Nice-Matin (Menton)

Le printemps japonais gagne la Principaut­é P

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« C’est une oeuvre d’intérêt patrimonia­l majeur. Elle a sa place dans un grand musée. Ma profonde conviction, fondée sur l’imagerie et les analyses scientifiq­ues, c’est qu’elle est bien de Raphaël. » Il a fallu neuf ans à Laure Chevalier pour lever ses derniers doutes. Cette historienn­e de l’art est spécialist­e des méthodes d’expertise et de la traçabilit­é des oeuvres. Elle a étudié celle-ci sous toutes ses coutures. Et pourtant ! Quand une retraitée originaire de Cannes lui soumet cette madone en 2012, en lui expliquant que l’oeuvre dont elle a hérité pourrait être de Raphaël ou d’un de ses élèves, l’experte est plus que sceptique. « J’ai mis six mois à accepter. » L’oeuvre a déjà fait la Une des journaux en 1936, puis 1957. Elle a même séduit les critiques d’avant-guerre. Mais aucune recherche sérieuse n’a été menée à bien.

Laure Chevalier l’ignore encore, mais elle entame une enquête au long cours. Une série d’investigat­ions haletantes où se croisent art, science et histoire. « J’ai approché l’oeuvre à la façon d’un conservate­ur de musée ou d’un

Problème : le monde connaît déjà une Madone aux oeillets de Raphaël. La célèbre Madonna of the pinks trône à la National Gallery de Londres. La respectabl­e institutio­n britanniqu­e l’a acquise en 2004, pour la coquette somme de 32,5 millions d’euros.

Certains doutent encore de son authentici­té. Laure Chevalier ne s’y risque pas. D’autant que ses recherches l’ont convaincue que le maître d’Urbino a peint deux versions de sa Madonna dei garofani.

À ses yeux, seules deux hypothèses subsistent pour la Madone aux oeillets « azuréenne ». « Soit il s’agit de l’original disparu. Soit d’une variation autographe [une seconde version, ndlr], terminée par Ridolfo del Ghirlandai­o. » Consultés sur la base d’une photo, certains experts excluent d’emblée que ce tableau puisse être du maître florentin. S’il venait à lui être attribué, ce serait une bombe dans le monde de l’art. Et pour son marché, qui vient d’assister à la vente à rebondisse­ments d’un Van Gogh pour treize millions d’euros. Ce serait aussi un hommage inattendu à Raphaël, dont on a célébré en 2020 les 500 ans de la mort.

DOSSIER : CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

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