Nice-Matin (Cannes)

Les élèves nés en  harcelés sur Internet

Sur les réseaux sociaux, ils subissent moqueries, insultes voire menaces, fédérés avec le mot-clef #anti2010. Un mouvement qui inquiète les autorités. Explicatio­ns.

- PEGGY POLETTO

#Anti, qu’est-ce que c’est ?

Sous ce hashtag (mot-clef utilisé sur les réseaux sociaux pour participer à une tendance temporaire) est né voici quelques semaines un mouvement sur Tiktok – la plateforme de partage de vidéos actuelleme­nt plébiscité­e par les adolescent­s – et sur Twitter, pour se moquer des enfants nés en 2010, qui rentrent cette année en 6e. Il s’est rapidement emballé – #anti2010 a été utilisé plus de 40 millions de fois – et durci, se transforma­nt en véritable harcèlemen­t.

Sur Tiktok, on trouve ainsi des « armées », des « brigades anti-2010 », dont les minividéos comportent des messages violents et menaçants. « Vous allez le regretter les 2010 », « N’hésitez pas à m’identifier quand vous trouvez des 2010 », « Humour de guerre », lit-on sur des photos d’hommes armés sur des véhicules blindés.

D’où ça vient ?

Pourquoi tant de haine envers des enfants âgés seulement de 11 ou 10 ans ? En raison du jeu en ligne gratuit Fortnite. Sorti en 2017, celui-ci a constitué un véritable phénomène génération­nel, avec plusieurs centaines de millions de comptes créés et jusqu’à plusieurs milliards d’heures passées dessus par mois. Or certains « anciens » adeptes de ce titre reprochent aux plus jeunes de le dénigrer et d’en transgress­er les codes. Autre sujet de moquerie : les « Pop It », un jouet anti-stress qui fait fureur dans les cours d’école. Cette sorte de papier bulle nouvelle génération, composé de silicone multicolor­e de forme variée, est composé de petites bulles à « éclater » à l’infini. L’engouement est tel qu’une jeune youtubeuse et « gameuse » (joueuse de jeux vidéo), Pink Lily, en a fait un clip, Pop It Mania… qui met en scène des fillettes nées en 2010.

Le ministre de l’éducation réagit

Le phénomène prenant de l’ampleur, la principale fédération de parents d’élèves, la FCPE, a interpellé mercredi le gouverneme­nt à ce sujet. En réaction, dans un message posté jeudi sur les réseaux sociaux, le ministre de l’education nationale, Jean-michel Blanquer, a fortement réagi, qualifiant le phénomène de « stupide » et « contraire à nos valeurs » .Il a invité les participan­ts à ces « raids numériques » à « être bienveilla­nts » et « des vecteurs de fraternité. Soyez des ambassadeu­rs contre le harcèlemen­t et dites à tous les élèves nés en 2010, dites à tous les élèves de 6e : “Bienvenue au collège.” »

Il a par ailleurs demandé aux chefs d’établissem­ent de collèges de « renforcer la vigilance » : « être très attentifs et mettre en place les procédures de signalemen­ts et de prise en charge adéquates », rappelant que «siunélève de la classe ou de l’établissem­ent est identifié comme harceleur, il est passible de sanction disciplina­ire ». Les autorités craignent notamment que ce harcèlemen­t ne se transpose du virtuel aux cours de récréation. Le principal syndicat des chefs d’établissem­ent, le SNPDEN, a toutefois déclaré n’avoir « pas du tout constaté d’incidents de ce type dans les établissem­ents, et aucun des 70 chefs d’établissem­ent réunis en conférence nationale cette semaine n’avait entendu parler de ce mouvement sur les réseaux sociaux ».

La police mobilisée

En parallèle, des messages de prévention sont actuelleme­nt diffusés sur les réseaux sociaux pour rappeler que des dispositif­s d’écoute existent. Comme l’indique notamment la police nationale, il est possible de contacter, par téléphone, le 30 20 « Stop au harcèlemen­t » et le 30 18 « Net écoute ».

Il est, par ailleurs, rappelé que le cyberharcè­lement est puni par la loi : jusqu’à trois ans d’emprisonne­ment et 45 000 euros d’amende.

Tiktok supprime le mot-clef

Hier après-midi, Tiktok a décidé de censurer le hashtag #anti2020. Les contenus en eux-mêmes ne sont pas supprimés, mais en le recherchan­t, aucun résultat ne s’affiche. La plateforme a en outre indiqué à nos confrères de BFM TV étudier chaque vidéo à titre individuel afin de déterminer si elles enfreignen­t son règlement, et les supprimer le cas échéant.

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(Photo d’illustrati­on DR) Le mouvement a commencé sur la plateforme de partage de vidéos Tiktok, à propos du jeu vidéo Fortnite.

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