Disparus, les loups d’Alpha en voie de « destruction » ?
L’État ayant perdu la trace des trois derniers fugitifs en vie, deux syndicats agricoles exigent des tirs de prélèvement. « Seulement en cas de trouble à l’ordre public », répond le préfet référent loup
Les trois loups évadés du parc Alpha encore en vie et en vadrouille ont réussi à échapper à la tempête Alex, qui a détruit leurs enclos, ainsi qu’aux équipes de l’Office français de la biodiversité (OFB) et leurs fusils destinés à les endormir. Mais la politique, elle, les a rattrapés.
Après une première flèche envoyée par le biais de la sénatrice Les républicains Dominique Estrosi-Sassone, Jean-Philippe Frère, président de la FDSEA06 et Jacques Courron, président de la Fédération départementale ovine ont envoyé un courrier au préfet des Alpes-Maritimes, au préfet référent loup, mais aussi au ministre de l’Agriculture. Objectif : demander des comptes à l’État. Et le sommer de prendre un arrêté de tir de prélèvement (ou de « destruction »). Soit, de les abattre.
« L’État joue aux apprentis sorciers »
Les individus manquants, deux loups canadiens (un mâle et une femelle) et une femelle arctique, ont totalement disparu des radars. « J’ai donné consigne aux agents d’arrêter les opérations de capture, reconnaît Eric Hansen, directeur régional de l’OFB. Nous les reprendrons dès que nous auront des observations régulières d’un loup à un endroit donné ».
Mais les syndicats agricoles montrent leur impatience. « On a laissé le temps de les capturer, on a fait confiance, c’est normal, détaille Jean-Philippe Frère au téléphone. À un moment donné, on ne peut plus ». Il accuse l’État de faire le mort à ce sujet et de « jouer aux apprentis sorciers ». Selon lui, l’inaction de l’État relève du choix : « Aujourd’hui, on peut dire que l’État français a réimplanté des loups ». Faisant ainsi référence au « péché originel » du retour du loup en France, en 1992. L’État, dépassé, tarde alors à officialiser la nouvelle. Ce qui a alimenté l’idée d’un secret d’État et d’un programme de réintroduction par l’homme.
Eric Ottino)
Rumeur qui a encore la vie dure dans les milieux ruraux. « Comment voulez-vous laisser passer ça, avec tout ce qui s’est passé depuis 30 ans dans notre département ? » Les risques, selon lui ? De nouvelles pressions sur les troupeaux et des risques de croisements d’espèces, que les spécialistes jugent peu probables (voir par ailleurs).
Bref : « Il y a une décision à prendre, c’est le prélèvement », résume le courrier. Ce qui aurait déjà été promis, affirme-t-il, le 7 décembre par Jean-Marc Celet, préfet référent loup en France.
S’il y a « contact » avec troupeaux ou habitants
« Ce que j’ai annoncé, c’est que s’il y avait un trouble à l’ordre public, alors nous prendrions un arrêté de destruction, pas plus que ça, rectifie Jean-Marc Celet. Mais pour l’instant, il n’y a pas de sujet, puisque nous n’avons pas pu les capturer et on ne les voit plus. »
Pour calmer le jeu, l’homme d’État fait des concessions : « L’important, c’est de pouvoir protéger les troupeaux. On parle de la Roya et de la Vésubie. Dans ces deux vallées, on multiplie les autorisations de tirs, j’ai demandé que les louvetiers puissent sortir ». Mais dans quel cas concret pourrait-il autoriser la « destruction » de ces animaux élevés en captivité ? S’ils attaquent des troupeaux. Ou «sices loups réapparaissent et s’approchent des habitations et des hommes, s’aventure Jean-Marc Celet. S’il y a vraiment contact et que la situation l’exige, nous pourrions prendre un arrêté ».
ANTOINE LOUCHEZ alouchez@nicematin.fr