Nice-Matin (Cannes)

Delort, ça déménage !

Jamais passé par un centre de formation, longtemps balotté de club en club, parfois critiqué pour des écarts de conduite, l’ex-montpellié­rain adore bousculer les défenses. Un profil atypique dans l’effectif de Galtier.

- WILLIAM HUMBERSET

Bien sûr que je m’imagine finir ma carrière à Montpellie­r. » Delort répétait son amour pour la Paillade sur les ondes de France Bleu Hérault en mai dernier. Une communicat­ion que les supporters du MHSC reprochent à l’ancien capitaine après avoir changé d’agent et de club. « C’était sincère. Andy dit ce qu’il pense et pense toujours ce qu’il dit, » promet son entourage. « C’est peutêtre le contrat de sa vie que lui a proposé L’OGC Nice, un club ambitieux et au projet stable. Plus que L’OM. Ce n’était pas une décision facile, Andy devait écouter son coeur, » poursuit Jean-bernard Reboul, l’un de ses premiers entraîneur­s.

C’était à Pointe Courte, « dans le deuxième club de la ville après le FC Sète. On recueillai­t les refoulés au niveau caractérie­l, les indiscipli­nés. » Et pourtant Jean-bernard « souhaite à tous les éducateurs de croiser un gamin comme Andy. Les gens veulent des joueurs lisses, pas moi, » tranche l'actuel coach d’agde, en N3. « Il sublime les autres. Quand vous êtes défenseur ou milieu, un attaquant qui est prêt à mourir pour vous, ça booste tout un collectif. » Fan de JPP et des papinades, Delort va déjà « droit au but » chez les benjamins. « Il frappait fort. Et faisait moins de passes (rires). Il était déjà hors norme physiqueme­nt. Costaud, un peu même en surpoids. Il te balançait un coup d'épaule et le gamin partait de l'autre côté. Surtout quand il ne gagnait pas. » (rires) Une force génétique que « l’on retrouve chez Santi (son fils de 8 ans), il a les mêmes mollets et fait déjà des exercices avec son père, » se marre Aurélien Simon, le préparateu­r physique personnel de l’athlète de 29 ans. Jean-bernard Reboul devait plutôt jouer les médiateurs, lui, entre les supporters mécontents et son attaquant au fort caractère.

« Il me marquait trois buts par mitemps, mais j'étais souvent obligé de le sortir à la pause. Quitte à me faire engueuler par les autres parents ! Il fallait le temporiser, calmer cette énergie débordante. Ça pouvait être conflictue­l entre nous, mais il avait besoin d’un cadre. » Comme en 2019, lorsque Delort se met en tête d’être convoqué par l’équipe d’algérie pour disputer la CAN et faire honneur aux racines de sa grand-mère maternelle. «Il m’a contacté pour un programme de préparatio­n physique sur cinq semaines, rembobine Aurélien Simon. Je l’avais mélangé avec des basketteur­s. En une séance j’ai compris à qui j’avais affaire, je l’ai isolé. C’était une machine, un bourreau de travail. »

Qui se déplace en Renault Express pour passer inaperçu en ville et court sur le bitume avec des sacs-poubelles sur le dos pour transpirer. « Sur des parkings à 4 heures de l’après-midi, sous 40-45 degrés, pour s’approcher des conditions climatique­s de l’egypte. A 27 ans, il voulait développer ses qualités physiques. C’est le moteur de sa vie : il est en constante recherche de considérat­ion. Des siens, de son coach, de ses coéquipier­s. » Elevé dans la culture gitane de son papa, Eric, Delort préfère l’école de la vie aux bancs scolaires. Il a voyagé pour trouver la stabilité. De la Corse au Mexique, en passant par l’angleterre. Mais dans sa vie personnell­e, surtout, notamment à 15-16 ans quand son papa fréquente l’hôpital. «On dit que tant qu'on n'a pas mangé de caillou, on ne connaît pas le bonheur, cite Aurélien, préparateu­r physique qui s’investit dans les cités et auprès d’adultes handicapés. Andy, il en a mangé des brouettes. Les tatouages, les stigmates de sa vie, il les porte sur son visage. »

Le Sétois est sanguin, à fleur de peau. Il se bat dans la rue, sur les rings, sur les terrains aussi. A Nantes (2010-11), il écope d’une suspension de quatre matchs sous le maillot de L’AC Ajaccio. Peu après son arrivée à Montpellie­r (2018), il est condamné pour outrage à la police et rébellion après un contrôle routier. « Ses statistiqu­es avec le MHSC parlent pour lui, plaide Jean-bernard Reboul. Il a toujours progressé au mental malgré cette

‘‘ Tant qu’on n’a pas mangé de caillou, on ne connaît pas le bonheur. Andy en a mangé des brouettes. ”

‘‘ Il a de la place pour tout Nice dans son coeur ”

étiquette de bad boy. Certains se demandent quel joueur il aurait été s’il avait été plus sérieux, je réponds qu’il n’aurait peut-être pas tenu dans ce milieu. Il a trouvé un équilibre sur le terrain et dans sa vie d’homme. » Au côté de Marina, « une femme qui le porte toujours vers le haut » (Simon), le papa de Lia (2 ans) a profité de ses trois ans en Occitanie pour emmener son fils à la pêche, côtoyer plus souvent ses amis. Avec eux, il s’investit dans une entreprise de carrelages, organise des séances de travail devant le but pour le club dont il est président d’honneur (Gigean), ou participe à l’organisati­on d’un événement mêlant rappeurs et humoristes au Théâtre de la Mer. « C’est une très belle personne, il n’a jamais changé. Il a un coeur énorme, » admire son ex-entraîneur. « Il a de la place pour tout Nice dedans », poursuit Aurélien, qui prédestine la puissance et le coffre de Delort à une éventuelle reconversi­on dans le MMA. En quittant Poussan, son village dans l’hérault, l’ex-capitaine a offert son maillot et un gros câlin à un petit supporter du MHSC effondré de son départ. Pour ceux qui ne pardonnent pas ses mots ou ses frasques extra-sportives, Demiportio­n, rappeur sétois qui connaît le buteur, résume plutôt bien son parcours hors du commun : « Qui ne se plante jamais n’a aucune chance de pousser. »

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(Photo MAXPPP)
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