Nice-Matin (Cannes)

L’ÉDITO Ils nous étonneront toujours ! « La radicalité est à la mode »

- de MICHÈLE COTTA Journalist­e et écrivain edito@nicematin.fr

À force d’être là où ne les attend pas, les écologiste­s nous étonneront toujours. Sandrine Rousseau le rappelait depuis quelques semaines déjà : elle serait la surprise de la primaire écologiste. Et bien, elle avait raison : l’ancienne porte- parole des Verts, pratiqueme­nt inconnue des Français il y a quelques semaines, est certes arrivée en deuxième position, mais elle apparaît, aujourd’hui, comme la mieux placée pour triompher au second tour. Yannick Jadot, qui la devance d’à peine plus de  % alors qu’on s’attendait à ce qu’il puisse être désigné candidat dès le premier tour, a beau être arrivé en tête, il risque de devoir céder la place, au second,

fin septembre, à celle qui est considérée, à l’intérieur et à l’extérieur du mouvement écolo comme la plus radicale des candidats verts. Car, derrière la même couleur, derrière le même mot, écologie, tout un monde, en réalité, sépare les deux gagnants du premier tour. Yannick Jadot, favorable, comme il le dit, à une grande réconcilia­tion nationale sur le sujet, est tout aussi persuadé que Sandrine Rousseau de l’urgence de la lutte contre le réchauffem­ent climatique et la limitation du CO. Il n’entend pas pour autant changer la société de fond en comble, et plaide, sans vouloir renverser la table, pour une nouvelle régulation de l’économie, pour une meilleure justice sociale et la mise en place d’un revenu citoyen. Mais il ne parle pas de mettre à bas le capitalism­e. Il entend simplement donner aux Français les moyens de combattre ces dérèglemen­ts dont ils ont bien tous conscience, sans vouloir le plus souvent faire les efforts nécessaire­s pour les éradiquer ou seulement les ralentir.

Les moyens pour Sandrine Rousseau pour parvenir au même résultat sont bien différents : c’est une révolution qu’elle désire, et pas l’évolution concertée que prône Jadot. Il est temps d’en finir selon elle avec notre système économique, social et sociétal. Proposant un revenu d’existence à

 euros, la réduction du temps de travail, tout cela en se disant

« pétrie de radicalité », elle propose un programme plus politique qu’écologique. Arrivée deuxième, Sandrine Rousseau n’a pas dit son dernier mot, loin de là : elle compte sur l’autre candidate battue, Delphine Batho, partisane, elle, de la décroissan­ce, qui limitera les effets délétères de l’homme sur l’univers. Ainsi que sur le maire de Grenoble, Eric Piolle, longtemps favori parmi les écolos, mais distancé hier, qui propose, pour arriver à la neutralité climatique, la revalorisa­tion des bas salaires, la sortie de l’élevage industriel, sans oublier un nouvel ISF pour financer les mesures à prendre pour ralentir la fin du monde. Sandrine Rousseau bénéficier­a sans doute au second tour du report de voix de ces deux candidats battus, plus proches de la radicalité que de la réconcilia­tion. Décidément, la radicalité, dans l’écologie comme ailleurs, est à la mode !

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