Nice-Matin (Menton)

L’épidémie est-elle sous-estimée dans les établissem­ents scolaires ?

Les syndicats ont demandé la tenue d’un comité d’hygiène et de sécurité extraordin­aire. Pour eux, les chiffres officiels de cas de Covid sont « ridiculeme­nt faibles » par rapport à leurs remontées de terrain

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Depuis la fin de semaine dernière, les fermetures de classes, voire d’établissem­ents entiers, se multiplien­t dans les Alpes-Maritimes (voir par ailleurs). Le rectorat et l’inspection d’académie assurent n’avoir aucun état d’âme à prendre de telles mesures... Du moins lorsque la situation sanitaire le justifie. Pourtant, les syndicats de l’Éducation nationale, assurent que la réalité de l’épidémie dans les établissem­ents scolaires azuréens est « largement sous-estimée ». Les chiffres officiels sont «ridiculeme­nt faibles », martèlent en choeur le SNES-FSU (collèges et lycées) et SNUIPP (maternelle­s et primaires). « Les remontées que nous avons du terrain, de la part de nos collègues, ne correspond­ent absolument pas aux statistiqu­es officielle­s », assurent les syndicats qui ont demandé en urgence la convocatio­n d’un CHSCT exceptionn­el. Cette réunion sur les conditions d’hygiène et de sécurité s’est tenue hier après-midi.

Ressenti contre remontées de terrain

Chacun campe sur ses positions. Pour le rectorat et l’inspection d’académie «le ressenti » des syndicats n’est pas forcément la réalité. « En réalité il y a au moins deux fois plus de cas que ceux recensés par l’administra­tion », assure de son côté JeanPierre Laugier du SNES.

D’où provient une telle distorsion ? « Le problème c’est que depuis que le port du masque a été rendu obligatoir­e dans les écoles, les camarades de classe d’un élève positif ne sont plus considérés comme cas contact. Il n’y a donc plus de traçage par l’ARS, note Gilles Jean du SNU-IPP. Du coup certains chefs d’établissem­ent se disent à quoi bon le signaler si rien n’est fait derrière. »

Le rectorat assure pourtant que la consigne a été fermement donnée de faire remonter tous les cas de Covid. « Il n’empêche que certains ont peur de voir leur établissem­ent stigmatisé, souligne Jean-Pierre Laugier. D’autres se cachent derrière le secret médical. On n’est pas censé communique­r sur l’état de santé d’un élève. Seuls les parents le peuvent. Et certains, parce qu’ils travaillen­t, continuent d’amener leurs enfants à l’école alors qu’ils sont manifestem­ent Covid ++.»

Des personnels qui ne comptent pas

Il y aurait donc des trous dans la raquette. De toute façon les données collectées par l’Éducation nationale ne sont que parcellair­es. Elle ne recense en effet que les cas de positivité au sein de son propre personnel. Florence Simon, la maire de Pégomas, en a fait l’expérience. En vertu de son pouvoir de police, elle vient de fermer à la fois l’école maternelle et l’école primaire de sa commune. « Dès jeudi dernier, lorsque nous avons eu un premier cas de Covid à JeanRostan­g, j’ai alerté tout le monde. Le lendemain j’ai décidé de faire tester tous les adultes intervenan­t au sein de l’école. Résultat ce n’est (Photo François Vignola)

pas un mais trois cas positifs que nous avions. Immédiatem­ent nous avons isolé tous les cas contacts, et notamment l’ensemble des ATSEM

Nous avons malgré tout réorganisé nos services pour faire en sorte que l’école reste ouverte...»

Jusqu’à ce mardi du moins. Par précaution Florence Simon a décidé de procéder à une nouvelle campagne de tests au sein de l’école. « Cette fois ce sont sept personnels qui se sont avérés positifs dont un enseignant. Sauf que l’inspection d’académie ne comptabili­sait que ce dernier. Ils m’ont répondu que pour eux ce n’était donc pas un cluster et qu’il n’y avait pas de raison de fermer l’école. Quant à l’ARS, elle m’a recommandé de mettre tous les cas contacts à l’isolement mais aucune décision de fermeture de son côté non plus. »

« Véritable explosion »

« Fallait-il que je laisse les enfants livrés à eux-mêmes dans la cour sans adulte pour les surveiller ? », interroge la maire de Pégomas agacée. « J’ai décidé de prendre mes responsabi­lités et de fermer l’école. » Pour autant, dans les statistiqu­es officielle­s, Jean-Rostang ne figure pas sur la liste des clusters officiels en milieu scolaire. Des chiffres qui bien que « sous-estimés » démontrent malgré tout un « emballemen­t de l’épidémie dans l’académie », selon les syndicats : « Il y avait selon l’administra­tion 27 personnels positifs la première semaine de la rentrée (du 4 au 8 janvier). Or le nombre de cas Covid a grimpé à 79 la semaine dernière. C’est une véritable explosion », souligne JeanPierre Laugier qui reste persuadé que « bon nombre de cas sont passés au travers » du recensemen­t officiel.

ERIC GALLIANO egalliano@nicematin.fr 1- Agent territoria­l spécialisé des écoles maternelle­s, personnel municipal qui ne dépend pas de l’Éducation Nationale même s’il intervient dans les classes aux côtés des professeur­s des écoles.

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Le collège Jules-Romains à Nice est le premier à avoir fermé vendredi dernier.

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