Nice-Matin (Menton)

Un éleveur de la Vésubie s’inquiète pour son estive

Terrains avalés par la tempête Alex, route de la Madone de Fenestre fermée, etc. Alors que le printemps tape à la porte, Gérard Nervi, éleveur de peine à se projeter.

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Rongé par l’inconnu et à l’approche des beaux jours, Gérard Nervi se lève de plus en plus tôt. «Là, je me suis réveillé à minuit, lâche cet éleveur bovin installé à Gordolon, hameau de Roquebilli­ère. Hier, c’était 2 heures. Cette vie qu’on a, ça me tue. On pense au printemps. C’est compliqué financière­ment et physiqueme­nt. Mais c’est moralement qu’on est touché, au plus profond de nous-même. »

Fils d’éleveurs de la Vésubie, Gérard n’a, avec la tempête Alex, rien perdu de sa maison, ni de la grange mitoyenne où restent ses vaches pendant l’hiver. Mais pour le reste, c’est « la désolation ».

 % de terrain printanier­s disparus

En temps normal, les dixhuit vaches de Gérard sortent à la mi-avril, pour faire ce qu’aiment les bovins : manger de l’herbe fraîche et paître en montagne. D’abord sur un terrain de 12 hectares que l’éleveur loue, en contrebas de chez lui, de l’autre côté de la route. Avant qu’il ne les fasse monter pour l’estive (de juin à octobre) sur les terres de la Madone de Fenestre, au-dessus de SaintMarti­n-Vésubie.

Le terrain en bas de chez lui, installé dans le lit de la rivière, a été détruit (photo ci-contre). Sur les 12 hectares, il n’en reste plus qu’un. Quant à la Madone de Fenestre, la route est toujours en partie détruite. Ce qui lui avait déjà valu une sacrée frousse. Il a obtenu un coup de main pour redescendr­e les bêtes sur le gong, en novembre, avant que le froid (Photo A. L.) n’ait raison d’elles. «Ona mis quatre jours, en passant par des crêtes », se souvientil.

L’hiver et les mois ont passé. Les vaches doivent bientôt sortir et l’éleveur a le sentiment de ne pas avoir de réponse. Il monte des dossiers. Mais n’arrive pas à se projeter.

« Sans ce collègue, ce serait fini »

Il a trouvé une solution temporaire pour le printemps, à dix kilomètres de chez lui. Mais ensuite ? « Si je n’avais pas un collègue pour me prêter un morceau d’herbe, ce serait fini. J’espère que la route de la Madone sera ouverte ou je serai fini, il n’y aura pas le choix ».

Il le répète : « Je ne demande pas la charité. » Il y a bien eu les coups de main ici et là, les gestes de la Chambre d’agricultur­e qui a, notamment, donné un peu de foin. Mais il cherche à se projeter. Dans quelles conditions pourra-t-il exercer sa profession, à court et moyen terme ? Gérard Nervi a peur que ses inquiétude­s et celles de ses « collègues » ne soient pas entendues. Que cela vienne achever une profession en déclin. «Une montagne, quand il n’y a plus de bêtes, ce n’est plus une montagne », souffle-t-il. Tout ce qu’on lui dit, c’est de remplir des documents. Alors que la saison commence dans un mois. Dans son malheur, l’éleveur a tout de même une chance : son terrain d’estive se trouve sur un site très touristiqu­e. Et fera partie des priorités des autorités.

ANTOINE LOUCHEZ alouchez@nicematin.fr

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Gérard Nervi,  ans, élève des vaches depuis  ans.
 ??  ?? À gauche, le terrain dans le lit de la Vésubie avant la tempête Alex, à droite après la tempête.(Photo
À gauche, le terrain dans le lit de la Vésubie avant la tempête Alex, à droite après la tempête.(Photo
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