de 51 ans, sportif, sans aucune comorbidit­é. Une quinzaine de ses amis m’ont appelé pour une première injection. » De quoi bousculer une idée reçue : « L’image du virus qui tue des vieux de 90 ans en leur faisant perdre quelques semaines d’espérance de vie, c’était l’année dernière. » Tous les acteurs, médias inclus, doivent travailler pour rétablir la réalité sur le bienfondé de la vaccinatio­n, insiste le pharmacien. « Prendre l’avion provoque plus de thromboses que l’astrazenec­a. » C’est dit.

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