Retards, annulations... les passagers en colère
Créé en juin, le groupe Facebook « Clients Corsica ferries en colère » rassemble plus de 1 900 mécontents. Ils dénoncent des annulations, des retards et des conditions d’accueil dégradées.
Il n’existe pas assez d’emoji aux visages furieux pour exprimer leur mécontentement. Sous le pseudo « Ren », un passager affirme qu’une traversée prévue « samedi prochain » à8h à Livourne est reportée à 18 h le même jour « sans mail ni message ». Audrey décrit un invraisemblable ping-pong de textos contradictoires pour une traversée prévue le 17 juillet à 21 heures entre Savone (Italie) et Bastia. « Deux jours avant, on reçoit un sms c’est 20 h le départ. Le jour même à 15 h, [on nous dit] “départ retardé à21h” . Puis, à 17 h, message “départ 20 h” . Le stress de la route, on était seulement après Monaco. 17 h 45 traversée annulée ??? On nous propose une traversée à Toulon avec un départ à 19 heures, jamais de la vie on pouvait être à l’heure !!! ». Audrey et ses proches se sont finalement rabattus sur une liaison au départ de Livourne à 6 heures du matin le lendemain. « Trois heures de voiture en plus et 200 euros la nuit d’hôtel », conclut, amère, la jeune femme.
Divers cas de figure
Sébastien, lui, vient d’apprendre que le ferry prévu le 27 juillet à 8 h partira finalement 10 heures plus tard : « Je suis donc obligé de prendre un hôtel autour d’ajaccio au lieu de me rendre à mon lieu de camping prévu car je n’aurai plus le temps : 100 euros de ma poche. Le ferry de retour du 10 août a lui aussi été avancé de 11 h du matin à 7 h du matin donc je suis censé partir de mon camping à 4 h du matin pour arriver à l’heure au quai ». Un autre proteste : « Voyage modifié 3 fois pour “raisons opérationnelles”. Cabine payée supprimée, sûrement aussi pour ces mêmes raisons opérationnelles... Bateau bondé, obligé de rester 5 h sur les marches d’un escalier. Compagnie impossible à joindre. »
Annulations, reports, retards... Les messages se suivent et se ressemblent sur le groupe Facebook « Clients Corsica ferries en colère », sorte de cahier de doléances où se déversent les reproches de voyageurs mécontents envers la compagnie. Corsica Ferries transporte chaque année 3,5 millions de passagers entre le continent et les îles de la Méditerranée – principalement la Corse et la Sardaigne. Au départ des ports de Nice, Toulon et Savone, c’est aussi le seul prestataire. Alain, également victime de ces modifications de dernière minute au début du mois de juillet soupire : « Moi, je vis à Nice, donc ça allait. Mais le mec qui vient de... je sais pas, moi, Lyon par exemple, il fait comment ? »
Membre du groupe Facebook des clients en colère, Aurélie ne vient pas de Lyon, mais de Pau. Départ prévu à Toulon à 20 heures, d’abord retardé à 22 heures. «Pasde soucis jusque-là » ; la jeune femme est partie à l’aube. « À 11 h 30, j’apprends qu’il faut modifier le billet. Heureusement que j’avais une connexion Internet, du coup modification pour Nice-bastia à 23 h 55 (ma journée est bien rallongée). Vers 20 h 30, traversée de nouveau retardé, départ à 00 h 45 !!!»
La crise sanitaire et la météo
« Hormis les conditions météorologiques et les contraintes portuaires (qui sont audelà de notre volonté) aucune escale n’a été annulée moins de 24 h avant le départ », répond Corsica Ferries à la fin d’un long message posté sur la page Facebook officielle de la compagnie, consciente des difficultés rencontrées par ses passagers.
Pierre Matteï, son patron, se défend : si le standard téléphonique est saturé, c’est parce que « de nombreux clients nous appellent pour nous interroger sur les règles sanitaires. “Y a-t-il une tolérance si le test PCR a plus de 72 heures ?” “Faut-il être vacciné” ? Mais ce n’est pas nous qui édictons ces règles ! » Corsica Ferries invoque aussi la difficulté de « faire des prévisions », toujours à cause de la crise sanitaire : « On ne savait pas où se situerait le trafic cet été, jusqu’à encore quelques semaines. » Les réservations de dernière minute et les mises à jour des protocoles sanitaires « avec de très courts délais de mise en oeuvre » n’ont rien arrangé. Quant au traitement des réclamations, Pierre Matteï assure qu’il existe « des règlements européens pour les dédommagements » et que sa compagnie «les respecte ».
Enfin, le patron évoque des « éléments conjoncturels » pour expliquer les annulations de toute dernière minute : « Dimanche dernier, nous avons été confrontés à un gros problème météo et nous avons envoyé le navire à Nice plutôt qu’à Toulon. On a averti tous les passagers dès qu’on a su. »
Et si certains passagers se plaignent aussi de la diminution des rotations au départ de Nice – avec une quasi-suppression des liaisons avec Ajaccio et l’îlerousse – «ça ne date pas d’hier !, s’exclame Pierre Matteï, qui évoque un accord passé avec la Métropole Nice Côte d’azur, propriétaire du port de Nice. Il s’agissait de diminuer le nombre d’escales et d’optimiser le remplissage ».
Signée en 2019, la charte en question visait à « limiter les pollutions sonores et atmosphériques, garantir la qualité de vie des habitants du port en préservant l’activité économique ».