« La protection civile n’est pas dans L’ADN de nos citoyens »
Grégory Allione, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, souhaite voir les candidats à la députation s’emparer du sujet de la sécurité civile.
Lorsque les grosses chaleurs arrivent, ils sont en première ligne, prêts à combattre les feux de forêts au péril de leur vie. Lorsqu’une pandémie surgit, ils « vaccinent 25 % de la population ». Et ils sont là, encore, quand le ciel nous tombe sur la tête. « Mais une fois les crises passées, les sapeurs-pompiers, et plus largement encore, la protection civile, disparaissent du débat public » regrette Grégory Allione, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. C’est pourquoi, comme ce fut le cas avant les dernières élections européennes puis présidentielles, la FNSPF appelle les candidats aux législatives à « défendre et renforcer notre modèle de sécurité civile ».
Le document que vous avez remis à tous les candidats à la députation comporte 18 propositions regroupées en « trois chantiers d’urgence ». Pourquoi ce choix du terme « urgence » ?
Parce que c’est le cas ! Cette semaine, nous allons vivre une journée de plein été. Dès le
19 mai ! C’est la première fois de ma vie que je vois cela. Nous sommes en risque incendie majeur en plein printemps... Les arbres perdent leurs feuilles pour se mettre en protection. C’est incroyable. Qu’est-ce que ça va donner au mois de juillet ? Aujourd’hui, en France, en Europe ou dans le monde, pas un jour ne passe sans un événement dramatique. Cela fait la une des médias, puis on passe à autre chose. Qui, aujourd’hui, parle du Covid et du retour d’expérience ? Des hôpitaux à feu et à sang ?
D’où vient le problème, selon vous ?
Il y a très peu d’ambitions politiques sur ces questions-là. Mais les politiques menées ne sont que le reflet des attentes des citoyens. Force est de constater que la protection civile n’est pas dans L’ADN de nos citoyens, et donc de nos politiques publiques. C’est aussi dommageable qu’inquiétant. Est-ce normal qu’un enfant de six ans, vivant dans les Alpes-maritimes, ne sache pas qu’en cas de séisme, il doit se mettre sous une table ? Pourtant, le risque sismique est réel dans ce département ! Il y a un travail énorme de formation à réaliser au sein des écoles, des entreprises et dans la société en général.
La protection civile devrait donc être au coeur des politiques publiques...
Du moins être prise à sa juste mesure. Les sapeurs-pompiers sauvent des vies et, ce faisant, du PIB. Ils sont les assurances de notre territoire. Mais comme dans un couple qui a des difficultés financières et qui ne va pas assurer sa voiture, on ne va pas donner la priorité à la sécurité civile quand on connaît des difficultés budgétaires. Ce n’est pas la bonne solution. Prenons par exemple la crise hospitalière. Elle se répercute jusque dans nos interventions.
Avec la fermeture des urgences à Draguignan, nous sommes contraints d’aller jusqu’à Fréjus. Donc de mobiliser un véhicule pendant plus de temps, au détriment d’une autre intervention. Tout est lié dans la protection civile. C’est le message que nous cherchons à faire passer.
La loi Matras, votée en novembre 2021 et encadrant les missions des Sdis, a-t-elle fait bouger les choses ?
Oui, elle a permis de faire résonner le sujet dans les enceintes parlementaires. Grâce au député Fabien Matras et aux interventions de la sénatrice Françoise Dumont, l’intérêt du ministère de l’intérieur a été piqué. D’ailleurs, Gérald Darmanin a intégré certaines réflexions dans son projet de loi d’orientation et de programmation pour le ministère de l’intérieur (LOPMI), comme la modernisation des appareils volants ou l’investissement dans l’innovation. C’est un beau progrès, mais ce n’est pas encore suffisant. Mais la vitesse de parution des décrets concernant la loi Matras nous faire dire que le sujet est sur la table. C’est bien.
Comment est perçu votre document chez les candidats à la députation ?
Plutôt bien. Ce n’est pas un sujet clivant, même si nous souhaitons plus de moyens. Nous n’appelons pas à une révolution du système, mais à une évolution des mentalités. Notre but est d’être au coeur d’une politique qui s’exprime au quotidien. Il ne faut plus que la protection civile passe sous les échos radars jusqu’à la prochaine crise.
‘‘ Nous sommes en risque incendie en plein printemps”