Un accord Europe-Turquie pour freiner l’afflux de migrants
Les Européens ont scellé hier un plan d’action avec la Turquie pour freiner le flux de migrants vers l’Union européenne, en se gardant d’être trop précis sur les contreparties aux Turcs, venus décrocher une relance de leur processus d’adhésion. L’ambiguïté des promesses de ce sommet réuni à Bruxelles n’a pas empêché la Turquie de saluer un « jour historique » sur le chemin de son adhésion à l’UE, alors que le pays est montré du doigt pour ses violations des droits de l’homme. Cette rencontre inédite entre les 28 Etats membres et la Turquie a en tout cas entériné l’aide de trois milliards d’euros que les Européens verseront pour aider Ankara à mieux accueillir les réfugiés syriens. Et pour éviter qu’ils cherchent à rejoindre l’Europe, dont l’unité vacille sous la pression migratoire. En quatre ans et demi, la guerre en Syrie a fait plus de 250000 morts et près de 12 millions de déplacés et réfugiés. La Turquie, qui en accueille déjà plus de 2,2 millions sur son sol, «nedoit pas porter seule le problème migratoire », a lancé le chef du gouvernement turc, Ahmet Davutoglu, en quittant Ankara pour Bruxelles.
« Redynamiser » le processus d’adhésion
« Nous allons contrôler très précisément l’utilisation des 3 milliards d’euros » ,a promis le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, dont l’exécutif a négocié le plan d’action commun entériné hier. Ankara s’y engage notamment à rendre ses frontières avec l’UE plus imperméables aux migrants économiques irréguliers, et à coopérer dans la lutte contre les passeurs qui opèrent depuis les côtes turques. Plus de 700 000 migrants au total ont emprunté depuis janvier cette porte d’entrée vers l’Europe, rejoignant la Grèce par la mer. Les Turcs ont obtenu de leur côté la promesse d’une accélération des négociations en cours pour faciliter l’attribution de visas pour l’Europe. Et les deux parties ont surtout convenu de « redynamiser » les négociations d’adhésion de la Turquie, ouvertes en 2005 mais quasiment au point mort depuis. Le texte contient toutefois de nombreuses précautions sémantiques afin de ne pas braquer les réticences toujours très fortes de certains pays, notamment la Grèce et Chypre. Sans oublier que Bruxelles a récemment fustigé « les graves reculs » de la liberté d’expression en Turquie, et juge « inquiétante » la situation de deux journalistes turcs, inculpés et écroués pour un article sur de possibles livraisons d’armes par les services secrets turcs à des islamistes en Syrie.