Il dégrade deux véhicules de la Sûreté publique
Tribunal correctionnel Un sexagénaire russe était venu à Monaco pour se faire remarquer. Il voulait attirer l’attention du prince Albert II sur le comportement médiocre des diplomates russes en Europe
Marginal ou original ? Quel qu’il soit, à l’écoute du dossier évoqué devant le tribunal correctionnel, un sexagénaire russe semblait bien atteint des troubles de la personnalité. A moins d’avoir un goût prononcé pour les procédures et théories du complot !
« Pour remettre un courrier au prince Albert II »
Le 11 décembre dernier, vers 8 h 30, il se présentait à l’accueil de la Sûreté publique et il déclarait dans un français approximatif : « Je viens de détériorer deux véhicules de police stationnés devant votre bâtiment. J’ai cassé les rétroviseurs. C’était utile de me faire remarquer, car je veux attirer l’attention des autorités monégasques afin de remettre un courrier au prince Albert II. »
Puis, il tend trois pages manuscrites en cyrillique. Le planton de service, certainement incrédule sur le coup, a pensé subitement à un de ces personnages illuminés nantis d’un désir de toute puissance. Mais prudent, méfiant et vigilant, il est sorti et il a pu constater les dégâts annoncés sur les deux voitures.
A l’audience, le président Jérôme Fougeras Lavergnolle a rappelé que la scène avait été filmée par les caméras de vidéosurveillance.
« On voit en effet ce personnage atypique débarquer d’un train à la gare en provenance de Florence. Il se dirige à pied vers les locaux de la rue Suffren-Reymond.
Il tape sur les véhicules et monte directement au premier (Photo Jean-François Ottonello) étage où est située la réception pour le public. Il a été placé en garde à vue et conduit au CHPG afin de subir un examen psychiatrique.
L’avis du médecin spécialiste des maladies mentales fait état d’un patient qui n’est atteint d’aucun trouble psychiatrique. On pouvait donc l’interroger. »
Pourtant, à en juger par la scène décrite, tout semblait désigner plutôt un névrosé, à un moment où la souffrance est telle qu’elle provoque chez ce sujet la mise en place d’un mécanisme de défense.
Car il est bien question de défense quand le magistrat a donné un aperçu des raisons contenues dans la lettre. « Le prévenu a reconnu les faits. Il n’était pas venu à Monaco par hasard depuis la cité italienne, mais bien avec la volonté d’alerter le souverain Albert II sur la situation des diplomates russes et dénoncer leurs comportements déplorables depuis 1992 au sein de l’Europe. »
Pour le premier substitut Cyrielle Colle, « cet individu n’a jamais été condamné. Et on ne connaît pas les véritables motifs qui l’ont conduit à pareil comportement impensable et à un récit aussi délirant. Vous prononcerez une peine d’amende à hauteur de 500 euros. » Le tribunal a suivi les réquisitions du ministère public.
Faut-il détecter dans ces faits une étonnante coïncidence avec la tentative d’empoisonnement de Alexeï Navalny, ce dissident russe des années 2020 ?
JEAN-MARIE FIORUCCI * Assesseurs : Mme Aline Brousse et M. Adrien Candau.