Nice-Matin (Cannes)

Concurrenc­e déloyale pour la truffe d’été varoise

Celle qui vient des pays de l’est est identifiab­le à son prix. Elle est moins chère que celle produite à Aups (Var) et aux alentours, mais aussi moins goûteuse. Explicatio­ns.

- RÉGINE MEUNIER rmeunier@nicematin.fr Domaine de La Majastre. Route de Moustiers à Bauduen. Tél. : 04 94 70 05 12.

ÀBauduen, petit village tout proche du Verdon, dans son fief de La Majastre, Philippe de Santis, président des trufficult­eurs du Var, n’a pas le temps de se la couler douce, dans sa grande demeure, ancienne résidence des comtes de Blacas.

Pourtant la saison de la truffe blanche d’été touche à sa fin. Très rares sont les producteur­s à vendre encore sur le marché d’aups, chaque mercredi, jusqu’à la fin du mois d’août. Ce n’est même pas dit qu’ils en auront encore pour tenir jusque-là. Car la tuber aestivum a son succès.

Un goût de noisette et de sous-bois

Les amateurs déboursent entre 300 et 400 euros le kilo pour cette truffe blanche, bien moins chère que la tuber melanospru­m ou truffe noire, ce fameux diamant noir qui fait la saveur de plats gastronomi­ques en hiver, et dont le cours est bien plus élevé : il va de 700 euros le kilo en début de saison, en novembre, jusqu’à 1200 euros à la fin en mars.

La truffe blanche d’été a une robe marron. C’est quand on la coupe qu’elle révèle sa blancheur. « Elle est très goûteuse mais très douce en bouche. Elle a un goût de noisette et de sous-bois » raconte Philippe de Santis.

Truffes importées : problème de maturité

Mais que ce soit hiver ou été, les trufficult­eurs subissent « une concurrenc­e déloyale ». Elle vient d’espagne pour la tuber melanospor­um et des pays de l’est pour la tuber aestivum.

« La truffe d’été transite par l’italie mais elle est d’origine roumaine ou hongroise. C’est une concurrenc­e déloyale, car elle rentre en France à moitié prix par rapport à la nôtre », explique le président des trufficult­eurs varois. Son prix tourne autour des 150 euros le kilo. Mais s’il est moins élevé, la qualité l’est aussi, prévient-il.

« La truffe blanche du Var est mûre vers la mi-juin. C’est pour cette raison qu’on l’appelle aussi la truffe de la Saint-jean. Celle qui vient des pays de l’est subit le froid, qui dure dans la saison, de sorte que fin juillet, elle est tout juste mûre. Elle est immature, n’a pas d’odeur, pas de goût et est sans intérêt culinairem­ent. » Ceci étant, la truffe blanche du Var, qui provient à 80 % de truffières sauvages selon Philippe de

Santis, se mange de préférence crue. Par exemple en fines rondelles, sur une salade composée de jambon cru, de copeaux de parmesan, arrosée d’huile d’olive à la truffe, sans oublier un peu de fleur de sel.

Un label de qualité

Il faut lui éviter la cuisson mais rien n’empêche d’en râper sur des aliments chauds. Sur des pâtes al dente par exemple, « nourries » avec 20 g de beurre et 20 g de truffe par personne. La truffe d’été et celle d’hiver, produites dans la région Provence-alpes-côted’azur, devraient bientôt bénéficier d’un label « Provence », à partager avec les autres départemen­ts producteur­s. Le but est de garantir l’origine et la qualité. Le syndicat varois veut aller encore plus loin et donner naissance à un label « truffe d’aups », afin de générer un terroir, parfaiteme­nt identifiab­le par les consommate­urs. À cela s’ajouterait la création d’un cours de la truffe provençale et d’un cours de la truffe d’aups. « Provence » et « Aups » se superposer­aient pour offrir un écrin AOC et une vraie image de marque à ce qui n’est autre qu’un champignon, mais d’une grande classe. Est-ce que les prix s’envoleront avec cette reconnaiss­ance ? L’avenir le dira.

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(Photo Régine Meunier) Philippe de Santis hume le parfum de sa dernière récolte.

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