Nice-Matin (Cannes)

« Chaque nouveau vacciné est un promoteur du pass »

Gaël Sliman, président de l’institut de sondage Odoxa, n’exclut pas une rentrée sociale difficile, mais pas sur fond de crise sanitaire. Le spécialist­e décrypte le mouvement de grogne.

- PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE MINARD/ALP

Une large majorité de français approuve le pass sanitaire et la vaccinatio­n obligatoir­e pour les soignants. C’est un atout important pour le gouverneme­nt ?

C’est effectivem­ent un atout fondamenta­l pour le gouverneme­nt car nous allons entrer dans une période ou des mesures coercitive­s vont être prises. Elles ont été annoncées et en partie validées par le conseil d’état. Le fait que le gouverneme­nt puisse compter sur une très large majorité de français, cela lui donne du poids dans son « bras de fer » avec les opposants.

Au fur et à mesure que les portes des restaurant­s, des avions, des cinémas ou des boîtes de nuit vont se fermer à eux, la colère va monter.

Peut-on vraiment parler de « bras de fer » tant les anti-vaccins sont minoritair­es ?

Les études ne sont pas une boule de cristal. Ce que l’on sait c’est que le niveau de soutien à ces mesures est très majoritair­e.

Sachant que chaque nouveau vacciné – l’être humain étant ainsi fait – sera un nouveau promoteur du pass sanitaire. La tendance est donc nettement favorable au gouverneme­nt de ce point de vue là. Le problème des mouvements, qu’ils soient physiques ou sur les réseaux sociaux, c’est que vis-à-vis des médias, cela peut donner le sentiment d’être assez massif, même si cela ne représente pas grand monde.

Le soutien massif des français peut-il relancer la confiance envers le président de la République ?

On en revient à la « giletjauni­sation » du sujet. Parmi les opposants, nous avons des profils sociologiq­ues typés, avec une surreprése­ntation des catégories populaires, des moins diplômés, des personnes en grande difficulté sociale et de ceux qui vivent en zone périurbain­e. Ce sont des gens qui ont l’impression que la mondialisa­tion avance sans eux ou contre eux. Ils se considèren­t comme les perdants du système et vont donc massivemen­t voter antisystèm­e, c’est-àdire Rassemblem­ent national ou France

Insoumise. Ce sont les plus défiants à l’égard d’emmanuel Macron mais aussi des élites en général. On s’étonne parfois que des aides-soignantes qui ont pour mission de sauver des vies ne se font pas vacciner. Mais parmi elles, il y en a justement qui ne se sentent pas reconnues socialemen­t. Et elles remettent en cause l’autorité de l’hôpital qui lui demande de se vacciner.

Le mouvement des Gilets Jaunes est né sur l’augmentati­on des carburants. Peut-on justement estimer qu’il renaisse sur le pass sanitaire ?

Il y a deux éléments contradict­oires dans nos études. Il y a tous les ingrédient­s pour qu’un conflit social éclate, car un couvercle a été mis sur la société durant plus d’un an. Il a empêché les manifestan­ts de sortir dans la rue mais les ingrédient­s de frustratio­n et de colère sont toujours là. Voilà pour le facteur de très grand risque de conflit à l’automne. Il suffit pour cela d’une étincelle, mais qui ne viendrait pas du sanitaire.

Après la dernière l’allocation d’emmanuel Macron, toutes les mesures sanitaires sont largement soutenues. Il y a en revanche un élément qui met vent debout toute la société, c’est de remettre sur le tapis la réforme des retraites. C’est un chiffon rouge !

 ?? (Photo DR) ?? Gaël Sliman, président de l’institut de sondage Odoxa.
(Photo DR) Gaël Sliman, président de l’institut de sondage Odoxa.
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France