Présidentielle : le rouge est mis pour Fabien Roussel
En abordant les problématiques de l’insécurité, de l’immigration et de la vaccination, le candidat du PCF fait grincer des dents dans son propre camp. A-t-il franchi la ligne rouge ? Il se défend.
‘‘ Une élection, ce n’est pas un match de boxe”
Le Parti communiste n’avait plus présenté de candidat à l’élysée depuis 2007. Quinze années pendant lesquelles la formation de Jaurès s’est progressivement effacée du paysage politique, phagocytée par La France insoumise de Jean-luc Mélenchon. Jusqu’à ce que Fabien Roussel ressorte faucille et marteau. Le premier secrétaire du PCF vient de publier un livre-programme
(1) pour s’adresser au « monde du travail ». Avec des thèmes inhabituels et des positions parfois inattendues.
Vous avez débuté votre campagne en abordant des thématiques clivantes à gauche comme la sécurité… Pour marquer une rupture ?
Je l’ai fait pour répondre à des attentes fortes des familles modestes et des travailleurs.
Ces personnes expriment un besoin de sécurité ; il faut y répondre. Comment ? En donnant aux forces de l’ordre les moyens dont elles ont besoin.
Et en restaurant les services publics où ils font défaut.
Vous avez été très critiqué, dans votre propre camp, pour avoir manifesté aux côtés des policiers. Pas de regret ?
J’y suis allé à la demande des syndicats de policiers, y compris de gauche, qui m’ont confié leur malaise de n’être écoutés que par les politiciens du camp opposé. L’insécurité n’est pas un thème partisan, c’est un problème qui doit être traité !
Votre déclaration, invitant à
« stopper cette immigration organisée par les traités de Bruxelles »,
a également jeté un froid à gauche…
Parce qu’elle a été mal comprise. Je vis dans le Nord, sur un territoire où nous vivons au quotidien la concurrence déloyale organisée entre les peuples. Les traités de l’union européenne nous opposent entre nous. Il faut mettre un terme à ce dumping social qui arrange les entreprises, mais dégrade les conditions de vie des travailleurs.
Vous défendez la vaccination. Que dites-vous aux soignants qui, dans quelques jours, risquent de se faire licencier s’ils ne l’acceptent pas ?
Ils doivent se faire vacciner ! Pour se protéger eux-mêmes, mais aussi pour protéger les autres. Il y a des vaccins obligatoires dans de nombreuses professions : ça ne me choque pas. Cela dit, je trouve que la sanction imposée par le gouvernement est trop brutale. Il aurait fallu laisser plus de temps aux intéressés pour s’organiser, prendre le temps du dialogue.
Et pour ceux qui refusent, par principe, de se faire vacciner ?
Qu’on commence déjà par se donner les moyens de vacciner tous les autres !
Vous plaidez pour un Smic à euros brut, la retraite àanset la semaine de heures. Est-ce que les entreprises sont en capacité économique de répondre à vos souhaits ?
C’est un choix de société que nous devons faire. La France est riche, extrêmement riche, et le gouvernement subventionne les entreprises à hauteur de
milliards d’euros par an, sans exiger de contrepartie pour les salariés. Il suffit de conditionner ces aides au respect des objectifs sociaux.
Vous défendez le fait de « produire français ». Comment faire, concrètement, lorsque les unités de production n’existent plus ?
Commençons déjà par cesser de délocaliser ! Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Il faut protéger toutes nos usines. Ensuite, en effet, cela prendra quelques années pour former des jeunes, retrouver des savoir-faire qu’on a laissé perdre. C’est pourquoi je propose que le gouvernement offre aux jeunes et aux salariés des périodes de formation rémunérées.
En , Jean-luc Mélenchon n’a obtenu les signatures que grâce aux élus communistes. Pensez-vous qu’il risque d’être hors-jeu cette fois-ci ?
Il y a maires en France.
Tout candidat peut tenter de convaincre ces élus de leur accorder leur parrainage.
Il y a déjà sept candidats de gauche à la présidentielle. Mais qui est Blanche-neige ?
[Il rit] Il y a toujours eu diverses sensibilités ; toutes doivent pouvoir s’exprimer. Ça n’a jamais empêché notre camp de l’emporter.
Vous vous sentez plus proche de Mélenchon, de Montebourg ou d’hidalgo ?
On peut se retrouver sur certaines idées, se différencier sur d’autres. Ce qui compte, c’est d’être qualifié pour le second tour, de gagner la présidentielle et se rassembler autour du vainqueur pour former une majorité de gouvernement. Moi, je m’y engage !
On vous a longtemps reproché d’être trop gentil vis-à-vis du patron de La France insoumise…
Et on va continuer à me le reprocher, car je compte mener ma campagne sans invective et avec bienveillance.
Ce n’est pas un match de boxe : les Français attendent des projets, pas des querelles de personnes.
Aujourd’hui, qui prend sa carte au Parti communiste ?
Beaucoup de jeunes qui manifestent contre la politique du gouvernement, des salariés syndiqués qui veulent prolonger leur combat…
En six semaines de tournée estivale, vous dites avoir rencontré personnes et obtenu… adhésions. Ce bilan vous satisfait ?
Si nous n’avions pas organisé cette caravane itinérante, nous n’en aurions obtenu aucune. Donc, oui, je suis satisfait !
Vous êtes crédité de à , % d’intentions de vote par les sondages. Est-il possible de redresser la barre ?
C’est à la fin de la foire qu’on compte les bouses. Notre force, c’est que nous avons l’habitude de soulever des montagnes. En , il paraissait impensable que l’on rémunère des salariés en vacances. Pourtant, les congés payés ont bien vu le jour…
Qu’attendez-vous de votre débat avec Valérie Pécresse, ce soir à la Fête de l’huma ?
Ce sera un échange projet contre projet. Le retour à un débat gauche-droite me paraît plutôt sain pour notre pays.
La réforme des retraites vient d’être reportée aux calendes grecques par le Premier ministre. N’est-ce pas un chiffon rouge agité pour faire passer celle de l’assurance-chômage ?
Je reste vigilant. Il suffit de quelques amendements dans le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour que l’esprit de notre système de retraite soit modifié. Quant à la réforme de l’assurancechômage, elle consiste à faire des économies sur le dos des
demandeurs d’emploi en pleine crise ! C’est gonflé…
Au second tour, si vous n’êtes pas qualifié, qui choisiriez-vous entre Zemmour et Macron ?
C’est clair : nous ne laisserons jamais l’extrême droite mettre la main sur la République. 1. Ma France heureuse, solidaire et digne (Le Cherche midi).
‘‘ Les soignants doivent se faire vacciner”