Nice-Matin (Cannes)

- : une histoire d’amitié puis de haine

- E.N.

En octobre , Eric Ciotti renonçait à se présenter aux municipale­s à Nice contre Christian Estrosi. Un choix de raison pour le député azuréen : les sondages ne lui permettaie­nt pas d’envisager la victoire et de déloger le maire sortant. Pour l’un comme pour l’autre, il n’était pas pour autant question de baisser la garde. Christian Estrosi savait que le venin d’eric Ciotti, même affaibli, pouvait encore l’atteindre. Eric Ciotti savait aussi que Christian Estrosi, après lui avoir fait mettre un genou à terre dans le combat pour les municipale­s, aurait sans doute tenté d’achever son adversaire politique.

Depuis lors, les deux anciens amis de  ans jouaient chacun leur partition en public et le rapport de force, en coulisses, si nécessaire. C’est le cas notamment pour les prochaines élections départemen­tales. Dans les cantons niçois et de l’arrière-pays niçois, les deux ténors ont placé chacun leurs candidats, dans un équilibre presque parfait, au sein des binômes soutenus par LR.

Ces deux-là se connaissen­t trop bien, de l’amitié à la haine, pour ne pas rester sur le qui-vive. Vingt ans de relations étroites.eric Ciotti, collaborat­eur de Christian Estrosi à partir de , toujours fidèle dans les bons comme dans les mauvais jours à son mentor. Jusqu’à ce que Christian Estrosi lui mette le pied à l’étrier pour le propulser de l’autre côté du miroir. Le voilà député de la

re circonscri­ption de Nice en , premier adjoint du nouveau maire de Nice Christian Estrosi puis président du Conseil départemen­tal en  après un nouveau coup de pouce consécutif à un échec aux cantonales à Nice.

Plus sur la même ligne politique

Christian Estrosi l’avait sans doute oublié. L’histoire regorge de ces héritiers qui ont voulu tuer le père. Pour Eric Ciotti, l’appétit vient en mangeant. Lâché dans l’arène de l’assemblée nationale, il s’impose peu à peu comme un des députés les plus en vue, il prend aussi du galon au sein de L’UMP. Christian Estrosi, écarté du gouverneme­nt Fillon en novembre , se rend compte que son ancien collaborat­eur a désormais des dents de carnassier et occupe de plus en plus l’espace médiatique national. Les relations se tendent mais pas encore sur la place publique. Christian Estrosi préempte la tête de liste de la droite aux régionales  pour couper l’herbe sous le pied de celui qui est désormais son rival.

Eric Ciotti maintient la ligne qu’il a toujours tenue avec Christian Estrosi : celle d’une droite sans complexe. Pendant ce temps, Christian Estrosi infléchit son positionne­ment, il se déclare « gaulliste social », puis au second tour des régionales reçoit le soutien de la liste de gauche pour faire barrage au Front national de Marion Maréchal-le Pen. Les deux anciens amis ne sont ouvertemen­t plus sur la même ligne politique.

Une fois Nicolas Sarkozy éliminé de la primaire, Eric Ciotti est, à fond, derrière François Fillon candidat à la présidenti­elle même lorsque celui-ci est emporté par les affaires. Christian Estrosi est d’emblée en retrait. Il reçoit même avant le premier tour Emmanuel Macron dans son bureau de président du Conseil régional à Marseille. Entre les deux tours, c’est naturellem­ent qu’il appelle à voter pour le candidat En Marche alors qu’eric Ciotti ne donne pas de consigne de vote.

La fracture des législativ­es

La guerre ouverte est déclarée lorsqu’avant le premier tour des législativ­es de , Christian Estrosi reçoit dans son bureau à la mairie de Nice les ministres Gérard Collomb et Gérald Darmanin venus soutenir Caroline Reverso-meinietti, candidate LREM dans la re circonscri­ption face à un certain Eric Ciotti. Pour celui-ci, la manoeuvre est cousue de fil blanc. Christian Estrosi cherche à lui faire perdre les législativ­es. Dix ans après avoir tout fait pour les lui faire gagner. Au soir de sa victoire, il déclarera : « J’ai été élu sans Christian Estrosi et quelque part avec son opposition. »

Leurs relations ne cesseront ensuite de se tendre, dans la perspectiv­e des municipale­s, Eric Ciotti disant ouvertemen­t pis que pendre de la politique de Christian Estrosi. Jusqu’à ce que tous les deux sifflent la fin de la partie. Et puis hier, la campagne des régionales a eu de nouveau raison de cette entente de façade.

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