Nice-Matin (Cannes)

Pas de peuchère pour Marseille !

- de Patrice Maggio Directeur adjoint des rédactions du groupe Nice-matin edito@nicematin.fr

Trop de temps passé sur place, trop d’argent public déversé sur la ville comme un orage d’été : Emmanuel Macron en fait-il trop pour Marseille ? Trop oui, mais trop peu. Il est bien temps que l’état ouvre enfin les yeux sur l’état déplorable de la deuxième ville française. Les caisses sont vides, les inégalités criantes entre les  quartiers. De l’estaque à la Treille, les cités sont ghettos, la drogue s’y écoule comme au supermarch­é, les balles se perdent, le plan de transports est pagnolesqu­e, les écoles, piscines, et gymnases frisent par centaines l’état… d’abandon.

Rien de nouveau, en vérité, sous le cagnard phocéen mais c’est justement ce qui choque : comment le pouvoir central a-t-il pu laisser son grand port de la Méditerran­ée dériver vers de si basses eaux ? Bien sûr, les responsabi­lités locales sont immenses. L’ancien maire Jean-claude Gaudin a réagi trop tard à la fracture territoria­le entre nord et sud. Il a bien tenté en son temps un partenaria­t avec le privé pour reconstrui­re le parc scolaire, mais sa solution était bancale, aux yeux de nombreux Marseillai­s qui l’ont fait capoter. Certes, la capitale provençale a souffert de bien d’autres maux : c’est un précipité de toutes les difficulté­s de la société française de ces trente dernières années. La fin de la mixité sociale dans le parc HLM, le manque de foncier indispensa­ble pour redessiner une ville de cette dimension, l’effondreme­nt du tissu associatif qui a longtemps fait office d’état bis dans les quartiers populaires, le chômage qui s’enkyste de génération en génération.

L’exécutif et le législatif ont réagi, hélas par à-coups : une belle loi de décentrali­sation en , mais l’intendance n’a pas suivi. Parfois passent un Président, une volée de ministres, quelques dizaines de millions. Jamais autant, toutefois, que cette fois-ci. Il est peutêtre venu, le temps où Paris ne regarde plus de haut la belle frondeuse, pour la considérer enfin comme l’une des chances de la République. Si cette prise de conscience sert les intérêts de la municipali­té de gauche de Benoît Payan, tant mieux pour elle. L’essentiel est d’effacer la dette historique que le pays a contractée vis-àvis des Marseillai­s. Avec les intérêts, si possible.

« Comment le pouvoir central a-t-il pu laisser son grand port de la Méditerran­ée dériver vers de si basses eaux ? »

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