Le Christ de Notre-damedes-pins sauvé de l’oubli...
Une jolie chaîne de solidarité s’est naturellement créée autour de ce grand tableau ces trois dernières semaines. L’oeuvre va bientôt pouvoir être raccrochée à l’église d’alexandre-iii.
Tout a commencé au 1 rue de la Miséricorde, devant l’atelier de restauration de meubles de Christian Forville. « Ce jour-là, j’étais dans mon établi pour guérir un meuble… »
Il est comme ça M. Forville, il ne dit pas réparer, il dit « guérir ». Déjà le personnage est planté.
L’artisan était donc au chevet d’un meuble lorsqu’un ancien commerçant de la rue Saint-antoine : Roland Maestrati (« Pierres de rêve ») située juste derrière, s’arrête à sa hauteur. Il lui explique qu’il est inquiet : à l’église Notre-dame-des-pins, un grand tableau (3 mètres sur 1,40 mètre) est tombé. La toile représentant le Christ (« Laissez venir à moi les petits enfants ») est déchirée en bas, sur le côté gauche. Et le cadre doré (avec un décor en feuilles d’acanthes) est sérieusement abîmé…
« Il m’a alors expliqué que le père Largillière, curé de la paroisse, déjà aux prises avec des vicissitudes financières plus urgentes ne voyait pas comment remédier à ce malheur. » Mais Roland Maestrati, lui, veut faire quelque chose. « Il m’a demandé de faire un devis, pour prendre les frais à sa charge (...) Un amoureux de l’art cet homme-là et je sais de quoi je parle ! »
Les deux hommes tombent d’accord. Et rendez-vous est pris quelques jours plus tard pour aller récupérer le tableau à l’église. Pour pouvoir le transporter, Christian Forville a confectionné un cadre avec des planches et des tasseaux scotchés sur la galerie de sa voiture. «Mon ami Roland et une dame m’ont aidé à charger le malade cassé en trois. »
Un JEAN-PAUL-XXIII également
Ce malade-là, plus un autre d’ailleurs : un Jean-paul XXIII également tombé et éventré qu’il faudra soigner. Les deux tableaux ont ainsi été rapatriés à l’atelier de la rue de la Miséricorde.
« Et là… Le miracle », commente Christian Forville. « Hannah, architecte, décoratrice et sculptrice aux mille talents (1) m’a proposé gentiment de sauver les deux oeuvres… » Ce matin-là, justement, Hannah prend son petit-déjeuner avec Christian Forville : « Il a collé un pansement à l’arrière de la toile. Et j’ai fait de mon mieux pour restaurer le tableau. C’était la première fois que je faisais cela. » Résultats bluffant en tout cas. Le bas du tableau est magnifiquement reconstitué. Christian Forville, lui, s’est chargé de poser quelques pansements et de resculpter le cadre avec de la pâte à bois. Puis de le redorer. La toile du Christ a également été nettoyée à l’eau savonneuse, « mais avec une éponge pas trop humide pour ne pas tremper la peinture » Un oignon « celui qui fait pleurer » a permis de terminer le décrassage. Tandis que du coton hydrophile a été utilisé pour essuyer le tout.
Une signature est apparue
C’est alors qu’est apparue une signature : Cécile Chéron (1892), d’après Hippolyte Flandrin. Une anonyme a donc peint cette toile à partir d’un tableau d’hippolyte Flandrin, peintre du XIXE siècle. Cela signifie, selon Christian Forville, que l’oeuvre en question, comme l’autre d’ailleurs datant de 1 894 « étaient déjà dans la chapelle Notre-dame-des-pins, devenue trop petite et agrandie vers 1930. » Et comme les histoires finissent toujours sur une jolie morale, celle de l’artisan se résumerait ainsi : « La magie de mon métier est d’ailleurs à la fois archéologue, historien et conteur de notre culture et de son patrimoine légués par les artistes d’antan. »