ESTROSI : LA RUPTURE
Il a décidé de claquer la porte des Républicains Jean Leonetti déçu David Lisnard très critique
« Je m’en vais ! » : dans la foulée du maire de Toulon Hubert Falco la veille, le président de la Métropole Nice Côte d’azur a repris hier sa liberté de penser en quittant sa famille politique. Une nouvelle déflagration qui pose la question de l’avenir du parti.
Christian Estrosi a donc claqué la porte des Républicains. Après Hubert Falco, le maire de Toulon, mercredi, c’est au tour du président de la Métropole Nice-côte d’azur, ancien ministre sous la présidence de Nicolas Sarkozy, de reprendre sa liberté.
Les LR se remettront-ils de cette nouvelle défection ? La décision de Christian Estrosi ouvre en tout cas une nouvelle brèche et risque de relancer la crise grave et parfois ubuesque que traverse le parti refondé sur les décombres de L’UMP par Nicolas Sarkozy en mai 2015. C’est dans une longue interview exclusive accordée à nos confrères du Figaro que le maire de Nice a décidé de s’en expliquer. Se refusant à réagir à chaud, sous le coup d’une impulsion après le procès que, à travers Renaud Muselier, les cadres de LR lui avaient fait mardi, Christian Estrosi a choisi de prendre le temps.
« La dérive d’une faction »
Après avoir regagné Nice, hier matin (lire page ci-contre) et satisfait aux obligations de sa charge de maire, notamment en inaugurant le salon « Ever Monaco » avec le prince Albert II, Christian Estrosi a tenu à argumenter en pesant chaque mot, quitte, parfois, à être cinglant à l’endroit d’eric Ciotti, voire définitif sur l’hypothèse d’un ralliement à LREM qu’il qualifie – rien de moins – de « coquille vide ».
« Je me mets en congé du parti », at-il d’abord entretenu le suspense, avant de mettre les points sur les «i»:« Je m’en vais de LR. J’ai donc désormais le même statut que Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, sans forcément partager les mêmes analyses. Ils ont démissionné avant moi, on ne leur oppose pas de haine. Je demande le même respect. »
Quitter son parti, celui au sein duquel, aux côtés de Jacques Chirac et surtout de Nicolas Sarkozy, il livra tant de combats, est, avouet-il, « une décision pénible pour le gaulliste que je suis ». Mais le scénario dramatique de ces derniers jours l’a convaincu qu’il n’y avait plus d’alternative : « Ces quatre derniers jours sont d’abord la démonstration de la dérive d’une faction qui semble avoir pris en otage la direction du parti. J’ai tout subi : mise en cause personnelle, insultes, mensonges. »
Eric Ciotti dans le viseur
Comme Hubert Falco, le mot « malfaisant » lâché à son endroit par Christian Jacob a été la goutte d’eau. « Malfaisants !, s’indigne-t-il. Ce qui est malfaisant, c’est de ne rêver que d’entre soi. Ce qui est malfaisant, c’est de regarder quiconque hors de nos murs comme un ennemi ! Ce qui est malfaisant, c’est de pactiser avec nos ennemis de l’extrême droite. »
Au passage, son ancien meilleur ami, Eric Ciotti prend une rafale sémantique : « Je constate qu’à l’heure où la direction du parti nous faisait procès, un journal apportait les preuves qu’éric Ciotti a négocié [...] un accord secret avec le RN lors des dernières législatives. À cette heure, le parti n’a engagé ni enquête ,ni procédure, sur ce viol caractérisé des principes fondamentaux érigés par Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy. » Claquer la porte de LR n’implique cependant en rien un ralliement. Sur ce sujet, Christian Estrosi est formel. LREM étant pour lui une «coquille vide » , il est temps, estime-t-il, « de reconstituer une grande formation politique moderne pour rassembler les gens de droite et du centre autour d’un vrai projet, où l’on ne passe pas son temps à parler de soi en bureau politique, mais d’industrie, d’environnement, de sécurité, d’immigration contrôlée ».
« Renaud Muselier reste notre candidat naturel »
Concluant ce coming-out par un appel à faire barrage au Rassemblement national en Provencealpes-côte d’azur lors des régionales, mais aussi, au-delà, lors de l’élection présidentielle de 2022,
Christian Estrosi déplore enfin qu’au fil des mois, LR ait fini « par banaliser Marine Le Pen et le Rassemblement national. A trop vouloir souligner qu’il n’y a pas entre eux et le RN de différence, ils l’amènent au pouvoir ».
Reste à savoir qu’elles seront les conséquences de cette nouvelle déflagration politique. D’abord sur les régionales en Provence-alpescôte d’azur, dès lors que Renaud Muselier avait fait de Christian Estrosi son champion pour mener sa liste dans les Alpes-maritimes. Partant de LR, le maire de Nice insiste sur la permanence de son engagement aux côtés de Renaud Muselier : «Ilest notre candidat naturel. » Mais fatalement, aussi, sur le plan national : épiphénomène, ou jour zéro de la recomposition, en mode « clarification toute » de la droite française ?