Nice-Matin (Cannes)

Laura Calu L’APPEL DES PLANCHES

Dès ses premiers pas à Correns, elle vivait pour la scène. Un rêve de gamine qu’elle s’est donnée les moyens d’accomplir. Elle présente son deuxième spectacle fin février à Toulon.

- FABRICE MICHELIER fmichelier@nicematin.fr

Face au fort Gibron, à Correns, une Marianne habille une plaque métallique. Bonnet phrygien, cheveux de feu et regard profond. Derrière ces traits, se cache le portrait de Laura Calu. L’enfant du pays. « C’est un artiste local qui a fait ça, il me l’a offert sur toile également », s’émeut la comique. Début janvier, elle a posé ses valises dans son village natal pour apprendre les textes de son nouveau spectacle. Chez elle, loin du tumulte de la vie parisienne. « J’ai vécu ici jusqu’à mes 18 ans. Les trois quarts des personnage­s que je joue sur scène sont inspirés par ce village. Avoir grandi ici, un peu coupée du monde, ça m’a aidé à développer mon imaginaire », plaide la Varoise. Ses premiers sketchs sont nés dans la cour de récréation. « Je distribuai­s les rôles et évidemment je m’attribuais les meilleurs », s’amuse Laura. Carla, son amie de toujours, confirme : « À l’école, on avait mis en scène Le Petit Prince. Elle tenait absolument à jouer le roi, car c’est un personnage extravagan­t, elle pouvait montrer son jeu d’actrice. On faisait aussi beaucoup de jeux de rôles, elle organisait les histoires. On jouait au papi ou la mamie, pas des jeux classiques. Elle avait toujours des idées rigolotes. »

« On ne me disait pas souvent que j’allais réussir »

Le spectacle de CM1 avec la représenta­tion du Petit Prince garde une place à part dans les souvenirs de Laura. C’est à ce moment-là que les choses se sont éclairées. «Je n'étais pas très douée à l'école. J'étais très rêveuse, à une époque où on ne faisait pas trop attention aux enfants comme moi. On nous considérai­t à la ramasse, alors que ça aurait mérité d’être accompagné. On ne me disait pas souvent que j'allais réussir dans la vie. Quand j'ai joué ce rôle, ça a captivé l'assemblée. Lorsque je suis descendue de scène, l'instituteu­r, qui ne me faisait pas beaucoup de compliment­s, a dit à ma mère : “OK, tu en feras une comédienne”. Avec le recul, je pense qu'au fond de moi, je le savais déjà. Il l'a confirmé. Le fait que ça vienne de quelqu'un d'influent, ça a beaucoup compté. À partir de là, je n'ai pas lâché. »

Des cours de danse aux planches du théâtre des Ursulines à Brignoles, la gamine continue de faire rire « même à la danse classique. Quand j'ai arrêté, ma prof, Mme Sanchez, était hyper déçue. Elle disait : ce n'est pas la meilleure danseuse, mais c'est celle qui transmet le plus de choses sur scène, elle est tellement souriante qu'on en oublie qu'elle se plante ». À l’étroit à Correns, Laura plie bagage en troisième pour partir en internat à La Crau avant de poursuivre ses études à la Coudoulièr­e à Six-fours. « J’aimais dessiner, je peins toujours d’ailleurs. Et comme j’aimais les fringues, je me suis dit pourquoi pas le stylisme ». La Corrensois­e valide ses diplômes, mais rêve toujours de scène. « Je voulais être comédienne. Mes parents ne m’ont pas retenue. Ma mère m’a demandé comment je comptais m’y prendre. J’avais une amie à Paris, je suis allée m’installer chez elle » .Le deal est simple, Laura a un mois pour trouver du boulot. Ce sera serveuse : « J’étais mauvaise, mais j’avais les plus gros pourboires car je faisais rire les gens ». Elle finit par intégrer une école de théâtre et se confronte à une tout autre réalité. « À Correns, je me sentais un peu unique en mon genre. J'étais la comédienne, le seul clown qui voulait en faire son métier. À Paris, je me suis retrouvée dans un bain de gens talentueux. J'ai ressenti la concurrenc­e, les castings loupés… » La suite, ce sont quelques moments de doute. « Je vivais avec quelqu’un qui m’a coupé de tout cela et avait beaucoup d’influence sur moi ».

« Elle était déjà décalée dans son humour et ce qu’elle faisait. Son compagnon de l’époque, c’était tout le contraire », abonde Vincent qui a connu l’interprète de Magalie la Cagole dans la capitale. Il poursuit : « Quand elle est montée sur Paris, elle pensait s’épanouir. Ses rêves, aussi bien amoureux que profession­nels, se sont effondrés rapidement. Elle était déçue aussi de ce petit monde du théâtre parisien, mais tout a explosé quand elle a rencontré Arthur ».

Des vidéos à la scène

Arthur, c’est Arthur Chevalier, metteur en scène et aujourd’hui l’époux de Laura. Avant de le rencontrer, la comique finit par travailler pour des émissions de télé, jusqu’au jour où l’émission pour laquelle elle castait les candidats s’arrête. « J’ai regardé sur Pôle Emploi, le parc Astérix cherchait des comédiens. Je me suis retrouvée sur scène et j’ai refait mon statut d’intermitte­nt. »

C’est à ce moment-là qu’elle se met à faire ses premières vidéos, sur Facebook. Très vite, les vues s’accumulent. « C’était assez incroyable. Je me suis retrouvée parmi les pages les plus influentes avec Vérino. J’ai ensuite eu mon premier article dans Var-matin. Ça m’a lancée. » Des vidéos à la scène, il faut ensuite franchir le pas. « C’était le but premier. J’ai mis du temps car j’avais peur mais aussi parce que j’étais mal accompagné­e. Dès que j’ai rencontré Arthur, ça a été plus simple. Il a compris qui j’étais ». Le duo se met en branle. Tout va très vite jusqu’au mois de septembre 2018 et la première sur scène, au Colbert à Toulon. « C’est un des plus beaux jours de ma vie. C’était incroyable, un rêve qui se concrétise », souffle-t-elle les yeux rougis par l’émotion. Comme un clin d’oeil, elle inaugurera son nouveau spectacle (lire ci-dessous) sur la scène toulonnais­e. « Toute ma vie j’y reviendrai pour mes premières », conclut Laura dans un dernier éclat de rire.

« J’étais mauvaise serveuse, mais j’avais les plus gros pourboires, je faisais rire »

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(Photo Franz Chavaroche) Laura Calu, égérie de Correns.

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